Cours - Droit des biens - 1re - 248

DROIT DES BIENS
358 Les trois qualités attendues de la possession. Restent par conséquent, trois qualités
attendues de la possession : elle doit être paisible, publique, et non équivoque. Ces trois
qualités sont susceptibles d'évolution, en quoi elles constituent des vices temporaires. En
revanche, les deux premières sont relatives, en ce sens que c'est celui qui pâtit du vice de
la possession prétendue qui seul peut s'en plaindre ; la troisième est absolue car tout intéressé peut s'en prévaloir et l'opposer au prétendu possesseur.

Présomption de l'absence de vice de la possession. Toutes ces qualités sont considérées comme présentes chez le possesseur : l'existence d'un vice ne se présume pas ; il doit
être démontré par son adversaire.
359

Présentation. Parmi les trois conditions requises de la possession, les deux premières,
le caractère paisible et le caractère univoque, s'apprécient par rapport au possesseur
prétendu et visent à établir l'absence d'intention frauduleuse chez ce dernier ; il est donc
question de la conduite du possesseur prétendu (A). La troisième qualité considérée poursuit une certitude manifeste du fait proclamé. De ce fait, elle se reflète dans un regard
extérieur (B).
360

A. La conduite du possesseur prétendu
1. Une possession paisible
361 Vice de violence. Cette condition de paisibilité vise à exclure l'exercice d'une violence,
qu'elle soit matérielle ou morale51. La possession ne saurait en effet s'acquérir de la sorte52.

362 Admission de la violence défensive. Mais un possesseur peut-il défendre sa possession ? Pour beaucoup, ce qui est prohibé, c'est la violence pour s'approprier un bien. La
violence « défensive », elle, ne vicie pas la possession du possesseur agressé53. Ce n'est
rien d'autre que l'exercice d'une légitime défense des biens, soumise à l'exigence de
proportion de la riposte à l'agression. Ce qu'admet le droit pénal devrait trouver un écho
en droit civil.
Certes la solution qui consiste à se placer au jour de l'entrée en possession pour apprécier le vice de violence semble conduire à valider un acte de justice privé dès que le
possesseur récupère par la force le bien dont on vient de le priver de sa jouissance. Il
pourrait donc être légitimement considéré que la violence devrait être sanctionnée et ce,
quelle que soit la date à laquelle elle a été exercée et à quelque occasion que ce soit54.
Dans deux décisions, la première du 30 avril 1969 et la seconde du 15 février 199555, la
Cour de cassation avait reproché aux premiers juges d'avoir affirmé que la possession

51. Cass. 3e civ., 30 avr. 1969, Bull. civ. III, nº 348 ; 15 févr. 1995, ibid. nº 53, Defrénois 1995, art. 36161, p. 1117, obs. Ch. ATIAS.
52. Mais les actes qui sont avancés pour contester le caractère paisible de la possession doivent émaner du possesseur et non
d'un tiers : Cass. civ., 26 août 1884, DP 85. 1. 58.
53. V. déjà Œuvres de Pothier, par Dupin, t. 8, 1825, p. 333.
54. Rappr. J.-L. Bergel, M. Brunschi et S. Cimamonti, nº 144.
55. Préc.

248
Table des matières de la publication Cours - Droit des biens - 1re
