Cultures marines n°333 - 35

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facteurs qui inﬂuencent les mortalités
des bivalves et d'identiﬁer des solutions
pour éviter ou réduire l'impact des maladies », s'enthousiasme Isabelle Arzul,
chercheuse au laboratoire de génétique et pathologie des mollusques
marins à la station de l'Ifremer à La
Tremblade, qui a assuré la coordination du projet Vivaldi.
MÉMOIRE D'HUÎTRE

Vivaldi a démontré que le virus
OsHV-1 pouvait se décliner en une
constellation de virus plus ou moins
nocifs au sein d'une même huître,
tous affaiblissant ses défenses immunitaires. C'est cet affaiblissement
qui s'avère souvent fatal sur les
parcs, l'huître devenant ainsi la proie
de bactéries opportunistes.
Mais les bonnes nouvelles
existent : les scientiﬁques ont démontré la capacité de l'huître à reconnaître les organismes pathogènes
auxquels elle a déjà été confrontée
aﬁn de déclencher ses mécanismes

de défense. Les chercheurs ont donc
souhaité stimuler cette réponse en
exposant les coquillages à des molécules ressemblant au virus, une piste
de recherche qui pourrait ouvrir la
voie à des formes d'immuno-stimulation. Cerise sur le gâteau, des
recherches laissent même entendre
que ce réﬂexe immuno-défensif serait transmissible aux descendants.
Autre découverte capitale, les
huîtres creuses d'une même population peuvent réagir différemment
face aux organismes pathogènes.
Vivaldi a permis d'identiﬁer des
gènes clefs qui pourraient permettre
de sélectionner des animaux plus résistants grâce à deux méthodes. L'une
expose des huîtres à une infection
dans le milieu naturel, puis séquence
les génotypes et modiﬁe la séquence
ADN. L'autre analyse des huîtres
avant et après un épisode de mortalité. Mais la sélection ne doit pas
appauvrir la diversité génétique ni les
qualités organoleptiques des huîtres.

En se basant sur l'hydrodynamisme des sites étudiés et les modes
de transmission des organismes
pathogènes, les chercheurs ont pu
développer des outils de modélisation numérique pour tester l'efﬁcacité des mesures de gestion. « Nous
construisons un manuel à destination
des producteurs qui sera disponible d'ici
quelques mois », prévient
L'HUÎTRE
Isabelle Arzul.
RECONNAIT ET
On y retrouvera un
S'ADAPTE AUX
volet consacré à la coPATHOGÈNES.
culture [lire ci-dessous] et
d'autres leviers universels
comme améliorer la surveillance ou
éviter de déplacer les coquillages en
cas de mortalité. D'autres mesures,
en revanche, doivent être adaptées
à chaque site. « Les dates et la température de l'eau à laquelle il est préférable
d'immerger les naissains varient. Les mesures faites en rade de Brest ne peuvent
pas être généralisées à toute l'Europe »,
souligne Fabien Pernet.
Bruno Saussier

›

[ La prometteuse piste de la co-culture

B. S.

n observant le captage actuel de
l'huître creuse en rade de Brest - impossible il y a vingt ans -, le chercheur
Fabrice Pernet estime que l'avenir du
mollusque est « loin d'être menacé ». Pour
autant, il concède une certaine inquiétude. « Avec le changement climatique, l'acidité grandissante des océans et la hausse des
mortalités, on n'a jamais vu autant de maladies en milieu marin que ces trente dernières
années. »

Le scientifique a donc uni ses forces à
celles de ses collègues européens pour
chercher des solutions. Parmi elles, une
piste se dessine. « La cohabitation avec des
espèces compétitrices comme les moules ou
les ascidies est bénéfique pour l'huître creuse.
Associée à d'autres animaux filtreurs, elle résiste mieux aux maladies. »
Une caractéristique due à la compétition alimentaire. Moins nourries,
les huîtres voient leur métabolisme ra-

Élyne Dugény et
Fabrice Pernet en
pleine manipulation
au laboratoire de
physiologie des
invertébrés.

lenti et diminuent donc leur capacité à
diffuser les virus. Les huîtres élevées avec
d'autres animaux marins ont ainsi vu leur
taux de survie grimper à 97 %. 23 points
de mieux que la population témoin.
Des associations avec les algues vertes,
brunes et rouges ont été testées. Bilan :
« Un léger gain de survie sur les algues
rouges, avec 20 % de mortalité. Un effet
neutre sur les algues brunes, 35 % de mortalité, équivalent au contrôle. Et 70 % de mortalité avec les algues vertes », résume Élyne
Dugény, doctorante en écologie marine
dont la thèse porte sur le sujet. « On ne
s'attendait pas du tout à ce que ce soit nocif
pour les huîtres, renchérit Fabrice Pernet.
C'est une découverte pour nous. »
Alors, quelles solutions se dessinent
pour que les facteurs les plus favorables
soient réunis pour l'ostréiculture ? « On
est plutôt en faveur d'une ostréiculture qui ne
soit pas mono-spécifique mais diversifiée, sur
une approche écosystémique de la conchyliculture, explique le chercheur. En augmentant la diversité, vous augmentez les puits
d'agents pathogènes, comme en agriculture ». Et de résumer, confiant, « l'huître a
de très fortes capacités d'adaptation. Et les
ostréiculteurs aussi. »

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