produits de la mer - n°194 - Juillet-Août 2019 - 38

Dossier ❘ BAR, DAURADE, MAIGRE, PAGRE

Grèce-Turquie : duel méditerranéen
Les deux géants et voisins
méditerranéens se livrent une rude
concurrence sur les marchés
internationaux, Italie en tête.

G.
D.

es chiffres de l'Eumofa sont éloquents : pour le bar et la daurade
frais entier, la part de marché en
valeur des produits turcs sur les principaux marchés européens (Italie, Espagne,
France, Portugal, Allemagne, Royaume-Uni
et Pays-Bas) était de 12 % en 2009 puis a
augmenté à 26 % en 2017. Dans le même
temps, celle des produits grecs est passée
de 58 à 43 %.
Certes, comme l'indique un responsable
d'achat d'une grande enseigne en France,
« la Grèce c'est la qualité et la Turquie les
prix. En termes de logistique, la Turquie
est aussi plus distante et plus ouverte à
l'est ». Les Grecs, qui aimeraient voir perdurer cette idée dans les esprits, boostent
leur communication, un peu à l'image
du bureau Norge avec le saumon norvégien, mais encaissent le coup. « La différence entre les prix grecs et turcs est descendue à 30-40 centimes, contre 1 à
1,20 euro il y a peu, confie Kristos Boyaci,
responsable export chez le grec Nireus.
En ce moment, nous vendons 1 euro de
moins qu'à la même époque il y a un an. »
2015, qui fut une belle année avec des
prix moyens records autour de 6 euros/kg,
semble loin. Et les 4,60 euros/kg se profilent

De Méditerranée, certes !
Pour le reste, c'est la valse des étiquettes...

pour 2019. Depuis cinq ans, le marché s'affiche à la baisse chaque année, avec une
offre croissante sur le marché mondial.
« La concurrence des Turcs est rude,
reconnaît son collègue Theodoros Alexakos,
tout en restant offensif et optimiste. Mais
le secteur croît et reste prometteur. Il faut
faire du marketing, éduquer, investir dans la
R & D... Nous voulons nous inscrire dans le
durable, minimiser l'impact sur l'environnement. Le consommateur doit manger plus
de poisson, le marché croître et notre part
de marché avec. L'aquaculture est une activité importante en Grèce, avec une implication sociale forte sur le littoral. »

Production
totale de bar
en Méditerranée
en 2018 :

197 000

Grèce : 50 000 t
Turquie : 85 000 t

La Grèce sigle son poisson
mposer une marque de confiance qui signerait le côté high-tech de l'aquaculture grecque et son
intégration environnementale le long des 16 000 km de côtes et 4 000 îles du pays : c'est l'objectif de l'Hapo ((Hellenic aquaculture producers organization), créée il y a un peu plus
« Nos 21 membres représentent 85 % de la production du pays, illustre
d'un an. « N
Apostolos (photo), le président, par ailleurs directeur commercial d'AnTouralias Ap
Nous devons aujourd'hui affirmer une différenciation, basée sur le resdromeda. N
règles européennes, notre expertise de pionnier, notre qualité... Notre
pect des règ
volonté est de conserver le leadership sur un marché en hausse avec une
volont
concurrence féroce, en travaillant sur la valeur en même temps que sur
co
les
le volumes. » La filière investit 1,5 million d'euros, notamment pour
pin'ser
ses poissons en Grèce et Italie. Une opération accompagnée par
p
une vaste campagne de relation publique, qui commence tout juste,
destinée à mettre à profit l'image grecque : européenne, méditerranéenne, ouverte à la gastronomie, touristique, sociale...
D.G.

❘ 38 ❘

PRODUITS DE LA MER N°194 JUILLET-AOUT 2019

Côté turc, on évoque même des prix
moyens à la première vente de 4 euros/kg
sur les tailles 300-400-600 grammes. « La
production totale de Turquie a dépassé
celle de la Grèce, se satisfait Hilay Agaoglu,
directrice des exportations de Kiliç Deniz,
le géant du pays avec ses 65 000 tonnes
de poisson. Nous sommes présents sur les
mêmes marchés et équivalents en termes
de qualité et de prix. À la rentrée, après la
société Sürsan, nous serons certifiés ASC
sur quatre fermes. Nous faisons de bons
volumes en France avec les grossistes, les
détaillants, le marché de Rungis, principalement en frais entier. »
En plein développement et face à une
consommation intérieure en forte baisse
pour cause de récession, la Turquie vise de
nouveaux marchés : le Proche-Orient, la
Russie... Les investissements sont conséquents depuis 2008 et les groupes intégrés. Kiliç Deniz, par exemple, assure la
chaîne complète depuis les écloseries et
l'alimentation animale, et investit à l'étranger : en République dominicaine pour le
bar et la daurade, mais aussi en Albanie
pour la truite ou en Mauritanie pour la
farine et l'huile de poisson. Les prévisions
à courts termes ? « Nous conservons nos
volumes, précise la directrice, et il n'y aura
pas d'augmentation significative sur la
production en Turquie, vu les soucis économiques dans le pays et la récession globale sur les marchés. » ■

produits de la mer - n°194 - Juillet-Août 2019

Table des matières de la publication produits de la mer - n°194 - Juillet-Août 2019