Bibliothèque de droit privé - Tome 584 - La recherche d'un statut de l'oeuvre transformatrice - 165

LE CRITÈRE COMMUN AUX œUVRES COMPOSITES

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contient plusieurs unités71. Cette signification in intellectu72 est proche de l'usage
juridique de ce mot. Par exemple, le pluralisme juridique désigne l'idée selon
laquelle « sur un territoire donné, à un même moment, peuvent coexister plusieurs ordres juridiques distincts plus ou moins dépendants les uns des autres, et
éventuellement concurrents »73. L'idée est celle d'un support unique vers lequel
convergent plusieurs éléments.
Ces observations conduisent à dédier le premier temps de l'approche à l'étude du
concept d'œuvre plurale en tant que tel, comme lieu de convergence de droits. Puis, le
second temps de l'approche consistera à décliner les diverses figures qui peuvent être
rattachées à ce concept. L'analyse est alors structuraliste74, chaque notion acquiert
son identité par comparaison avec les notions de la même espèce. Une proposition de
systématisation des caractères de l'œuvre plurale (A.) permettra donc de déterminer
les objets qui la composent et de proposer leur classification juridique (B.).
A. PROPOSITION DE SYSTÉMATISATION
DES CARACTÈRES DE L'œUVRE PLURALE
La mise en évidence du pluralisme juridique résulte d'un mouvement doctrinal
qui a renouvelé l'approche des sources du droit en choisissant de les étudier à partir
d'une description de la réalité sociale. Les partisans du monisme avaient centré leur
raisonnement sur le rôle de l'État, qui était le présupposé, afin de démontrer qu'il
ne pouvait être que la seule source du droit. Les partisans du pluralisme ont fait le
choix de centrer l'étude sur l'analyse du sujet de droit lui-même afin de démontrer
qu'il est au centre de plusieurs réseaux sociaux, de plusieurs ordonnancements juridiques75. L'approche est alors déductive plutôt qu'inductive76.
De façon parallèle, le raisonnement classique en matière d'œuvres plurales
consiste aussi à partir d'un présupposé : la désignation légale de l'auteur77, qui
résulte d'un choix législatif, pour en déduire la qualification. Les œuvres composites se voient par conséquent dénier d'être associées à une œuvre plurale puisque
leur auteur est unique. Pourtant, cette vision des choses part d'un présupposé
contestable, dès lors que l'œuvre composite accueille les apports originaux d'au
moins deux auteurs différents. Partant, il semble justifié de proposer une approche
différente, construite à partir d'une description de la réalité des objets prétendument pluraux (1), en recherchant s'ils présentent des traits communs, et ce, afin de
déterminer les traits caractéristiques du concept d'œuvre plurale (2).
71. Le Grand Robert de la langue française, dictionnaire alphabétique et analogique de la langue
française de Paul Robert, 2e éd. revue et enrichie par A. Rey, Le Robert, 1985, v° « plural, ale, aux ».
72. G. Cornu, Linguistique juridique, op. cit.
73. D. Alland et S. Rials (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, PUF, 2003, v° « pluralisme
juridique ».
74. J. Carbonnier, Sociologie juridique, 2e éd., Quadrige, 2004, pp. 136-138.
75. J. Vanderlinden, « Vers une nouvelle conception du pluralisme juridique », RRJ 1993-2,
vol. XVIII, pp. 573-583.
76. C. Eisenmann, « Quelques problèmes de méthodologie des définitions et des classifications
en science juridique », op. cit., spéc. n° 12, pp. 33-34 : « C'est une erreur totale de croire que la
classification, c'est-à-dire la subdivision en plusieurs groupes ayant chacun sa dénomination, est une
donnée du réel, qu'elle résulte du droit positif (...). En vérité, les bases de la classification et par suite
de la qualification ne sont en aucune façon données au juriste ; c'est à lui de les choisir, de les décider,
en tenant compte des seules exigences et intérêts de la connaissance scientifique ».
77. P. Gaudrat, Rép. civ. Dalloz, op. cit., n° 196.

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