Cultures marines n°311 - 9

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de l'huître bio ?
mateurs, affirme Benoît Le Joubioux. Nous n'avons pas demandé
le label bio. Mais s'il y en a un, il faut
qu'il aille dans notre sens. »
Pour autant, « aucun changement substantiel n'est prévu par
rapport à la législation actuelle
en ce qui concerne cet aspect
du règlement bio, affirme-t-on à
la Commission. La production en
écloserie est cohérente avec le
principe de la restriction de l'utilisation d'intrants extérieurs dans
la production bio. »
Rien n'est encore coulé dans le
marbre et les OT assurent qu'ils
feront tout pour faire entendre
leur argumentaire. Mais les
dés semblent jetés, un accord
politique a été entériné le 28 juin
dernier entre les États membres,
l e Pa r l e m e n t e u ro p é e n e t l a
Commission européenne. Cette
proposition - sans modification sur
l'origine du naissain par rapport à
l'existant - est en cours de relecture
pour en assurer sa cohérence et le
texte final doit être soumis à l'approbation du conseil et parlement
européen dans les prochaines
semaines.

L'association qui défend l'huître
née en mer n'avait pas prêté grande
caution, au départ, à l'huître bio.
Il faut dire qu'à son lancement,
en 2009, et pendant les quelques
années qui ont suivi, celle-ci n'a pas
intéressé grand monde, une poignée de producteurs tout au plus.

Un engouement
Mais le vent tourne et, depuis
deux trois ans, l'institut national de
l'origine et de la qualité (Inao) note
un « engouement » pour la conchyliculture biologique, huîtres et moules
confondues.
Alors que l'Agence bio recensait
une vingtaine de producteurs
certifiés en 2014, ils étaient plus de
cinquante moins de trois ans plus
tard. Les ostréiculteurs sont de plus
en plus nombreux à s'intéresser à
ce label, qui pourrait donc faire de
l'ombre à ceux qui réclament l'étiquetage des triploïdes sans y parvenir
pour le moment. « Le bio c'est un
label hyperpuissant, c'est un label
réflexe, rassurant pour beaucoup de
consommateurs qui ne connaissent
pas le produit, constate Benoît Le

Joubioux. N'importe quelle huître
traditionnelle, n'importe quelle appellation se fera doubler par le bio. »
Les ostréiculteurs traditionnels
ont donc décidé de faire valoir leurs
arguments pour faire sortir le naissain d'écloserie de la labellisation.
Ils considèrent par exemple que
« l'approvisionnement en juvéniles
à partir d'écloseries est une technique beaucoup plus complexe,
avec beaucoup de manipulations
et donc pas du tout naturelle ». Ils
estiment aussi que la production de
naissain d'écloserie est « totalement
incohérente et incompatible avec
les valeurs et les principes de la
réglementation européenne pour
la production biologique », en
l'occurrence, une production aussi
proche que possible de la nature.
Ils affirment enfin que c'est une
pratique « défavorable à la biodiversité », « en total décalage avec
les attentes des consommateurs »,
« ne respectant pas les cycles biologiques naturels », et « qui ne se
justifie aucunement par un besoin
quantitatif en semences par rapport aux besoins actuels et futurs
de la filière ostréicole biologique ».

Leur diatribe est arrivée un peu
tard dans la réflexion générale sur
l'agriculture biologique et l'ostréiculture ne pèse pas bien lourd dans
l'aquaculture européenne.

Face au géant saumon
Le projet Oraqua avait pour objectif
de réfléchir aux bases de la prochaine
réglementation communautaire
concernant l'aquaculture biologique.
« Tous les types d'aquaculture sont
concernés mais le nœud du problème ce sont les élevages de poisson », concède Jean-Paul Blancheton,
chercheur à l'Ifremer et un des acteurs
du projet. La salmoniculture affiche
1 million de tonnes, les poissons méditerranéens 700 000 à 800 000 tonnes.
« La conchyliculture est importante
en France mais elle l'est beaucoup
moins à l'échelle européenne »,
reprend le chercheur. Les discussions
ne se sont pas appesanties très longtemps autour des sources d'approvisionnement en naissain d'huîtres.
Et les règles établies en 2009 ne
devraient pas bouger d'un iota.
Marion LARRONDE-LARRETCHE

teur sur l'étang de Thau, en attend
aussi une plus-value de 15-20 %, « ça
correspond à l'amortissement des
frais pour monter le dossier ». Des
frais évalués autour de 5 000 à 6 000
euros avec notamment le contrôle
initial. Il faudra ensuite ajouter environ
600 euros d'audit par an. Mais au-delà
du coût de la conversion, c'est surtout
la lourdeur du dossier que retiennent
ceux qui s'y sont confrontés. « Les
démarches administratives sont
compliquées », atteste ainsi Danièle
Verine. « C'est le bordel », complète
Jean-Roger Courpron, qui est en
cours de conversion mais n'a pas
encore obtenu le feu vert. « Il y a toujours quelque chose qui ne va pas. »
Autre son de cloche chez les Bretons Jean-Noël et Tifenn Yvon, qui ont
obtenu le label cet été : « La démarche
nous a été suggérée par le réseau
Biocoop dont on est un fournisseur.
La certification était une simple formalité, étant donnée l'exigence des
pratiques culturales que nous nous
imposons au travers notamment du

Sept entreprises méditerranéennes produisent aujourd'hui
des huîtres estampillées agriculture biologique
mais une trentaine d'autres seraient intéressées.

cahier des charges de l'association
Ostréiculteur traditionnel. »
La production aquacole biologique implique par exemple de
favoriser les énergies renouvelables,
d'élaborer un plan de gestion durable
visant à réduire l'impact de l'activité
sur l'environnement (rejets, déchets),
de faire contrôler son exploitation
par un organisme certificateur agréé
par les services de l'État, de séparer

La production conchylicole bio ne
concerne encore que quelques
dizaines de professionnels et, à
la louche, quelques centaines
de tonnes. Mais tout le monde
s'accorde à dire que la demande
est forte. Depuis 2010, la consommation de produits aquacoles
labellisés bio a grimpé de 40 % en
Europe. Le potentiel de croissance
de l'huître bio paraît donc important. Avec un effet boule de neige.
« On a des collègues qui se sont
convertis, on perdait des ventes »,
raconte la mytilicultrice de Pénestin
Danièle Verine qui a donc décidé
de franchir le cap pour « suivre le
chemin ». Le Charentais Jean-Roger
Courpron a lui aussi pris le train
en marche pour répondre « à une
demande des consommateurs ».
À l'image de Ludovic Lestrat, de
L'océan de l'huître, à Marennes, la
plupart des producteurs cherchent
dans la labellisation bio, un « atout
commercial en plus ».
Mathieu Rouzières, conchylicul-

f Une conversion pas si facile

strictement les produits bio et non
bio (dans le temps ou l'espace). Mais
le principal frein pour les conchyliculteurs est très souvent lié à la qualité de
l'eau. C'est le cas de Ludovic Lestrat,
dont « la prise d'eau du marais n'est
pas dans la bonne zone », et qui ne
pourra donc pas finaliser sa demande
de conversion. N'est pas bio qui veut.
M. L.-L.
Cultures MARINES n°311 - novembre 2017

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