Cultures marines n342 - 38

38 DÉCRYPTAGE

Saison des moules :
Avec de faibles volumes et des prix à la baisse, l'année ne restera
pas dans les annales normandes. Cette déconvenue a profité aux
mytiliculteurs des autres régions qui revendiquaient par ailleurs
une très belle qualité de produit.

NORMANDIE

Un manque de cohésion

es mytiliculteurs normands
ont manqué de cohésion dans
leur stratégie commerciale.
Pourtant le produit était beau et
afﬁchait un taux de chair de 27 à
32 %. Mais le premier conﬁnement a semé un vent de panique.
« La ﬁlière a pris peur en mai au début
de la saison des moules de deux ans,
analyse Vincent Godefroy, président
du syndicat Syconord. Une peur
exacerbée par les acheteurs en GMS. »
Pourtant la demande en moules de
bouchot normandes était forte.
Avec des volumes en baisse de
30 à 40 %, « de 1,90 euro le kilo, le
prix est descendu à 1,65 euro pour
remonter en septembre à 1,80 euro »,
s'attriste Loïc Maine, président
mytilicole normand. « C'est donc

la double peine, moins de tonnage et
des prix trop bas, conﬁrme Vincent
Godefroy. Compte tenu des faibles
volumes, on aurait dû être à 2 euros
le kilo. »
L'an prochain, le tonnage ne
s'annonce pas meilleur. Le captage
très médiocre n'a pas pu combler
les trous laissés par les prédateurs.
« Il n'y aura que très peu de moules de
deux ans à vendre au printemps, poursuit Loïc Maine. Les doubles actifs ont
eu besoin de trésorerie pour compenser
les pertes ﬁnancières de l'ostréiculture
et ils n'ont pas gardé de stock. » La
prédation exacerbée des araignées
et le retour massif des macreuses
affamées cet hiver devraient encore affaiblir les entreprises.
Ingrid Godard

Ventes records

BRETAGNE NORD

Des résultats hétérogènes

ous avons constaté une forte
hétérogénéité entre les bassins comme entre les entreprises », avertit d'emblée Sylvain
Cornée, vice-président du CRC
de Bretagne nord. À commencer
par une grosse diminution des
volumes en rade de Brest en lien
avec les modiﬁcations du schéma
des structures des exploitations
de cultures marines. Le volume
est constant en revanche sur la
production en ﬁlière de la baie de
Lannion. Quant à la baie de SaintBrieuc, elle a vécu une réduction
de 30 à 40 % des volumes par
rapport à 2019, qui était toutefois
une très bonne saison.
Toujours dans les Côtesd'Armor, en baie de la Fresnaye
et de l'Arguenon, les producteurs

BRETAGNE SUD

ont fait face à plus de 50 % de
baisse de rendement en raison
d'une forte prédation : les dorades, qui impactent désormais
tous les producteurs, les goélands,
araignées et macreuses. « En baie
du mont Saint-Michel, les résultats
des réensemencements face aux prédations entraînent de fortes disparités
selon les entreprises », commente
Sylvain Cornée. Les producteurs
de la baie ont vécu une légère
baisse de cours, de l'ordre de dix
centimes. « Nous avions une bonne
qualité mais il est possible que l'on ait
subi les effets d'une saison antérieure
moins qualitative », commente le
mytiliculteur. Les autres producteurs de Bretagne nord ont pu
maintenir les prix.
Haude-Marie Thomas

i la crise sanitaire continue d'apporter son lot d'incertitudes, les bouchots de la baie de Vilaine, principal pôle de production mytilicole en Bretagne
sud, ont représenté ces derniers mois un bon socle de
conﬁance pour la trentaine d'exploitants qui en vivent
autour de Pénestin (Morbihan). « Les volumes se sont révélés satisfaisants, aux environs de 3 500 tonnes. La prédation,
en particulier celle des étoiles de mer qui avait fait des ravages
les années passées, a été contenue », se réjouit Thibaud
Camaret, adhérent au groupement de producteurs de
moules de Pénestin et président du syndicat local.
Plus important encore, la commercialisation a été exceptionnelle avec des prix soutenus, de 2,20 euros le kilo
pour la moule traditionnelle non débyssussée à 2,80 €/kg
pour la moule Label rouge prête à cuire. « La demande
estivale a été particulièrement forte, comme pour compenser
les frustrations consécutives au conﬁnement », remarque
Thibaud Camaret, par ailleurs heureux d'avoir pu échapper cette année au Dinophysis. « Pas de fermeture ni de réouverture intempestive, reprend l'éleveur. Nous sommes passés
entre les gouttes. » Résultat : toute la marchandise a été
écoulée avant la ﬁn octobre, soit plus d'un mois de mieux
qu'à l'accoutumée.
Bertrand Tardiveau

Cultures marines n°342 Décembre 2020 - janvier 2021

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