Cultures marines n°314 - 40

écloseries

Dossier

La diploïde : un marché opportuniste
Angeri, directeur de France naissain.
C'est cette qualité affichée du
produit qui pousse certains professionnels à se tourner vers la diploïde
d'écloserie, afin de s'assurer un meilleur rendement.

Une meilleure résistance
Et parfois le saut est plus grand,
« il y a un gros engouement pour
la triploïde et on constate que
certains ostréiculteurs passent
directement du captage naturel
à l'huître triploïde », indique Sté-

phane Angeri dont la production
de diploïdes représente 20 % de
l'activité.
La meilleure résistance aux mortalités constatées sur les diploïdes
ces dernières années aurait pu
pousser les ostréiculteurs à commander ce produit en plus grande
quantité, mais il n'en est rien. « Le
marché de la diploïde est opportuniste. Les professionnels qui
nous achètent cette huître sont
ceux qui font du captage naturel.
Ils se tournent vers nous quand le
captage n'est pas bon, ils viennent

alors chercher de la diploïde pour
renforcer leurs stocks. La triploïde
n'est pas faite pour cette clientèle », constate Jean-Yves Legoff,
directeur de la Sodabo dont la
demande en diploïde correspond
à moins de 10 % de sa production.
Argument supplémentaire, « le
tonnage sera plus important avec
du naissain d'écloserie que sur du
captage naturel », ajoute Stéphane
Angeri qui met en avant la qualité
d'un produit né en écloserie.
Sandrine PELLETIER

L'huître triploïde est reine dans les
écloseries et représente souvent
80 à 90 % de la production. Mais
quelques irréductibles ostréiculteurs sollicitent encore la diploïde
qui n'est plus qu'une toute petite
partie du marché des écloseries.
« Avec les diploïdes, nous sommes
confrontés au captage naturel
qui est très abondant depuis
quelques années. Nous sommes
certes mis en concurrence par
rapport aux prix, mais pas sur
la qualité qui est bien meilleure
en écloserie », affirme Stéphane

Les écloseries produisent 80 à 90 % de triploïdes. À l'image de France naissain, ici en photo, qui annonce 80 % de diploïdes.

Diploïdes et triploïdes en concurrence

Chaque année, et ce depuis dix ans,
le Smidap suit le captage naturel
et d'écloserie des huîtres (diploïdes
pour l'écloserie) dans le cadre du
suivi sentinelle. L'avantage d'avoir
ce recul est de pouvoir comparer
les différents captages et le premier
constat effectué par le Smidap
révèle que l'huître d'écloserie est
plus résistante que l'huître naturelle. « On a un différentiel de 25 à
30 % de mortalité en moins sur les
diploïdes d'écloserie. De plus, depuis deux ou trois ans, on observe
qu'elles résistent mieux que les
triploïdes, de l'ordre d'environ 10
à 20 % », précise Philippe Glize en
charge des cultures marines au Smidap. Une évolution favorable qui est
le reflet des politiques de sélection
génétique mises en place par les

Cultures MARINES n°314 - mars 2018

écloseries. La possibilité de gérer
les géniteurs, aussi bien mâles que
femelles, laisse une grande liberté
quant à la production du produit.
Le fait que les écloseries soient
tributaires des géniteurs de l'Ifremer
pour leur production de triploïdes
peut restreindre la qualité des
huîtres produites. « Tant qu'il n'y
aura pas une maîtrise des tétraploïdes, les écloseries seront toujours dépendantes de la qualité
des géniteurs fournis par l'Ifremer
et cette qualité peut être aléatoire
et entraîner plus ou moins de
mortalités », appuie Philippe Glize.
Les écloseries continuent à avancer sur les politiques de sélection
en diploïde et ça paie puisque la
demande sur ce produit est plus
forte que par le passé. Son succès

tient à sa résistance qui a considérablement évolué. La maîtrise
des géniteurs permet de meilleurs
résultats, comme le souligne Philippe Glize : « Dès que les écloseries
travailleront avec leurs propres tétraploïdes, elles pourront espérer
avoir à terme les mêmes résultats
qu'avec la diploïde. »

Obtenir la maîtrise
de la génétique
Car, les diploïdes résistent mieux
que les triploïdes, et ce, indépendamment des écloseries. « Quand
les écloseurs peuvent tout maîtriser, aussi bien les mâles que les
femelles, ça porte ses fruits », poursuit le spécialiste. Les diploïdes font

preuve de mortalités plus faibles
en début de vie, mais dès qu'elles
passent en phase de reproduction,
elles sont plus fragiles et leur taux
de mortalité devient alors supérieur
à celui des triploïdes. « Au final sur
2017, la diploïde a une croissance
plus faible que la triploïde. Sur
une année médiocre, cela peut
représenter une croissance 20 %
plus faible que pour une année
normale », ajoute Philippe Glize.
Autrement dit, même si la diploïde
s'avère plus résistante à un moment
de son cycle de vie, la triploïde
serait plus intéressante en termes
de rendement en fin d'élevage et
ce, malgré sa mortalité en début
d'élevage.
S. P.

Cultures marines n°314

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