Doctorat et Notariat - L'organisation de la liquidation du passif successoral - Tome 50 - 114

L'ORGANISATION DE LA LIQUIDATION DU PASSIF SUCCESSORAL

péril en les exposant à la saisie des biens indivis ou de leurs biens personnels87. Il
est de leur intérêt commun d'anticiper le paiement du passif successoral en procédant à une vente amiable du bien indivis qu'ils ont choisi, au lieu d'attendre et de
subir la réalisation forcée du droit de gage des créanciers successoraux. La saisine
du juge étant fondée sur le péril qu'encourt l'intérêt commun sans être justifiée
par l'urgence, celui-ci devrait statuer en la forme des référés sans être juge des
référés.
β) La vente requise par les indivisaires titulaires des deux tiers des droits indivis
165. Une nouvelle mesure de faveur pour le règlement des dettes successorales.
En application de l'article 815-5-1 du Code civil, la vente de tout bien indivis peut
être autorisée par le juge à la demande d'un ou plusieurs indivisaires titulaires
d'au moins deux tiers des droits88, si elle ne porte pas une atteinte excessive aux
droits des autres indivisaires89 (art. 815-5-1 al. 1 C. civ.). La procédure de vente
est hybride90 : une phase extrajudiciaire devant le notaire91 doit nécessairement
précéder la saisine du tribunal de grande instance92. La finalité de la vente prévue
87. Civ. 1, 14 févr. 1984, Bull. civ. I, n° 62, D. 1984.453, note A. Breton, JCP 1985.II.20381,
note E.S. de La Marnierre, RTD civ. 1985.189 obs. J. Patarin (dans l'affaire en question, la vente des
immeubles de la succession était sollicitée pour le règlement des droits de mutation).
88. En revanche, sont exclus les biens faisant l'objet d'un démembrement de la propriété. Bien
que le texte ne le précise pas, le législateur a entendu réserver la vente de ces biens conformément aux
dispositions des articles 817 à 819 du Code civil : Rapp. AN n° 1145 de Monsieur Blanc, sur la proposition de loi n° 1085 de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures, sous
examen de l'article 4 (article 3 de la proposition de loi), paragraphe 2.
89. L'atteinte excessive aux droits des indivisaires minoritaires peut être d'ordre matériel ou
moral et est appréciée souverainement par les juges du fond. Selon les indications des parlementaires,
l'indivisaire récalcitrant pourrait se prévaloir du préjudice moral excessif résultant de la vente de la
maison de famille dont il contribue régulièrement à l'entretien : Rapp. Sénat n° 209 de Monsieur
B. Saugrey, sur la proposition de loi n° 1085 de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures, sous examen de l'article 4.
90. Pour plus de précisions, voir : J. Lafond, « L'autorisation judiciaire de vendre un bien indivis », JCP N 2009, p. 1180 ; N. Pierre, « La vente d'un bien indivis contre la volonté d'un indivisaire »,
LPA 22 sept. 2009, p. 3.
91. Les indivisaires intéressés doivent exprimer devant un notaire leur intention de procéder à
l'aliénation d'un bien indivis (art. 815-5-1 al. 2 C. civ.). Dans le délai d'un mois suivant son recueil, le
notaire doit informer les autres indivisaires de la vente projetée (art. 815-5-1 al. 3 C. civ.). Il doit y
procéder en la forme d'une signification par un acte extrajudiciaire (art. 651 et s. C. proc. civ.). À
défaut de notification selon les modalités indiquées, l'article 815-5-1 al. 7 du Code civil sanctionne le
vice de procédure par l'inopposabilité des décisions prises aux autres indivisaires. Mais en pratique, la
sanction de l'inobservation de la signification aux indivisaires minoritaires ou de son irrégularité
devrait être écartée au profit de l'irrecevabilité de la demande par le tribunal. Si la signification a valablement été faite, les indivisaires minoritaires ont, à compter de sa date, un délai de trois mois pour
s'opposer ou approuver la vente envisagée, étant précisé que leur inertie équivaut à un refus. En l'absence de réponse ou en cas de désaccord, le notaire doit le constater par procès-verbal (art. 815-5-1
al. 4 C. civ.). En outre, il doit y mentionner tous les renseignements permettant au tribunal de prendre
sa décision, notamment les éléments établissant les droits des divers indivisaires et ceux attestant que
la procédure a été respectée.
92. Les indivisaires titulaires des deux tiers des droits indivis à l'origine du projet de vente d'un
bien indivis doivent saisir le tribunal de grande instance pour obtenir son autorisation. Après avoir
contrôlé la régularité de la procédure extrajudiciaire au regard des éléments figurant dans le procèsverbal établi par le notaire, le tribunal doit décider si la vente envisagée ne porte pas une atteinte
excessive aux droits des indivisaires minoritaires pour l'autoriser (art. 815-5-1 al. 5 C. civ.). Dans cette
perspective, il tient compte de leurs observations faites éventuellement sur une demande de maintien
dans l'indivision (art. 821 à 823 C. civ.) ou d'attribution préférentielle du bien envisagé pour la vente
(art. 831 à 834 C. civ.). La juridiction est également compétente pour juger d'une demande reconventionnelle en partage faite par un indivisaire. À défaut d'atteinte excessive aux droits des indivisaires

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