Doctorat et Notariat - L'organisation de la liquidation du passif successoral - Tome 50 - 117

LA SUCCESSION INDIVISE

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artificielle et douteuse des théories avec le principe aurait pour effet de fragiliser
leur valeur justificative de l'indivision.
A. L'ANALYSE DES THÉORIES REPOSANT SUR L'EXISTENCE
D'UN PATRIMOINE D'AFFECTATION
173. Présentation générale des théories propres à fonder l'indivision. De prime
abord, une inclination naturelle tend à identifier une personne morale dans le
groupement doté d'un patrimoine affecté à l'intérêt commun de ses membres. La
théorie de la personnalité morale a d'ailleurs connu un essor considérable depuis
le dix-neuvièmement siècle, car elle permet d'ajuster l'existence d'un patrimoine
d'affectation à la théorie classique du patrimoine98 et de convertir les apports et
les appropriations du groupement sous la forme d'une propriété individuelle99.
Au regard de l'évolution de l'indivision, cette analyse purement institutionnelle de
la communauté d'intérêts à l'origine d'un patrimoine autonome est recommandée par une partie de la doctrine moderne100. Mais une autre voie pourrait expliquer l'évolution de l'indivision par une analyse s'appuyant sur la propriété des
indivisaires associée à leur intérêt commun, c'est la propriété collective. Henri
Gazin avait ouvert la voie en préconisant l'analyse de l'indivision en une copropriété en main commune101. Louis Josserand avait également célébré les vertus de
la propriété issue du droit germanique, la Gesammte Hand, appréhendée comme
une alternative à une indivision trop fortement dépendante de la propriété individuelle et à la personnalité morale masquant les individualités102. Mais le fonctionnement trop rigoureusement collectif de la propriété en main commune était mal
adapté aux réalités contemporaines, de sorte qu'elle n'a trouvé guère de crédit
auprès de la doctrine contemporaine103. Le concept de propriété collective a été
délaissé en même temps que l'archaïque institution germanique. Jean Vincent
avait pourtant démontré qu'il existe une notion générale de propriété transcendant la propriété individuelle et la propriété collective104. À l'intérieur de la notion
générique de propriété collective, l'auteur différenciait la copropriété, l'indivision
et la communauté105. Par la suite, Francis Delhay a démontré admirablement que
98. F. Delhay, La nature juridique de l'indivision - Contribution à l'étude des rapports de la notion
d'indivision avec les notions de société civile et de personnalité morale, th. LGDJ, Tome 89, 1968, p. 377 ;
S. Guinchard, L'affectation des biens en droit privé français, th. LGDJ, Tome 145, 1976, n° 395, p. 340.
99. F. Zénati-Castaing et T. Revet, Les biens, PUF, 3e éd., 2008, n° 351, p. 521.
100. Voir notamment le plaidoyer très pénétrant de Messieurs Zénati-Castaing et Revet dans
leur ouvrage (op. cit., p. 513 et s.). Quant à Monsieur Wicker, l'auteur semble préconiser la reconnaissance de la personnalité morale à tout groupement pourvu d'un patrimoine d'affectation (« Personne
morale », Rép. civ. Dalloz, juin 1998, n° 39). Voir également : G. Wicker, « L'entreprise indivise et les
procédures collectives », in L'indivision, Journées nationales de l'Association H. Capitant, Tome VII,
Bordeaux, Dalloz, 2005, p. 31 et s.
101. H.  Gazin, Essai critique sur la notion de patrimoine dans la doctrine classique, th.
Dijon, éd. A. Rousseau, 1910, p. 462 à 464. Il faut préciser que pour l'auteur, l'indivision ne constituait
pas un patrimoine d'affectation car « il n'y a pas constitution d'un but nouveau, d'un centre autour
duquel viendraient se ranger toutes les valeurs positives ou négatives concourant à un titre quelconque à
la réalisation de ce but » (p. 371).
102. L.  Josserand, « Essai sur la propriété collective », in Le Code civil  1804-1904 - Livre du
centenaire, Tome premier, p. 357.
103. M. Dagot, L'indivision - loi du 31 décembre 1976, Litec, n° 10 ; P. Catala, « L'indivision (lois
des 31 décembre 1976 et du 10 juin 1978) », Defrénois 1979, art. 31874, n° 22.
104. J.  Vincent, « Les propriétés collectives, les indivisions et l'effet déclaratif du partage »,
Rev. Crit. Lég. Jurisp. 1932.284.
105. J. Vincent, art. préc., part. p. 314 et s.
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