Bibliothèque de droit privé - Tome 584 - La recherche d'un statut de l'oeuvre transformatrice - 261

LES LIMITES DE LA RÉSOLUTION DU CONFLIT PAR LE DROIT COMMUN

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ce fut le cas dans l'arrêt Choueka93, est différente de celle précédemment évoquée.
La solution consiste en effet, pour le juge, à dénier au tiers le droit de se prévaloir
de cette absence d'autorisation. Dans une décision du 5 mai 2000, la cour d'appel
de Paris a ainsi considéré que « seul l'auteur de l'œuvre préexistante94 a qualité
pour se prévaloir de ce que son accord n'a pas été sollicité pour la réalisation de
l'œuvre composite »95. Le tiers poursuivi en contrefaçon de l'œuvre composite ne
peut donc invoquer ce moyen. Cette solution judicieuse fait écho à la règle selon
laquelle seul l'auteur peut se prévaloir de l'inobservation des conditions posées par
l'article L. 131-3 du code la propriété intellectuelle en matière de cession de droits96.
L'idée est d'empêcher le tiers prétendument contrefacteur de se prévaloir des liens
entre l'auteur de l'œuvre composite et l'auteur de l'œuvre originelle, ou de leur
absence, afin d'empêcher le juge de statuer sur la légalité de ses agissements.
Bien entendu, l'absence d'autorisation aura une conséquence sur l'assiette de
la protection. S'il a créé sans autorisation, l'auteur de l'œuvre composite ne
pourra revendiquer la contrefaçon que des seuls éléments originaux dont il est
l'auteur au sein de l'œuvre composite. Cependant, s'il exploite son œuvre composite de façon paisible et continue, il peut bénéficier, comme tout exploitant, de la
présomption prétorienne de titularité97.
Au final, éclairer les conditions d'existence et d'exploitation de l'œuvre composite permet de préciser plusieurs situations dans lesquelles est en cause la défense
des droits de son auteur. Aiguisée en raison du développement exponentiel de la
création des œuvres composites grâce aux outils offerts par les technologies liées au
web 2.0, la question de la gestion des droits mérite à présent d'être abordée.
B. LA GESTION DES DROITS
SUR L'œUVRE COMPOSITE
La particularité de l'œuvre composite, œuvre autonome et dépendante, soulève des difficultés que les quelques dispositions du code de la propriété intellectuelle ne suffisent pas à combler. En particulier, le développement sans précédent
des contenus générés par les utilisateurs liés aux outils offerts par le web 2.0,
contenus qui peuvent constituer des œuvres composites, a conduit à plusieurs
formes de réactions de la part des auteurs et ayants droit des œuvres originelles
ainsi utilisées. L'ampleur du phénomène amène à s'interroger sur la pertinence de
ces diverses réponses, eu égard aux éclaircissements apportés sur les règles applicables à la création de l'œuvre composite. Les auteurs ou titulaires de droits sur
les œuvres originelles adoptent globalement deux approches, qu'il convient d'envisager successivement : la tolérance (1) et l'organisation (2).
1. La tolérance
338. L'originalité des fanfictions. Certains auteurs et ayants droit se montrent
tolérants vis-à-vis des œuvres composites créées par des tiers, sans leur autorisation.
93. Paris, 7e ch., 24  janv.  1980, Skorsky et a. c./ Sté Fauve Puma et a.  (arrêt Choueka) :
Gaz. Pal. 1980. 1. 301, note R. S. V. supra, n° 311.
94. Et aussi les ayants droit.
95. Paris, 4e ch., 5 mai 2000, Sté Galerie de France c./ J. L'hoir et a. : RIDA 2001, n° 188, pp. 251257, obs. A. Kéréver, pp. 352-361 (texte de la décision).
96. Paris, 20 déc. 1989, SA Sativ et a. c./ SA Saint Ys et a. : D. 1990. IR. 32.
97. V. notamment Cass. 1re civ., 10 juill. 2014, n° 13-16465, inédit.
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