produit de la mer - n°180 - Mars 2018 - 20

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Sur le Cap Kersaint, navire de 20 milllions
d'euros mis à l'eau en 2016, Cap Bourbon
a anticipé le sujet. Le palangrier est doté
d'un système « moonpool ». « Il s'agit d'un
puits dans le bateau qui permet de remonter les lignes des légines en toute sécurité
pour les marins, mis à l'abri des vents et des
vagues », explique Tugdual Poirier, directeur
d'exploitation chez Cap Bourbon, dont les
équipages effectuent six mois en mer et six
mois à terre.

Cap sur la transformation

Le système « moonpool » pour remonter
les lignes de légine a été retenu
par Cap Bourbon pour assurer la sécurité
des marins, tout en permettant
la saignée des légines.

ter de sa famille et se reposer. Dans les Taaf
(Terres australes et antarctiques françaises),
les conditions de travail sont extrêmement
dures », évoque Michel Quinquis, responsable du pôle austral pour Sapmer. Leur
sécurité avant tout. Si l'idée de généraliser
le saignement de la légine à bord de tous les
palangriers de l'armement pour en améliorer
la qualité, en garantir la blancheur et « éviter les réclamations des clients » est dans les
tuyaux, Michel Quinquis veut d'abord réaménager le bunker, zone très exposée du
navire où le saignement doit se faire.

Mais tous ont conscience que l'avenir du
secteur à long terme passe par une meilleure
rétribution des marins et donc par une meilleure valorisation des captures comme de la
production aquacole sur les marchés internationaux ou locaux. Le groupe Réunimer
investit sur la question (cf. reportage p. 44).
Hubert Chenede, directeur général de la filiale
Réunipêche témoigne : « Le problème de rentabilité de la pêche est réel. Il faudrait passer
des hausses de prix de l'ordre d'1 à 2€/kg.
Pour y parvenir, il faut créer les marchés, développer des produits à plus forte valeur ajoutée.
C'est le sens de nos investissements. »
Sapmer et Cap Bourbon (cf. p. 19) se sont
engagés depuis peu dans l'aventure de la
transformation de leurs captures. Et n'excluent pas de travailler celles de la pêche
artisanale. « On y réfléchit. Notre petit atelier installé au Port le permet », indique Paul
David, responsable marketing de Sapmer.
Chez Pêche Avenir, Laurent Virapoullé,
directeur général, souhaiterait créer une
joint-venture avec Qwehli pour développer

À savoir
La première vente
se fait en gré à
gré. Les pêcheurs
artisanaux peuvent
aussi rejoindre un
des six groupements
d'intérêt économique
de l'île qui se charge
de commercialiser
leurs captures.
Une grille tarifaire
existe pour les
pêcheurs. Les
bénéfices, s'ils
existent, sont
réinvestis dans
des machines à
glace et d'autres
équipements.

une activité de surgélation premium grâce
au système Cas Fresh. « Il y a une place sur
des marchés export pour du poisson extra
de 24 heures congelé avec cette technologie. La valorisation en frais a des limites géographiques. Localement, elle peut aussi être
restreinte par le pouvoir d'achat de la population, indique-t-il. En termes d'espèces,
cela pourrait concerner les thons, les espadons mais pourquoi pas les vivaneaux...
Reste à fidéliser les pêcheurs partenaires et
à organiser les collectes. »
Le local qui pourrait héberger l'atelier
de transformation et le surgélateur Cas
Fresh est déjà identifié au Port, à deux pas
de l'endroit où le Clipperton, longliner de
24 mètres tout juste rénové, est amarré. Il
est équipé de deux tunnels de congélation
à -40 °C, soit une capacité de 3 tonnes par
jour. Pour reconfigurer ce bateau qui évolue
dans la ZEE de l'océan Indien, s'engageant
dans des marées d'un mois, Pêche Avenir a
investi 900 000 euros. En mars, un second
navire identique devrait être opérationnel.
Mais pour le responsable, investir dans les
bateaux ne suffit pas à dégager des marges.
« Ces dernières ne sont pas dans les bateaux
mais dans les usines de transformation et
dans un travail pour valoriser l'histoire des
produits de la pêche réunionnaise. »
L'homme soutient le projet de création
d'une organisation de producteurs porté
par le CRPMEM, dont la mission serait d'élaborer le cahier des charges d'une marque
collective, qui distinguerait la pêche côtière.
« Nous pensons à la marque Nou la pésé,
qui fait écho à la marque Nou la fé, très en
vogue à La Réunion pour valoriser les pro-

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Zoom sur la légine
L'attribution de 80 tonnes de quotas de légine au nouvel entrant RPA en 2016-2017 a créé
une fracture au sein de la filière pêche réunionnaise. Si 100 tonnes de légine lui ont de
nouveau été attribuées pour 2017-2018, alors que les quotas globaux diminuent, RPA ne
pourra aller les chercher, faute de bateau. L'armement australien qui devait le lui louer s'est
rétracté, évoquant dans un courrier des pressions de la part des acteurs historiques.
Réunis au sein du SARPC, qui a quitté l'Aripa en novembre 2017, ces opérateurs sont inquiets
pour la suite. Car si la rentabilité de la pêcherie est réelle, « son potentiel de développement
est faible », signale Laurent Virapoullé de Pêche Avenir. Même s'il s'est vu réattribuer près de
38 tonnes de quotas supplémentaires en janvier, la perte de volumes de Cap Bourbon est un
sujet de réflexion pour conserver la rentabilité d'une pêcherie gourmande en investissements.
« Il faudrait voir si l'on ne peut pas valoriser le poisson des glaces ou si un contingent réduit
de captures de raies pourrait être autorisé par les Taaf », évoque Tugdual Poirier.
En attendant, l'idée de développer des produits à plus forte valeur ajoutée sur une partie
de la légine, en la fumant par exemple, fait son chemin.

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