produits de la mer - n°201 - Juin-juillet 2020 - 15

Actu ❘ REGARDS CROISÉS

Gaëtan de Lamberterie
Directeur de marché marée chez Carrefour,
Vice-président de France Filière Pêche

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"

L'enjeu est
la reconstitution
des stocks. "

illustrées, et pas étiquetées. Il y aura donc,
sans doute, des ruptures sur certaines de nos
références. Par ailleurs, pendant le confinement,
les filières de recyclage des matériaux se
sont arrêtées, ce qui posera un problème, en
particulier sur le carton, que nous utilisons
beaucoup.
Considérez-vous désormais être arrivé
au bout de cette crise ?
Aujourd'hui, à la date du 20 mai et après une
semaine d'arrêt pour maintenance juste après
le confinement, nous devrions pouvoir repartir
presque au même niveau que l'année dernière.
Maintenant, tout réside dans la capacité de la
filière pêche à nous livrer de bons volumes de
poissons pendant la campagne. Nous sommes
dépendants des apports en sardine, maquereau
et thon, pour reconstituer nos stocks d'ici fin
novembre. Il faut que la campagne soit bonne
en matière première.
Les consommateurs ont largement
plébiscité  la conserve. Le secteur est-il
le « gagnant » de la crise ?
Depuis le début du déconfinement, nous
sommes revenus à ce que l'on peut appeler
des ventes « normales, plutôt bonnes ». Nous
sommes sur des contrats annuels et l'impact
sur les prix a été nul. Mais la conserve est
apparue comme une valeur refuge, ce qui
est très positif. Cette consommation marque
un bon point pour l'avenir. Ce produit a
beaucoup d'atouts. Il est riche en apports
nutritionnels, facile à consommer, apporte
beaucoup de services et de sécurité. Après,
nous serons peut-être «  gagnants  » si nous
arrivons à reconstituer nos stocks. Nous ne
sommes pas à l'abri d'éventuelles pertes de
ventes d'ici la fin de l'année, si nous n'arrivons
pas à élaborer à temps l'ensemble de nos
références.

Il faut maintenir
le dialogue. "

Comment la crise sanitaire a-t-elle été
traversée par la GMS et le rayon marée en
particulier ?
La période de stockage du préconfinement,
qui a vu une accélération forte des ventes, a,
au contraire des produits secs et de la viande,
assez peu concerné le rayon marée. Puis le
confinement a abouti à un arrêt extrêmement
brutal des ventes en poissons, coquillages et
crustacés, mais aussi des segments importants
comme les produits élaborés et les sushis. Les
trois premières semaines ont été très difficiles.
Le poisson a commencé à repartir de façon
significative à Pâques. Une reprise confirmée
entre les semaines 17 et 19.
Il semble que le Libre-service se soit
bien tenu ?
La partie LS a en effet progressé tout au long du
confinement. Les clients ont été plus en confiance
que vis-à-vis du rayon traditionnel, bien que nous
ayons multiplié les actions pour les rassurer, en
mettant en avant tous nos protocoles d'hygiène.
Le LS a aussi un côté pratique pour des clients
souhaitant réduire le temps passé en magasin.
Nos directives nationales visaient néanmoins
à maintenir le rayon marée ouvert, malgré les
soucis d'effectifs. Cela constituait un service
indispensable à la filière, puisque les produits
de la pêche française sont essentiellement
vendus au rayon traditionnel et que le marché
de la restauration était fermé. Le LS est assez
fortement tiré par le saumon et le cabillaud,
importés donc, mais nous avons aussi insisté sur
l'emballage sur place afin d'élargir l'assortiment
avec des produits issus de nos côtes, filets et
poissons entiers.
De quelle façon Carrefour s'est engagé
pour assurer de meilleures ventes dans les
criées françaises ?

Au début, face à l'arrêt de la pêche, nous
étions en manque de matière et nous avons
concentré nos efforts pour aider à reprendre
la mer. Il a s'agi d'assurer des débouchés en
volumes et en prix à des armateurs et des
mareyeurs. Nous avons réalisé des ventes de
gré à gré avec des partenaires fidèles, en
s'accordant d'une semaine à l'autre  : nous
étions en confiance sur nos apports et les
pêcheurs assurés de la rentabilité de leur
marée. Nous avons ainsi travaillé avec l'Apak
mais aussi avec les mareyeurs d'Océalliance
notamment.
En aval, nous avons donné de la visibilité à
une quinzaine d'espèces, spécifiques de la
pêche française. Nous avons fait de belles
performances en maquereau, sardine, merlan
mais aussi sur le chinchard, le rouget, la dorade
grise...
Cela a permis d'augmenter les volumes
prévisionnels chaque semaine et une remontée
des cours qui avaient totalement chuté. La
flotte a repris confiance en la capacité du
marché à absorber des volumes. Aujourd'hui,
nous ne manquons plus de matière et les
prix autorisent des marées rentables. Mais
il reste encore une partie de la flotte à quai.
Pour accompagner son retour, nous allons
continuer à orienter massivement nos achats
auprès de la filière française.
Cette crise a-t-elle modifié les relations
dans la filière ?

Un dialogue assez intense s'est instauré entre
les différents maillons de la filière, pêcheurs,
mareyeurs et distributeurs. Nous avons réussi
à relancer le marché, même si la situation
reste difficile. Il faut maintenir ce dialogue,
d'autant que nous allons avoir à faire face à
une nouvelle étape avec le Brexit.

PRODUITS DE LA MER N°201 JUIN-JUILLET 2020

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