ParaMag - n°315 - Août 2013 - 14

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LE TAUX DE TVA SUR LES TANDEMS
Tempête dans le jardin des brevetés parachutistes professionnels
(«para-pros») exerçant une activité biplace (tandem) : leur taux de
TVA sur les tandems augmente le 1er août.
Le fond du décor est clair : le saut avec passager est techniquement
rigoureusement identique, parachute compris, quel que soit le
diplôme (para-pro, BEES, BPJEPS) ou l’environnement (société
commerciale, association, Ministère des transports ou de Jeunesse
et Sports). Rien ne les distingue.
Pourtant les taux de TVA applicables sont soit de 7%, soit de 19,6%,
soit de 0% (exonération), pour la même prestation. Or pour une
activité unique le taux devrait être unique : le taux normal de 19,6%.
Le taux réduit de 7% pour les transports de personnes bénéficie
aux seuls para-pros au motif que le saut avec passager est
considéré par l’administration fiscale comme du transport aérien.
Pourtant la même administration taxe la même prestation au taux
de 19,6%, ou ne taxe pas selon les cas, avec une même logique
aveugle quand elle la qualifie de sport.
C’est dire si l’interprétation fiscale peut parfois atteindre un degré
d’abstraction absurde.
Grâce à un habile lobbying, Pierre Lhopitalier (Abeille Parachutisme)
avait réussi à arracher en 2007 cette interprétation qui n’allait pas
de soi et qui n’en demeure pas moins un sophisme (PM n°238).
C'est aussi depuis 2007 que l’exonération (0%) pour les activités
sportives bénéficie aux associations non fiscalisées, et à elles
seules, le tandem y étant considéré comme une pratique sportive
comme une autre. Là aussi, c’est sans doute par un habile lobbying
que la FFP avait réussi à arracher cette interprétation qui n’allait
pas de soi et qui là aussi n’en demeure pas moins un sophisme.
Cette dichotomie est terminée en sa partie concernant ceux qui
sont imposés. Exit le taux réduit à 7%. Tous sont imposés
dorénavant au taux normal de 19,6% (20% à partir du 1er janvier 2014).

Bien que le risque de polémique élevé laisse subodorer de vives
ou violentes réactions, on ose dire que c’est logique, avec la
légitimité de celui qui en connaît l’impact pour avoir survécu à
l’augmentation de la TVA, de 0% à 19,6%, sur les prestations
judiciaires des avocats.
C’est logique car cette dichotomie bafouait le principe républicain
de l’égalité des tous les citoyens devant l’impôt (article 6 de la
déclaration des droits de l’homme de 1789) qui ne souffre
d’exception que pour des motifs d’intérêt général.
Au-delà des grands principes, la situation devenait intenable pour
deux raisons : l’impact indirect des modifications imposées par la
Commission européenne et les besoins de rentrées fiscales pour l’État.

Août13:315
paramag.fr

Le 29 septembre 2011, la Commission européenne a mis en
demeure la France d’imposer au taux normal certains services à la
personne jusqu’alors soumis au taux réduit. Après deux ans de
négociations, cinq catégories de services à la personne ont vu leur
taux augmenter au 1er juillet dernier. Sans négociation et avec
le risque d’un contentieux perdu d’avance devant la Cour de justice
de l’Union européenne, ce sont bien plus que cinq catégories
qui auraient basculé.

Par
Yves-Marie
Guillaud

Même si le tandem para-pro n’en fait pas partie, ces circonstances
ont pu indirectement peser dans la décision de mise en conformité
avec les principes républicains et les injonctions bruxelloises.
En outre, l’État français a besoin de rentrées fiscales. Pour cette
raison, le taux normal de TVA passera à 20%, et le taux réduit à
10%, le 1er janvier 2014.
Sachant que les para-pros revendiquent «plus de 48.000 tandems»
en 2012 (AG du SNPP, PM n°309), le manque de recettes fiscales
résultant d’un taux minoré de 12,6% (19,6% – 7%) s’élève à près
de 1.400.000 euros en 2012 pour un prix du tandem estimé à 230
euros HT (230 X 12,6% X 48.000).
La moyenne annuelle de sauts tandem par para-pro étant de 347
sauts (même source), ce cadeau fiscal consenti à 140 personnes
(48.000 / 347) représente environ 10.000 euros par an par parapro (230 X 12,6% X 347). Les artisans et petits patrons qui peinent
à boucler leurs fins de mois apprécieront le cadeau.
Certaines entreprises de para-pros s'estiment en grand danger, au
motif qu’elles ne seraient pas en mesure d’amortir cette hausse de
la TVA en raison du coût de leur activité. Ce point de vue,
respectable, peut cependant prêter à discussion.
La FFP a délivré 38.159 licences tandem en 2012 (AG de la FFP, PM
n°311) réalisés par des BEES ou BPJEPS imposés au taux de 19,6%.
Ceux-là ont pourtant bien réussi à amortir leur coût d’activité.
D’aucuns objecteront qu’une partie de ces tandems sportifs est
exonérée de TVA, la majorité selon certains mais il n’y a pas de
chiffres pour en juger. À cet égard, il faut rappeler que ceux qui ne
facturent pas la TVA ne récupèrent pas la TVA sur leurs frais. Leur
fiscalisation n’apporterait rien ou très peu à l’État («L’impact de la
TVA», PM n°311).
Pierre Lhopitalier, éminent para-pro et ancien président de ligue
FFP décrivait ainsi l’avantage de pouvoir récupérer la TVA et le
super-avantage que représente, pour les seuls para-pros, le
différentiel de taux : «Tu collectes 5,5% et tu récupères 19,6% sur
l’achat et l’entretien de l’avion, le levier fiscal est donc de 14,6%.
Les premières années tu es en crédit de TVA…» (PM n°238).
Les BEES ou BPJEPS, ou les établissements sportifs fiscalisés,
collectent 19,6% et récupèrent 19,6%. Ceux qui ne sont pas
fiscalisés ne collectent ni ne récupèrent de TVA. Ni les uns ni les
autres ne bénéficient d’un «levier fiscal» et ne peuvent être «en
crédit de TVA».
Il serait cependant quand même pertinent de supprimer
l’exonération au nom de l’égalité devant l’impôt même si l’État n’a
guère à en attendre en l’absence d’un «levier fiscal» à supprimer.
Considérer le tandem comme une pratique sportive de nature
sociale n’est guère plus pertinent que de le considérer comme du
transport de personnes. Au moins cela éradiquerait-il les jalousies
que le nouveau taux applicable aux para-pros va exacerber.
Pour l’heure, la vérité est que les para-pros bénéficiaient, grâce à la
fiscalité de la TVA, d’un substantiel avantage concurrentiel par
rapport à leurs confrères sportifs pratiquant une activité strictement
identique. Ils l’ont perdu.
À titre individuel leurs bénéfices vont diminuer et à titre collectif ils
perdent un de leurs principaux moteurs de siphonage des tandems
sportifs à leur profit. On comprend leur dépit. ■

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ParaMag - n°315 - Août 2013

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