Cours - Droit des biens - 1re - 73

Les immeubles

l'illustration topique du pouvoir dominant de la volonté sur la qualification mobilière ou
immobilière des biens51. La décision de 1991 met en cause la sécurité du vendeur qui ne
mérite pas d'être sacrifié au nom d'une qualification qui, ailleurs, se révèle plus malléable.
Certes, la propriété réservée, parce qu'elle va conduire à une dispersion des actifs de
l'entreprise, n'est pas la situation idéale dans une perspective de sauvegarde et de redressement de celle-ci ; mais il ne paraît pas y avoir de raison majeure à s'arc-bouter sur une
qualification que la convention des parties visait précisément à retarder, et de ce fait
« accorder une portée impérative discutable aux catégories légales »52.
58 Influence de l'ouverture d'une procédure collective. En cas de procédure collective,
l'article L. 624-16 du Code de commerce53 autorise la revendication des biens détenus par
un débiteur soumis à une procédure collective, vendus avec une clause de réserve de
propriété subordonnant le transfert de propriété au paiement intégral du prix, à diverses
conditions. L'une d'elles veut que lesdits biens se retrouvent en nature dans le patrimoine
du débiteur au moment de l'ouverture de la procédure. Cette exigence était une condition
déjà requise avant la loi de 200554. L'incorporation avait aussi conduit à cette solution dans
une espèce plus ancienne s'agissant de biens fongibles qui avaient été intégrés dans un
stock et qui n'étaient, de fait, plus individualisés55. La loi nº 94-475 du 10 juin 1994 est
cependant revenue sur cette conséquence en permettant néanmoins la revendication56 ; la
restitution suppose simplement que les biens présents soient fongibles c'est-à-dire de
même espèce et de même qualité que ceux qui avaient été livrés57. La clé de répartition
semble se dessiner : l'incorporation modifie la nature du bien là58 où l'immobilisation par
destination est impuissante à le faire (puisqu'il n'y a pas, en l'absence de paiement
complet du prix, identité de propriétaire).

B. Le rapport de destination
La nécessaire matérialisation de la volonté du propriétaire des biens. La seule volonté
du propriétaire, bien qu'indispensable pour conduire à l'immobilisation d'un meuble59, est
insuffisante60. Un rapport de destination doit pouvoir être constaté entre le meuble et
l'immeuble par nature.
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Deux critères de liaison : l'affectation du bien à l'exploitation d'un fonds ; l'attache du
bien au fonds à perpétuelle demeure. Pour ce faire, la loi a prévu deux procédés : le
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51. En ce sens F. ZENATI, obs. in RTD civ. 1992. 144.
52. F. TERRÉ, in Mél. J. Buffet, spéc. pp. 430-431.
53. Loi nº 2005-845 du 26 juill. 2005, mod. Ord. nº 2006-346 du 23 mars 2006, mod. Ord. nº 2008-1345 du 18 déc. 2008.
54. Cass. com., 6 janv. 1987, D. 1987. 242, note J. PRÉVAULT : alors que le matériel industriel en cause était dissociable et que cette
possibilité était d'ailleurs indiquée par les parties dans la clause de réserve de propriété, la Cour de cassation a retenu que les
biens n'existaient plus en nature puisque incorporés au fonds immobilier.
55. Cass. com., 9 juill. 1979, Bull. civ. IV, nº 230.
56. Auj. : art. L. 624-16, al. 3 C. com. ; CA Paris, 3 avr. 1998, D. 2000, Somm., 69.
57. Cass. com., 5 mars 2002, Bull. civ. IV, nº 48, RTD civ. 2002. 327, obs. Th. REVET.
58. Sous réserve de la possibilité de séparer les biens sans dommage, art. L. 624-16 ; v. déjà : Cass. com., 12 févr. 1991,
Bull. civ. IV, nº 69.
59. Par ex. Cass. 1re civ., 13 avr. 1999, nº 96-21912.
60. Rappr. Cass. Ass. plén., 15 avr. 1988, Bull. 1988, nº 4 (fresques arrachées).

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