ParaMag - n°307 - Décembre 2012 - 20

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Par Yves-Marie Guillaud

LA CONTRAINTE DE LA LOI
L’évocation, le rappel pour certains, la découverte pour d’autres, des dispositions du Code de la Santé Publique relatives à la vente et la distribution d’alcool au sein des établissements d’activités physiques et sportives, semble avoir provoqué moult réactions allant de l’analyse raisonnée à l’explosion de colère. Ce n’est pas vraiment une surprise, même si la violence de certaines peut laisser pantois. Comme usuellement dans ces cas, ceux qui n’ont aucun argument de fond à faire valoir s’en prennent à la personne dans des termes injurieux, parfois diffamatoires, qui ne méritent qu’indifférence, parfois mépris. Reste que l’ensemble de ces réactions, modérées comme excessives, révèle un curieux rapport à la loi du milieu parachutiste qui, par nature il est vrai, accepte mal les contraintes. Les dispositions du Code de la Santé Publique dont il est question (ParaMag n°306) sont insérées dans le Code du Sport, ce qui a déjà été dit mais n’a peut-être pas assez convaincu de leur caractère impératif et coercitif. Il faut donc préciser qu’elles figurent également dans le Code Pénal (éditions Dalloz). La question doit donc être étudiée et traitée avec tout le sérieux que requiert le Code Pénal. La législation contraignante de lutte contre la consommation d’alcool a été développée vers l’an 2000 et a des ramifications dans de nombreux domaines, jusque dans le Code du Travail. Le domaine d’application de la loi est ensuite précisé par la jurisprudence et il faut entre 5 et 10 ans pour que soient dégagées des lignes de forces. C’est ainsi que la responsabilité des chefs d’entreprise a commencé à être évoquée vers 2006 pour être recherchée vers 2008 puis mise en cause vers 2010. Cette évolution récente a étendu le pourtour d’application de la loi en entreprise plus largement que ce qui était compris initialement. Aujourd’hui les « pots » en entreprise comportent de moins en moins souvent de l’alcool et les grandes entreprises font une chasse à l’alcool, les chefs d’entreprises étant jugés complices en cas d’accident automobile ou autre suite à une consommation d’alcool, même modérée, au sein de l’entreprise. Les écoles de parachutisme sont des entreprises, sachant que le terme « entreprise » est totalement indépendant de la forme sociale (association ou société). Doivent s’appliquer en leur sein les règles générales du Code du Travail (entreprises) et les règles particulières du Code de la Santé Publique (établissements d’activités physiques et sportives), sous couvert du Code Pénal.

Une analogie peut être trouvée entre l’application du Code de la Santé Publique au sein des écoles et l’application du Code Général des Impôts dans ces mêmes écoles il y a une dizaine d’années. A l’époque, les écoles de parachutisme avaient des pratiques fiscales assez peu en rapport avec les règles fiscales du Code Général des Impôts. Tout le monde s’en contentait, souvent par ignorance, parfois par cupidité. Ceux qui tiraient la sonnette d’alarme étaient considérés comme d’inutiles empêcheurs de tourner en rond. D’aucuns pensaient que le parachutisme ne survivrait pas économiquement à une imposition à la TVA. Lorsque l’administration fiscale a entamé des contrôles généralisés et des recouvrements d’importants arriérés d’impôts avec intérêts de retard et pénalités, beaucoup ont appelé la FFP à leur secours. Celle-ci a réussi le tour de force d’obtenir une relative clémence du fisc en échange d’un engagement de faire respecter dorénavant les règles fiscales, ainsi qu’un important rescrit fiscal (engagement écrit du fisc) sur les conditions d’exonération de TVA pour les associations. Et les entreprises de parachutisme fiscalisées ont survécu à l’impôt… Si la FFP a su imposer l’orthodoxie fiscale, ne peut-elle faire de même avec la Santé Publique ? Les écoles de parachutisme ont pu se mettre en conformité avec le Code Général des Impôts, pourquoi ne pourraient-elle pas le faire avec le Code de la Santé Publique ? Pas de doute : elles y survivraient aussi. La FFP dispose d’un moyen d’action : le label. La liste des critères d’évaluation ne contient curieusement rien concernant le respect du Code de la Santé Publique. Est-il légitime qu’une école puisse obtenir un label FFP si, ouvertement, elle n’en respecte pas les dispositions ? D’ailleurs en cas d’accident dans un contexte alcoolisé, même légèrement, la responsabilité de la FFP ne pourrait-elle pas être également recherchée en considérant que la labellisation par une fédération délégataire de la puissance publique suppose nécessairement pour l’utilisateur-pratiquant la garantie que l’entreprise labellisée respecte toutes les obligations légales ? La même question mérite d’être posée concernant l’agrément école… Rien ne sert de regarder l’avenir dans le rétroviseur et de regretter l’époque où l’on pouvait boire force bières avant de sauter puis de prendre sa voiture impunément. La société a évolué et ses règles avec elle. Les mesures coercitives de lutte contre la consommation d’alcool ont abaissé considérablement le nombre de morts sur les routes. Les restrictions imposées par le Code du Travail et le Code de la Santé Publique y contribuent. La loi est toujours une contrainte. Contrainte nécessaire à la vie en collectivité mais aussi à la sauvegarde des individus contre euxmêmes et les autres. Cette contrainte de la loi n’est pas une dictature de la loi, dès lors qu’elle a pour finalité de garantir l’autonomie de chacun par rapport aux autres, et de permettre ainsi à chacun de ne pas subir le comportement à risques de l’autre et réciproquement de ne pas faire subir à l’autre son propre comportement à risques. La seule dictature de la loi serait d’interdire à chacun de subir son propre comportement à risques. Le parachutisme serait alors interdit… ■

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Décembre12:307 paramag.fr
Il ne faudrait pas que le milieu parachutiste souhaite voir ses écoles gérées comme de véritables entreprises et hurler au loup lorsque les dirigeants, en bons chefs d'entreprise, entendent veiller à l’application de la loi. Il ne faudrait pas que ceux qui ont des compétences de chefs d’entreprise fuient pour ne pas risquer de voir leur responsabilité pénale personnelle engagée par une vox populi réfractaire à la loi.

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