Expertise notariale - Un an d'application de la réforme des contrats. Quel impact sur la pratique notariale ? - 2017-2018 - 1er - 166

166 UN AN D'APPLICATION DE LA RÉFORME DES CONTRATS

Il eut toutefois été opportun que cette inopposabilité des exceptions tenant
à l'obligation éteinte soit plus lisiblement énoncée à la faveur de la réforme.
Elle nous semble devoir être retenue car elle participe de la nature même
de l'institution novatoire.
250. Disparition des accessoires et réserve des sûretés. - C'est au contraire expressément qu'est affirmé le principe d'une disparition des accessoires de la
créance novée et donc des sûretés la garantissant (art. 1334, al. 1er : « L'extinction de l'obligation ancienne s'étend à tous ses accessoires » ; art. 1335, al. 1 : « La
novation convenue entre le créancier et l'un des codébiteurs solidaires libère les
autres ») : c'est pour cette raison que la novation constitue bien souvent le
« cauchemar » de tout prêteur.
Que ce dernier se rassure cependant : en effet et par exception au principe
de disparition des accessoires, l'article 1334 alinéa 2 nouveau énonce que,
« par exception, les sûretés d'origine peuvent être réservées pour la garantie de la nouvelle obligation avec le consentement des tiers garants ». Cette disposition ne distinguant pas (ubi lex) peut s'appliquer à des sûretés réelles comme personnelles.
Le législateur a en effet d'abord entendu reconduire ici les indispensables
mécanismes de réserve des sûretés réelles prévus aux articles 1278 et 1279
actuels du Code civil, quoique trop synthétiquement.
Ainsi, l'article 1278 du Code civil reconnaissait de longue date aux parties13,
en cas de novation par changement d'objet ou par changement de
créancier14, la liberté de reporter une sûreté, même légale, sur une dette
nouvelle au moyen d'une simple stipulation de « réserve » des sûretés
venant déroger de façon remarquable au principe de l'extinction accessoire des sûretés consécutive à l'extinction de la créance novée15.
La solution était d'autant plus intéressante que si la réserve devait en principe être expresse et intervenir au plus tard au moment de la novation, la
jurisprudence paraissait admettre une réserve tacite dans l'hypothèse où
des créances garanties par des sûretés réelles entreraient en compte courant : la volonté de reporter des sûretés sur le solde en dépit de l'effet novatoire du compte courant semble alors assez facilement reconnue16.
Quoique affectée à la garantie d'une créance nouvelle, les privilèges et
13. Et non au seul créancier contrairement à ce que laisse entendre le texte de l'article 1278 du
Code civil ; le consentement du constituant est donc logiquement exigé : J. François, Droit
civil, t. 4., Les obligations, Régime général, Économica, 2000, nº 116.
14. M. Dagot, La novation par changement de débiteur et le droit hypothécaire, JCP 1975, I,
2693, nº 4-6.
15. C. civ. Art. 1278 : « Les privilèges et hypothèques de l'ancienne créance ne passent point à celle qui lui est
substituée, à moins que le créancier ne les ait expressément réservés ».
16. Cass. com., 10 juin 1949, Bull. civ. IV, nº 225 ; JCP 1949, II, 5106, note R. Cabrillac, envisageant
la possibilité d'une volonté tacite de report ; J. Mestre, E. Putman et M. Billiau, préc., nº 1098
et note 159.

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