Expertise notariale - Un an d'application de la réforme des contrats. Quel impact sur la pratique notariale ? - 2017-2018 - 1er - 182

182 UN AN D'APPLICATION DE LA RÉFORME DES CONTRATS

Chapitre II
La formation du contrat
Section I
La conclusion du contrat
263. Relativement à la conclusion du contrat, deux dispositions légales intéressent particulièrement les libéralités.
Primo, l'article 1120 du Code civil rappelle le principe séculaire selon lequel
le silence ne vaut pas acceptation3, sauf les cas où « la loi, des usages, des relations d'affaires ou des circonstances particulières » donnent au silence la valeur
d'une acceptation.
L'application de ce texte aux donations ne pose guère de difficultés : on
imagine mal une donation se conclure avec un donataire qui demeurerait
silencieux. Elle est moins évidente en matière de testament : il n'est pas
rare, en effet, que le légataire soit réputé acceptant malgré son silence,
par exemple lorsqu'il a pris possession des objets légués. Mais la clause
générale renvoyant aux « circonstances particulières » pourrait néanmoins justifier que l'on retînt aisément l'acceptation d'un légataire silencieux.
264. Secundo, l'article 1121 nouveau vient clore la vieille querelle sur le moment
et le lieu de conclusion du contrat entre absents en optant pour la théorie
de la réception : le contrat n'est parfait qu'au moment où l'acceptation parvient à l'offrant.
La solution n'est pas pleinement identique pour les donations notariées.
Procédant à une interprétation littérale de l'article 932 du Code civil, la
jurisprudence distingue la situation du donateur de celle du donataire : à
l'égard du donateur, la donation se forme au jour de la notification de l'acceptation (art. 932) ; mais, à l'égard du donataire, elle se forme dès son
acceptation4. Il y a donc un risque qu'entre l'acceptation et la notification,
le donateur et le donataire disposent chacun valablement du bien donné.
Sur un plan pratique, les choses se passent ainsi : la volonté du donateur est
recueillie dans l'acte donation, mais celui-ci prévoit que le donataire, non
présent, acceptera plus tard. La manifestation de volonté du donataire sera
ensuite recueillie dans un acte subséquent, lequel devra être notifié au
donateur. Jusque-là, rien d'anormal : il faut bien que le donateur soit tenu
informé de ce que la donation emporte tous ses effets. Simplement, jusqu'à
ce que la notification parvienne au donateur, le donateur comme le donataire peuvent se rétracter, indépendamment des consentements que
3. Cass. civ., 25 mai 1870, GAJC, 11e éd., nº 147 : « en droit le silence de celui qu'on prétend obliger ne
peut suffire, en l'absence d'autre circonstance, pour faire preuve contre lui de l'obligation alléguée ».
4. V. not. Cass. req., 4 mars 1902, D. 1902. 1. 214 ; S. 1902. 1. 161, note C. Lyon-Caen.

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