produits de la mer - n°195 - Septembre 2019 - 48

Dossier ❘ MOULES

La moule

bio sort de sa coquille

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PRODUITS DE LA MER N°195 SEPTEMBRE 2019

qui s'oriente de plus en plus vers les produits
labellisés. Et un peu en réseau plus spécialisé type Biocoop. » Le groupement a vendu
314 tonnes de moule bio en 2018 : de la
bouchot de deux Charentais et d'un producteur associé à Chausey. Le frein : « C'est
compliqué de faire du bio et du standard :
toute la ligne de production doit être nettoyée avant d'attaquer la série bio. »
Mytilimer propose aussi de la moule
de bouchot bio avec des partenaires à
Chausey et sur la côte d'Opale. Et la moule
de corde bio de Liorzhou Ar Mor, immergée aux abords des îles Dumet (au large de
Piriac-sur-Mer) et Houat. Dans les Côtesd'Armor, c'est aussi le créneau des galloprovincialis de filière de Locquémeau. Ceux
qui ont parié dessus ont vu juste. Ce produit
« profite d'une forte demande liée à l'engouement général pour le bio », constate
le bureau d'études Via Aqua.
Sa production se développe en Europe,
pointe l'Eumofa. L'Irlande exploite ce
filon depuis 2010, pesant 9 000 tonnes
de moule bio sur les 20 000 produites en
Europe en 2015, et portant la moule en tête
des espèces d'aquaculture biologique dans
l'UE. Au Danemark, la mytiliculture biologique, plus récente, est en forte croissance,
avec 2 200 tonnes produites en 2017 par
neuf élevages. Dont Seafood Limfjord
pour la moitié de la production, qui vend
via Vilsund Blue. La moule bio danoise,
comme celle de pêche MSC, est tournée
vers l'export, mais la consommation intérieure augmente de 20 à 25 % par an.
L'Eumofa constate 20 à 30 % de
plus-value pour le bio en Espagne
et au Danemark. L'Italie écoule
aussi des moules de Sardaigne en
bio, mais « il n'y a pas de majoration de prix », constate l'Eumofa, pointant plutôt « une stratégie pour développer les marchés,
en particulier vers la France ».
Pourtant, les producteurs français
en ont sous le coude.
S.L.R.

Dans ses parcs de l'archipel des îles Chausey, l'équipe de La Vivière
regarnit les bouchots en naissain. En veillant à limiter la densité.

Une moule bio, quésaco ?
Quels critères la moule bio doit-elle remplir ? La réglementation européenne sur l'aquaculture biologique,
datant de 2007 et depuis modifiée et complétée, n'est
pas d'une grande limpidité. Mais les interprétations
de l'Inao, d'Ecocert et de Bureau Veritas aident à y
voir clair. L'état écologique des masses d'eau doit être
classé bon ou très bon sur l'Atlas DCE mis à jour par
l'Ifremer. La zone doit être bien délimitée et le naissain provenir de stocks durables. Les filets antiprédateurs ne doivent pas blesser les oiseaux plongeurs. La
densité de peuplement doit être adaptée aux capacités de la zone, sans dépasser celle des parcs traditionnels du secteur. Un plan de gestion durable de la
production, actualisé tous les ans, est requis, avec les
mesures pour réduire les déchets et les incidences. S'y
ajoute une évaluation environnementale si la production dépasse 20 tonnes par an. Il faut séparer le traitement du bio des autres produits, fournir des garanties
fournisseurs, le registre d'élevage...
La conversion en bio dure trois mois
en pleine mer et un mollusque peut
être dit bio s'il a vécu deux tiers de sa
vie dans ces conditions. À noter que
les moules, bio ou non, ont un faible
impact environnemental et ressortent
championnes des études comparatives
des effets sur le climat de différentes
productions animales.
L.F.

e bouchot, de filière, d'ici ou d'import : l'offre est variée en moules
bio. Même si ce concept en laisse
plus d'un perplexe pour un élevage dont on ne maîtrise pas les intrants, ni
le milieu. D'abord, les moules doivent grandir dans des eaux de qualité. Si le site s'y
prête, alors les contraintes sont avant tout
fonctionnelles, pour bien séparer les opérations entre bio et non-bio ; et administratives pour assurer une parfaite traçabilité.
La Vivière est l'un des pionniers, sur l'archipel des îles Chausey : « Nous sommes
passés en bio en 2011, agréés par Bureau
Veritas, qui nous audite tous les ans,
raconte Stéphanie Sevestre, qui dirige
la société familiale avec son frère Gilles
Salardaine. Chausey est loin des apports
de la terre, dans des eaux classées en A,
en zone Natura 2000. » Elle évoque la traçabilité sur l'origine du naissain et les opérations sur les lots. À terre, le bâtiment du
Vivier-sur-Mer est compartimenté avec
une chaîne de lavage pour les moules de
Chausey élevées aux standards du bio et
une pour celles de la baie du mont SaintMichel (sous AOP).
Les critères qualité sont ceux que s'imposent les producteurs. Ainsi, La Vivière
opte pour un taux d'ensemencement des
pieux de 50 % plutôt que 70 % : « Plus
on monte en densité, moins le produit est
beau. » La société n'a récolté à Chausey qu'à
partir d'août pour atteindre autour de 25 %
de chair. Sur les 600 tonnes qu'elle sort des
eaux claires de l'archipel, elle n'en vend que
40 % en bio, une part qui progresse. Les
moules partant en STG sont les mêmes. « Ça
pourrait être 100 % en bio, c'est une question de demande, souligne Gilles Salardaine.
Le bio a eu du mal à démarrer, mais maintenant, nous avons un partenariat avec
Auchan, notre principal client. » Même en
vrac, malgré la contrainte pour le distributeur de ne pas mélanger de lots.
« La moule bio fonctionne bien, constate
aussi Benjamin Le Faou, de Cultimer. Nous
avons une demande très régulière en GMS,

S.L.R.

L'appétit grandit pour la moule bio, élevée dans des eaux
pures, en veillant à limiter les impacts de l'élevage.
La filière française rattrape son retard face à l'Irlande
sur ce créneau porteur.

produits de la mer - n°195 - Septembre 2019

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