Cultures marines n°329 - 41

PROFIL 41

Isabelle Creneguy

Faire de l'huître bretonne une référence
Trois ans après le lancement de son entreprise d'expédition, la période est charnière
pour que l'entrepreneuse puisse se consacrer pleinement à son projet d'une marque bretonne.

TERROIRS

Désormais installé sur un chantier de
Carnac, à la pointe de Pô, le binôme
passe par une société de courtage
bretonne pour l'achat des huîtres,
sans exclure les relations directes
avec les producteurs. « La Bretagne a
une super image en France et à l'international mais ses produits ne sont pas
identiﬁés, raconte-elle, quand on dit
huître, on pense Marennes - Oléron. »
Un constat qui l'agace.
« En Bretagne, on a d'excellents terroirs, des crus comme dans le vin, on a des
plates, des creuses, des baies, des golfes,
des rias. » Un constat qui l'agace tellement qu'elle planche sur un label

tion importante. « Clairement, au
quotidien notre outil de production,
nos deux chaînes d'emballage, est surdimensionné. Mais à Noël, on est bons,
on est en capacité d'assurer la cadence
et la qualité sanitaire. »
LOGISTIQUE

Julie Lallouët-Geffroy

a création de son entreprise,
Celtostrea, est née d'une déchirure. Cinquième génération
d'une famille d'ostréiculteurs,
elle comptait reprendre avec ses
frères la suite du père. « C'était un
moment compliqué, j'ai décidé de partir », raconte-elle. Car les transmissions ne sont pas toujours un ﬂeuve
tranquille, « c'était une décision douloureuse ». En 2015, Isabelle Creneguy
quitte la structure familiale et c'est
en faisant sa tournée d'adieu auprès
des clients qu'une opportunité se
présente. « C'est un ancien client, un
Italien qui dirige une entreprise française
de distribution de produits de la mer,
qui m'a proposé que l'on s'associe et j'ai
accepté. »

Isabelle Creneguy
veut que les terroirs
bretons soient
mieux connus.

J. L-G.

À Noël, 30 tonnes d'huîtres
sont traitées chaque jour.

À cette période, 30 tonnes
d'huîtres transitent chaque jour. En
2018, 600 tonnes d'huîtres sont passées dans les mains de l'équipe de
Celtostrea, dont dix d'huîtres plates.
Une équipe composée de cinq personnes en CDI temps plein, quatre
en temps partiel et jusqu'à quarante
personnes à Noël. Et ce n'est pas
toujours simple de recruter, « nous
faisons un métier à la croisée entre
l'ostréiculture et la logistique », ce
qui comprend une bonne dose de
Carnac
stress. Le gros du travail s'effectue
entre 4 h du matin et 15 h, et bien
sûr, tout doit être livré en temps et
en heure. « Je ne peux pas m'empêcher
de me dire : il est telle heure, on fait telle
de type Production bretonne, une quantité, on est bons ou pas », lance-tmarque dans l'esprit Huître bre- elle dans un sourire.
tonne. « Moi, ce que je veux, c'est faire
Une fois les huîtres conditionnées,
la promotion des huîtres bretonnes ! » 90 % de la production part à l'export.
Ça a le mérite d'être clair.
Les trois quarts des volumes sont exÀ la pointe de Pô, les huîtres sont pédiés à son associé, qui est aussi son
stockées, lavées, conditionnées et premier client, en Italie. Elles se diexpédiées. « La difﬁculté était de trou- rigent aussi vers l'Espagne, un marché
ver un site approprié
qu'elle a ouvert. Car
LA BRETAGNE Isabelle Creneguy a
car on peut avoir six
poids lourds en même A UNE SUPER
des atouts en poche,
temps ici. » Il faut de IMAGE MAIS
comme celui de parla place pour pouvoir SES PRODUITS
ler plusieurs langues,
manœuvrer, éviter les NE SONT PAS
dont l'espagnol grâce
terrains en pente, pas IDENTIFIÉS. »
à cinq années passées
toujours simple. C'est
au Mexique. Autres
le bouche-à-oreille et le soutien du co- destinations d'expédition : les pays
mité régional de la conchyliculture qui de l'Est et l'Asie. La majeure partie des
lui a permis de trouver son lieu d'im- huîtres viennent de la Bretagne sud,
plantation. Un investissement d'un mais aussi un peu des Côtes-d'Armor,
bon million d'euros était nécessaire de Paimpol.
pour mettre le site aux normes saniAprès trois années d'existence,
taires et acquérir le matériel adéquat. l'entreprise se porte bien « mais nous
Conçu comme une plateforme lo- devons consolider cela, passer l'effet de
gistique, le chantier doit permettre seuil pour pouvoir être sereins », exles manœuvres des véhicules mais plique, prudente, la patronne.
aussi avoir une capacité d'expédiJulie Lallouët-Geffroy

Cultures marines n°329 Septembre 2019

Cultures marines n°329

Table des matières de la publication Cultures marines n°329