Cultures marines n°314 - 39

écloseries

Dossier

Tétraploïdes : les petites écloseries hésitent

Sodalab, un nouveau laboratoire
de recherche
Ce temps de latence leur permet de
réfléchir à l'orientation que prendra
l'activité si la réglementation sur
la tétraploïde leur est défavorable.
« Parmi les pistes envisagées, il
est probable que mon entreprise
ira plus loin dans le pré-grossissement tout en restant sur des
petits volumes et en continuant la
diploïde », ajoute Thierry Grondin.
La force de sa petite structure réside
dans sa capacité d'adaptation
et à mettre en place les installations nécessaires en fonction des

Sandrine Pelletier

L'évolution de la réglementation
attendue en matière de tétraploïdes soulève de nombreuses
questions et inquiète aussi parfois.
Face à une évolution quasi inéluctable des pratiques et surtout très
incertaine dans ses contours, les
petites écloseries s'adaptent, chacune à sa façon. Thierry Grondin,
gérant de Vendée écloserie, a un
avis partagé sur la question : « En ce
qui me concerne, j'aimerais que
ça continue comme aujourd'hui
avec l'Ifremer qui assure une
certaine neutralité. Pour nous, les
petites, c'est plus facile car on est
limité financièrement pour faire
de la recherche. Au moins, là, tout
le monde est au même niveau. »

Thierry Grondin reste serein tant qu'aucune décision n'est prise en matière d'évolution réglementaire.

contraintes qui seront imposées.
En attendant, « tout le monde est
dans l'attentisme, et l'attentisme
me convient », sourit celui qui
aimerait que l'Ifremer continue son
élevage de tétraploïdes.
À l'inverse, il y a les petites écloseries qui ont décidé d'anticiper
la réglementation et l'arrêt de
production des tétraploïdes par
l'Ifremer, pour ne pas se laisser surprendre le jour où cela arrivera. « La
triploïde est très demandée par
la profession et, si on arrête d'en

produire, notre avenir est en jeu,
affirme Mireille Labadit de l'écloserie Labadit Thierry et Mireille. On
ne peut pas survivre avec la seule
diploïde. On doit répondre à la
demande du consommateur final
qui ne veut pas d'huîtres laiteuses
l'été. C'est ça qui tire la production
vers la triploïde. »
Alors pour continuer à produire
de la triploïde en se passant des
tétraploïdes de l'Ifremer, il faut
se lancer dans la recherche. C'est
dans cet objectif que l'entreprise

a décidé d'allier ses forces à celles
de la Sodabo en créant Sodalab,
un laboratoire de recherche qui a
vocation à explorer les pistes pour
éventuellement produire, à terme,
leurs propres tétraploïdes. « On ne
sait pas où la réglementation va
nous mener, mais notre laboratoire répondra aux normes car on
saura traiter et décontaminer nos
eaux rejetées », explique Mireille
Labadit.
Sandrine PELLETIER

Nurseries : un marché discret qui se porte bien

f Grainocéan :

Aujourd'hui, de nombreuses nurseries sont adossées à une écloserie
quand d'autres travaillent uniquement le métier de nurseur en s'y
spécialisant. Un secteur qui se porte
plutôt bien si l'on en croit les projets
de nouvelles nurseries qui verront le
jour sur le polder de Bouin dans les
prochains mois.
« Le marché est plutôt porteur
grâce aux produits d'écloserie de
qualité et reconnus, mais également grâce à l'engouement pour la
triploïde », analyse Stéphane Angeri,
gérant d'Aquanurs, nurserie rattachée
à France naissain. Une activité importante, mais des prix « un peu bas ces
deux - trois dernières années », qui
tendent à remonter légèrement.
Une analyse un peu nuancée
par Vivian Renaud, gérant d'Atlan-

L'écloserie Grainocéan se dit
autonome génétiquement
depuis le début de l'année
pour sa production d'huîtres
triploïdes. « Nous avons respecté les contraintes de l'État
et de l'Ifremer, nous avons pris
le temps, et nos tétraploïdes
sont d'excellente qualité. Nous
reviendrons aux beaux jours
de la triploïde qui garantissait
les meilleurs taux de survie au
virus », explique le responsable,
Éric Marissal. Pour améliorer encore un peu plus leur résistance,
l'entreprise a mis au point une
méthode brevetée d'endurcissement des naissains : les larves
sont roulées grâce à la rotation
de lanternes, au moyen d'une
hydrolienne.

tic naissain qui regrette certaines
pratiques : « Les grosses écloseries
ont fait des promotions qui ont
entraîné des baisses de prix et
donc une perte de clients. » Selon
Stéphane Angeri, les prix varient
entre 8,50 et 9,50 euros le mille pour
le T6 qui reste le produit phare.

Concentration de nurseries
sur le polder de Bouin
Les petits nurseurs font de la
prestation de service en hébergeant
du petit naissain jusqu'au T6-T7 et
d'autres, à l'instar d'Atlantic naissain,
se spécialisent en achat - revente.
« Je suis un des seuls sur le polder
à faire de l'achat et de la revente en
tant que petit nurseur, j'ai un bon
rendement et les ostréiculteurs sont

satisfaits de mes produits », se réjouit
Vivian Renaud. Une activité qui se
porte si bien que le gérant fait partie
des professionnels qui envisagent la
construction d'une nouvelle nurserie.
Une nouvelle société qu'il va créer
en association avec deux autres
collègues du polder. Mais c'est une
construction qu'ils souhaitent maîtriser afin que les forages n'accentuent
pas le tirage sur la qualité de la nappe.
« Chacun travaille en circuit
fermé et les hydrogéologues étudient les risques des forages sur la
qualité de la nappe. J'espère qu'à
l'avenir, la concentration de nurseries sur le polder, dont je fais partie
d'ailleurs, n'apportera pas de problèmes de pathogènes », explique
Vivian Renaud.
S. P.

autonome sur les triploïdes

Cultures MARINES n°314 - mars 2018

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