Expertise notariale - Un an d'application de la réforme des contrats. Quel impact sur la pratique notariale ? - 2017-2018 - 1er - 135

LA CESSION DE CRÉANCE ET LA SUBROGATION PERSONNELLE 135

198. Quoi qu'il en soit, l'exigence nouvelle d'un écrit constitue bel et bien l'apparition d'un formalisme là où il n'y en avait pas. Cela devrait bouleverser la
pratique, surtout en présence de créances de faible importance.
Nombreuses sont en effet aujourd'hui les cessions de créances engageant
des montants inférieurs au seuil de l'article 1341 du Code civil, pour lesquelles désormais un écrit sera requis ad validitatem.
À titre d'exemple, la pratique notariale est quotidiennement confrontée à
un cas particulier : lorsque l'acquéreur d'un lot de copropriété verse à son
vendeur le montant du fonds de roulement indiqué par le syndic, il s'agit
bien du paiement du prix de cession d'une créance contre le syndicat des
copropriétaires. Fort heureusement, l'acte de vente contient généralement
la trace écrite de cette cession.
Plus délicate, et non tranchée par le texte, est la question des créances
accessoires : sont-elles concernées par l'exigence d'un écrit ? Faudra-t-il les
énumérer dans un acte de cession, au risque d'en oublier certaines, ou
continueront-elles à suivre le principal ? Cela présente pour les praticiens
un enjeu conséquent : s'il était confirmé que le formalisme nouveau est
applicable aux créances accessoires, cela aurait mécaniquement pour effet
d'étendre la nécessité d'un écrit à des conventions qui ne portent pas à titre
principal sur une créance mais dont l'équilibre même suppose la cession
concomitante des accessoires.
On ne pourrait par conséquent que regretter une application trop étendue
de la règle de forme, qui par sa rigidité empêcherait de « sauver » la cession
de créances accessoires éventuellement omises comme le fait aujourd'hui
avec bonheur la théorie de l'accessoire.
199. L'ordonnance, dans le troisième alinéa de l'article 1323, définit enfin un
cas particulier : celui de la cession de créance future. Dans ce cas, la date
du transfert est celle de la naissance de la créance, « tant entre les parties que
vis-à-vis des tiers ».
Dans ce cas particulier, le débiteur doit être considéré comme mis au rang
des tiers : c'est le seul cas dans lequel, désormais, la date d'opposabilité de
la cession leur sera commune.

2. L'opposabilité au débiteur (C. civ., art. 1324, nouveau)
200. Pour le débiteur, sauf le cas particulier de la cession de créance future, l'opposabilité de la cession de créance est désormais organisée par l'article
1324 du Code civil qui, dans son premier alinéa, envisage trois hypothèses
: celle où le débiteur a préalablement consenti à la cession, celle où elle lui
a été notifiée, et enfin celle où il en a pris acte.
De fait, ces trois hypothèses ne s'éloignent guère de l'ancien mécanisme de
l'article 1690 du Code civil, l'authenticité en moins.

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