Doctorat et Notariat - L'organisation de la liquidation du passif successoral - Tome 50 - 43

LE DROIT DE PRÉFÉRENCE DE L'ARTICLE 878 DU CODE CIVIL

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qui le mettrait en échec (art. 2276 C. civ., anc. art. 2279 C. civ.)69. Le droit de suite
attaché éventuellement au privilège spécial mobilier est fondamentalement théorique70. En tout état de cause, les créanciers successoraux peuvent se prévaloir des
mesures de conservation des meubles successoraux pour pallier l'absence de droit
de suite. En revanche, la question présente un intérêt avéré pour le classement des
créanciers successoraux et personnels de l'héritier en concours sur les meubles
successoraux. Titulaires d'un privilège spécial mobilier, les créanciers successoraux pourraient primer un certain nombre de créanciers personnels de l'héritier
munis d'un privilège général sur les meubles. Indubitablement, le droit de préférence légal sur les meubles est spécial71 : d'une part, son assiette est circonscrite
aux meubles successoraux, à l'exclusion de ceux de l'héritier et d'autre part, il
s'applique uniquement au meuble objet de la demande. Non sujet à inscription et
fondé sur la qualité de créancier de la succession, le privilège spécial mobilier
devrait attribuer à ses bénéficiaires une priorité certaine sur les créanciers personnels de l'héritier.
45. En conclusion, le droit de préférence de l'article 878 du Code civil n'octroie aux créanciers successoraux qu'une protection précaire à raison de sa mise
en œuvre malaisée sur les meubles et de la nécessité d'une inscription hypothécaire
du privilège spécial immobilier dans le délai de l'article 2383 du Code civil. Sans
doute leur appartient-il de faire preuve de diligence et de célérité pour assurer la
conservation de leurs droits. Mais encore faut-il qu'ils aient connaissance de l'ouverture de la succession. Or en l'absence de procédure d'appel des créanciers héréditaires concomitante à l'ouverture de la succession, ils s'exposent aux manœuvres
intéressées de l'héritier s'empressant d'accorder à ses créanciers une hypothèque
sur les immeubles successoraux et de confondre les meubles héréditaires avec les
siens propres. Si la protection offerte par le droit de préférence de l'article 878 aux
créanciers successoraux est précaire, celle concédée aux créanciers personnels de
l'héritier est fondamentalement infondée.
II. UNE PROTECTION INFONDÉE DES CRÉANCIERS
PERSONNELS DE L'hÉRITIER
46. Amendement majeur de la loi du 23 juin 2006 en la matière, l'extension
du droit de préférence de l'article 878 aux créanciers personnels de l'héritier est, à
tous égards, injustifiée. Tout d'abord, elle l'est théoriquement au regard de la
liberté qu'a tout débiteur de s'obliger par de nouveaux engagements. Ensuite, elle
ne se justifie guère en pratique à raison de son caractère surabondant. Par le jeu de
l'option successorale, l'héritier acceptant peut déterminer l'étendue de son obligation au passif successoral en fonction de la solvabilité de la succession72. Il accepte purement et simplement la succession quand il est convaincu de son caractère excédentaire73. Aussi, son
69. Y. Lequette, art. préc., n° 72.
70. M. Cabrillac, Ch. Mouly, S. Cabrillac et Ph. Pétel, op. cit., n° 685 ; Ph. Simler et Ph. Delebecque, Droit civil, Les sûretés - La publicité foncière, Précis Dalloz, 5e éd. 2009, n° 744 ; L. Aynès et
P. Crocq, Les sûretés - La publicité foncière, Defrénois, 3e éd., 2008, n° 611. Plus hésitants : H., L. et
J. Mazeaud et F. Chabas, Leçons de droit civil, Sûretés - Publicité foncière, Montchrestien, 7e éd. par
Y. Picod, 1999, n° 140.
71. M. Cabrillac, Ch. Mouly, S. Cabrillac et Ph. Pétel, op. cit., n° 722, p. 496.
72. F. Terré et Y. Lequette, op. cit., n° 643.
73. Ibidem.
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