Cultures marines n°335 - 30

30 DOSSIER

Captage
Arcachon

Des mortalités inexpliquées
Il n'y aura pas beaucoup de naissain à vendre du côté du bassin d'Arcachon. Le captage
n'a pas été exceptionnel et de fortes mortalités ont été observées sur certains secteurs.

MORTALITÉS
D'autres professionnels ont été confrontés à cette mortalité qui semble avoir
frappé parfois très fort. « Je suis dégoûté,
soupire Térence Campagne. J'avais entre
200 et 300 naissains par tuile jusqu'en dé-

« On peut avoir
du naissain
sur une tuile
et rien sur celle
d'à-côté », montre
Mickaël Thiry.

Loïc Fabrègues

a saison du naissain à Arcachon n'est
pas à la hauteur des promesses du
début de l'été quand plus d'un million de petites larves d'huîtres étaient
présentes dans presque tous les secteurs du
bassin. Il y a eu une faible survie larvaire de
cette cohorte et aucune autre grosse ponte
par la suite, les ostréiculteurs arcachonnais
les mieux lotis parlent aujourd'hui de 150
bêtes maximum par tuile. « Ce n'est pas
brillant et ce n'est pas régulier. On peut avoir
du naissain sur une tuile et rien sur celle d'à-côté », indique Mickaël Thiry. En fonction
du lieu de pose, l'ostréiculteur d'Andernos-les-Bains n'a pas eu deux récoltes identiques. « On a eu beaucoup de mortalités aux
Hosses par rapport au Cap-Ferret, explique-til. Les crevettes ont fait leur œuvre. Comme il n'a
pas fait froid, elles sont remontées très tôt et se
sont gavées. »

cembre. Là, que ce soit à Gahignon ou à La
Matelle, j'en ai au mieux une dizaine. » Pour
l'ostréiculteur de Gujan-Mestras, les crevettes ne sont pas les seules à incriminer.
« Quand le naissain est mangé, on n'a plus
les couvercles. Je m'interroge sur les causes de
cette mortalité. » Il n'est pas le seul. Olivier
Laban, l'ancien président du CRC, est allé

« Depuis novembre, mes gars m'annonçaient des
mortalités sur les tuiles posées à Arams. À l'époque,
on avait 200 à 300 naissains par collecteur et ils
étaient plutôt bien développés. Quand on a commencé à gratter, le 6 janvier, tout était crevé. J'ai
récolté zéro. Mettre 10, 20 voire 50 naissains au
mieux par poche avec 3 à 4 kg de chaux, cela ne
sert à rien. Cela ne lèvera pas. J'ai donc tout jeté à
la benne. C'est la première fois en 35 ans de métier
que cela m'arrive.
Il y a eu beaucoup de crevettes mais cela n'explique pas tout. L'arrivée de l'eau douce dans le
bassin avec la vidange du lac de Cazaux ne correspond pas, elle, au début des mortalités. J'ai
constaté de grandes lignes blanches sur les tuiles
comme si un produit chimique était venu et avait
tout lissé. Il n'y avait plus une algue. Je suis allé aux
Affaires maritimes pour déclarer les mortalités. »
Cultures marines n°335 Avril 2020

L. F.

Olivier Laban, ostréiculteur à Gujan-Mestras

J'AI TOUT JETÉ À LA BENNE. »

remplir une déclaration de mortalité [lire
ci-dessous]. S'il devrait tout de même y
avoir quelques lots de naissains à vendre
sur le bassin, difﬁcile de parler cette année
d'un marché arcachonnais. D'autant que
les professionnels semblent trouver moins
d'intérêt à poser des collecteurs. « Quand tu
ﬁnis à 2 euros le mille, cela te paye juste la chaux
sur les tuiles. Comme les deux dernières années
ont été minables en termes de tarifs, tu fais
vite le calcul », raconte Clément de Neuvic.
L'ostréiculteur, basé à Andernos-les-Bains, a
divisé quasiment par deux son volume de
tuiles pour le captage.
Mickaël Thiry en a fait de même. « Le naissain est devenu un marché très concurrentiel. On
n'a pas su s'y adapter. On ne sait plus vendre,
regrette-t-il. Il serait peut-être intéressant de
relancer une coopérative comme Arca-huîtres
[dont l'activité a cessé en 2006]. Aujourd'hui,
on doit être une cinquantaine d'ostréiculteurs à
être encore intéressés par le naissain. »
À la tête depuis un an de l'entreprise charentaise Aubry, Benoît Massé indiquait, pour
sa part, à la mi-mars que le prix du naissain
naturel était « en train de se ﬁxer ». Mais l'un
des principaux courtiers en huîtres ne semblait pas très motivé pour venir sur le bassin : « Se déplacer pour 100 à 150 kg ne serait
pas très rentable. »
Loïc Fabrègues

Cultures marines n°335

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