produits de la mer - n°201 - Juin-juillet 2020 - 12

Actu ❘ REGARDS CROISÉS

Xavier Leduc

Christophe Hamel

Président du conseil de surveillance d'Euronor et président
de l'Union des armateurs à la pêche de France (UAPF)*

Directeur des criées de Cornouaille,
des directeurs et responsables de

"

"

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*avec Bruno Leduc, directeur d'exploitation d'Euronor.

proches. C'est assez angoissant d'envoyer
des personnes en mer dans ce contexte.
On a fait de notre mieux, avec bon sens, en
tenant compte des sensibilités. Nous sommes
fiers de nos marins. Nos clients nous ont
soutenus alors que ce n'était pas gagné au
début. Cette belle réactivité de la filière nous
a donné de l'énergie. Et l'administration a été
très réactive.

Xavier Leduc : On a sans doute été l'armement
qui a mis le plus de produits sur le marché
français durant la crise. La commercialisation
reste correcte, mais des espèces exportées
vers l'Espagne et l'Italie ont perdu 75 à 80 %
de leurs marchés : merlu, lotte, raie. La grande
distribution a favorisé le filet en libre-service :
merlan, lieu noir, lingue...
Bruno Leduc. : L'exploitation de nos trois
navires de pêche fraîche s'est poursuivie,
en débarquant à Hanstholm (Danemark) et
en Écosse, avec rapatriement à Boulogne.
Heureusement, des mareyeurs se sont
accrochés pour maintenir les achats, ce qui a
évité de jeter du poisson. Et ils ont pu écouler
notre marchandise à prix correct, en tout cas le
lieu noir, vendu plutôt en grande distribution.
Pour le divers, on a plus souffert. Même
chose pour le lieu noir surgelé de nos deux
chalutiers congélateurs, à cause de l'arrêt de
la restauration collective. Les commandes
se sont arrêtées partout en Europe. Tous les
frigos sont pleins  : Danemark, Allemagne,
îles Féroé, Écosse, France... Globalement,
pour la flottille européenne, c'est compliqué
de trouver de la place pour débarquer. Les
prix risquent de chuter. Le plus dur est
devant nous, ce n'est pas comme le frais où la
sanction est immédiate.

B.L. : Le moins possible, pour des marins et
quelques employés à terre, pour s'adapter
aux changements d'organisation.
X.L.  : À Boulogne, beaucoup de navires ont
vite repris, faute de visibilité sur les aides. Le
gouvernement voulait que ce ne soit pas trop
incitatif pour qu'on approvisionne le marché.
L'UAPF a participé aux discussions sur les
arrêts temporaires. La période est trop
limitée, il n'y aura pas de retour à la normale
tant que les marchés de la restauration et de
l'export seront bouchés. Et l'indemnisation
de 30  % du chiffre d'affaires ne couvre pas
les frais fixes de certains bateaux. Ça coûte
peu à l'État, qui n'abonde qu'à 25  %  en
complément du Feamp. Nous regrettons
aussi que les thoniers ne soient pas inclus.
Mais ce dispositif a le mérite d'exister et la
France a été pionnière.

Quelles mesures ont été prises à bord
des navires ?

Y a-t-il eu des avancées pour mieux
accorder offre et demande ?

B.L. : On a été proactifs, avec une commande
de masques le plus vite possible, pour
compléter le stock qu'il restait du H1N1. On a
aussi utilisé des visières, et mis en place une
procédure, avec prise de température. Puis
il y a eu les recommandations officielles, très

X.L. : Elles ne peuvent pas être équilibrées
juste avec un système de prévisions. On ne
peut pas pêcher ce que les gens veulent, il
faut vendre ce qu'on a pêché. Et la pêche
française souffre de son organisation mal
structurée et plutôt à fibre artisanale.

PRODUITS DE LA MER N°201 JUIN-JUILLET 2020

Avez-vous fait appel aux arrêts
temporaires, au chômage partiel ?

T.N.

DR

Nous sommes fiers
de nos marins."

Quel a été l'impact du Covid-19 sur
l'activité d'Euronor ?

p
h

Les criées ont-elles beaucoup souffert
de cet épisode ?

Évidemment. Les criées côtières pures vont
s'en sortir. Concarneau réalise presque un
tonnage normal. Mais pour les hauturières,
Le  Guilvinec, Roscoff, Erquy... le chiffre
d'affaires est à -60  %, -70  % depuis le
début de la crise. Certaines ont fermé, puis
rouvert. Aujourd'hui (NDLR, le 15 mai), toutes
les criées sont actives, mais avec moins
de ventes, par exemple deux ou trois par
semaine à Cherbourg au lieu d'une vente
quotidienne. En Cornouaille, nous sommes
en moyenne à 50  % d'activité. Nous avons
mis en place du chômage partiel et demandé
des aides spécifiques. Et nous espérons que
les aides du Feamp prévues pour nos projets
seront maintenues, malgré les besoins pour
les arrêts temporaires et le Brexit.
Y a-t-il eu beaucoup de contournements
des criées par les vendeurs ?

Finalement, non. Nous en avons beaucoup
parlé au début, le passage obligatoire en criée
était alors évoqué comme la seule solution, au
moins sur certaines espèces. Et on n'en parle
plus ! Les navires qui nous avaient contournés
sont en fait très vite revenus en criée. Mais
nous réfléchissons toujours à cette question en
parallèle, avec le bureau Via Aqua.
Les prix se tiennent-ils ?

À la côtière, les chalutiers à langoustines
s'en sortent bien, mais les grosses tailles
ne se vendent pas, faute de restauration.
Les courtes marées de trois à quatre jours
ont permis aux artisans d'obtenir des prix
intéressants, aussi parce qu'ils ne sont pas
nombreux. Des hauturiers à Loctudy s'en
sortent sur des marées normales, car ils sont
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