Cultures marines n342 - 40

DÉCRYPTAGE
40 RENCONTRE

Erwan Tonnerre

Un coup de foudre pour l'ormeau
Les gastéropodes sont cultivés en circuit fermé, sur l'île de Groix.

DÉCORTICAGE

Groix haliotis
organise toute
l'année des visites
de son chantier.

majoritairement en Bretagne, chez
son principal concurrent France haliotis. Même en essayant « de faire ça
bien », l'halioticulteur déplore 25 %
de pertes lors des transferts depuis
l'Irlande, contre 5 % de mortalités
pour un trajet Brest-Groix.
Arrivées sur l'île morbiLES CLIENTS hannaise, les oreilles-deVIENNENT À
mer grandissent en bassin
NOUS, ET ON
en circuit fermé pour un
N'EST PAS PRÊTS cycle de 2 à 2,5 années.
À BAISSER
Lumière tamisée, tempéLES PRIX. »
rature de l'eau idéale, algues fraîches au menu, les
ormeaux font l'objet d'une grande
attention. Le met est délicat, la production l'est tout autant.
Groix haliotis pourrait produire

S. L.-L.

L'entreprise Groix haliotis a été
créée en 1996, l'élevage d'ormeaux
a démarré en 2007. L'animal est fragile, il n'aime pas voyager. Erwan
Tonnerre produit du naissain en
Irlande « pour garder le savoir-faire
et ne pas être dépendant en cas de
problème » mais il s'approvisionne

Stéphane Larronde-Larretche

n pied à Groix, l'autre à
Clifden, Erwan Tonnerre
partage sa vie entre la
Bretagne et le Connemara.
Double nationalité, double production : l'écloseur de formation cultive
des huîtres et des ormeaux. Les premières sont brassées dans les eaux
revigorantes de la mer d'Irlande, sa
société Streamstown Bay Oysters y
produit 40 à 50 tonnes par an. Les
seconds sont choyés en bassin à
température contrôlée, dans la pénombre d'un bâtiment municipal
sur les quais de Port Tudy.
Une écloserie et les 35 hectares de concessions ostréicoles se
trouvent en Irlande. À taille marchande, la plupart des huîtres - 25 à
30 tonnes selon les années - sont
acheminées à Groix où elles sont afﬁnées dans des bassins submersibles
puis revendues sur place. Écloseur,
producteur d'huîtres, restaurateur,
élu municipal, Erwan Tonnerre est
sur de nombreux fronts. Mais son
vrai dada, c'est l'ormeau. « Un monde
à part. »

Erwan Tonnerre cultive l'ormeau
à Groix depuis 2007.

Groix haliotis achète des ormeaux sauvages (à gauche)
principalement pour la transformation.

5 tonnes par an dans ses 200 bassins mais l'entreprise se contente de
2,5 à 3 tonnes annuelles. Car le marché dicte sa loi. Les ormeaux sont
vendus 69 euros HT aux professionnels, 75 euros TTC aux particuliers.
« Les clients viennent à nous et on n'est
pas prêts à baisser les prix. Les coûts
de production sont de 40-41 euros, la
marge est faible. »
Groix haliotis vend près de 70 %
de sa production aux restaurateurs, et
30 % aux particuliers, l'objectif étant
d'arriver à équilibrer les deux circuits.
Pour gagner en rentabilité, l'entreprise valorise également davantage
sa production depuis quatre à cinq
ans par la transformation d'ormeaux
sauvages et la vente de plaquettes
sous vide : « On facture le décorticage,
la marge est meilleure. »
L'ormeau a beau être un produit
de luxe, l'halioticulture n'apparaît pas
très lucrative. Après des premières années déﬁcitaires, Groix haliotis est aujourd'hui à l'équilibre avec un chiffre
d'affaires de 500 000 euros par an et
trois employés à temps plein mais de
nouveaux investissements vont bientôt être nécessaires pour renouveler
le matériel et donner un coup de
jeune à l'atelier de transformation. « Si
on voulait gagner de l'argent, commente
Erwan Tonnerre, on ne serait pas là. »
Marion Larronde-Larretche

Cultures marines n°342 Décembre 2020 - janvier 2021

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Cultures marines n342

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