ParaMag - n°310 - Mars 2013 - 24

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LES PROFESSIONNELS
DANS LES ASSOCIATIONS
Un reproche récurrent, en forme d’accusation, fait par certaines
écoles commerciales à certaines écoles associatives fait partie d’une
de ces idées reçues qui polluent les débats au sein du
parachutisme. Une pollution des esprits si prégnante qu’on hésite
même, et on renonce, à employer l’expression « communauté
parachutiste ».
Ce reproche est le suivant : la concurrence des associations qui
proposent et pratiquent le tandem et la PAC serait faussée au
détriment des professionnels. Autrement dit, les associations
ôteraient le pain de la bouche des professionnels.
Aussi séduisante qu’elle puisse paraître au premier abord, ce qui lui
vaut d’être souvent adoptée et colportée par des professionnels,
cette affirmation procède d’une confusion des mots et des concepts.
En effet, le mot « association » désigne une forme juridique et
sociale d’exercice en groupe d’une activité, tandis que le mot
« professionnel » vise le statut d’une personne qui est rémunérée
pour ses prestations.
Quelle pertinence y a-t-il à comparer une forme juridique et sociale
d’un groupement avec un statut d’une personne? Aucune.
Pour comparer l’association avec une autre forme juridique et
sociale d’un groupement, il faut la comparer à la société
commerciale. Pour comparer le professionnel avec un autre statut
d’une personne, il faut le comparer au bénévole. Mais le croisement
de ces concepts ne peut déboucher que sur une analyse et une
conclusion erronées.
Un rappel s’impose : quelle est la différence entre une association et
une société commerciales ? Le but d’une association exclut le
partage des bénéfices, ce qui n’exclut nullement de faire des
bénéfices pour les réinvestir dans l’activité de l’association. Le but
d’une société commerciale est le partage des bénéfices entre les
associés.
L’activité parachutiste présente une caractéristique particulière : elle
fait appel à un outil de production très onéreux à acquérir et à
exploiter : un avion. Le ratio coût de production / valeur du produit
relève d’une activité peu ou pas rentable, facilement déficitaire. Les
bénéfices escomptés ne peuvent guère être mirobolants.
Les associations n’ont pas d’autre choix statutaire que de réinvestir
leurs bénéfices, mais la gestion des sociétés commerciales impose
en général de procéder de même. La répartition des bénéfices, qui
est une rémunération du capital, que les associés peuvent espérer
est essentiellement théorique.

Mars13:310
paramag.fr

C’est pourquoi on constate que les sociétés commerciales, même à
fort chiffre d’affaires, ont des associés principaux salariés de leur
société (on exclut les prête-noms familiaux destinés à réunir un
nombre d’associés conforme à la réglementation).
Les écoles commerciales de parachutisme présentent ainsi une
structure en ressources humaines très proche, sinon identique, à

Par
Yves-Marie
Guillaud

celle des écoles associatives : un gérant souvent directeur technique
salarié, des salariés et des travailleurs indépendants (DT adjoint,
secrétaire, moniteurs, plieurs…) pour les premières, un président
bénévole, un directeur technique salarié, des salariés et des
travailleurs indépendants (DT adjoint, secrétaire, moniteurs,
plieurs…) pour les secondes.
La seule différence réside dans le statut du gestionnaire mais encore
n’est-ce qu’apparent. Le président est bénévole mais pourtant la loi
autorise à lui servir une rémunération plafonnée. La gestion étant
une activité improductive en soi, les cas de rémunération du
président sont rares. Le gérant peut être salarié mais comme
l’activité de gestion est improductive en soi, il est aussi généralement
directeur technique. Est-il alors rémunéré en tant que gérant ou DT ?
Peu importe, ça revient financièrement au même.
Une école associative emploie donc des professionnels et fait
vivre des professionnels, tout autant que des écoles commerciales.
Ceux-ci y sont même exemptés des tâches de gestion qui sont
ingrates, improductives en soi, énergivores et voraces en
disponibilité.
Quel est donc ce reproche selon lequel les écoles associatives
ôteraient le pain de la bouche des professionnels ? Elles
leur fournissent une activité professionnelle tout autant que les
sociétés commerciales.
Une école associative a-t-elle une importante activité tandem
qu’un procès d’intention lui est aussitôt intenté. La belle affaire
que voilà, pourtant ! Avec qui fait-elle ces tandems dans la totalité
ou quasi-totalité des cas ? Avec des professionnels du tandem qui
sont rémunérés pour leurs prestations.
Sont-ils pour autant moins bien rémunérés ? Les quelques éléments
de comparaison connus démontrent que ce n’est pas le cas
et que le montant de la rémunération servie aux pilotes tandem est
assez indépendante de la forme juridique et sociale de l’entreprise,
dépendant essentiellement de la politique du chef d’entreprise et de
sa capacité à imposer ses vues.
L’an dernier, un jeune pilote disait à un président d’une école
associative au sujet de cette école: « Ce n’est pas une entreprise,
c’est une association ». La confusion des mots et des concepts
aboutit à ce genre de propos imbécile. Il lui a été répondu : « Qu’estce qu’une entreprise ? ». Un silence tint lieu de réponse.
Une entreprise, c’est d’abord un produit (sauts, actes pédagogiques,
actions d’animation, etc…). C’est ensuite un outil de production
(avion, parachutes, divers matériels, etc…) et des ressources
humaines (dirigeants, salariés, travailleurs indépendants,
prestataires, etc…). C’est aussi une gestion définissant les objectifs
et les moyens de les atteindre, en les adaptant sans cesse.
C’est enfin un
marché pour écouler la production (les
parachutistes). Qui y voit le critère de rémunération du capital ?
Une école associative procure du travail aux professionnels.
Elle les décharge du travail de gestion. Pourquoi les professionnels
dénigrent-ils donc les gestionnaires bénévoles, au risque de
n’attirer que les moins performants, alors que leur intérêt est d’attirer
les meilleurs ? ■

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