Expertise notariale - Un an d'application de la réforme des contrats. Quel impact sur la pratique notariale ? - 2017-2018 - 1er - 53

LE CONSENTEMENT ET LA CAPACITÉ 53

62. Les tentatives de désamorçage sont nombreuses46.
La tentation est ainsi grande d'éviter le jeu de la disposition nouvelle en
considérant le droit spécial des sociétés comme un obstacle à l'intrusion
de la disposition nouvelle. Certains auteurs insistent sur le fait que la règle
nouvelle est posée « dans le respect des règles applicables à chacune - des personnes
morales » pour suggérer que « les auteurs de l'article 1145 alinéa 2 - ont -
entendu opérer une simple référence aux droits spéciaux »47.
L'incertitude demeure cependant48, même si l'on ne peut qu'approuver la
tentative d'évacuer une disposition pouvant engendrer l'insécurité dans les
rapports contractuels. L'article 1145 alinéa 2, disposition participant du
droit commun des contrats, s'applique par principe à toutes les personnes
morales, notamment aux sociétés. Le droit spécial peut paralyser la vocation résiduelle du droit commun en adoptant une disposition particulière
et dérogatoire. Cependant, les dispositions du droit des sociétés, quand
elles prennent pour guide l'objet et l'intérêt social, traitent de questions
de pouvoir, non de capacité. On peut craindre, dès lors, que rien, dans le
droit spécial, à la différence de la loi de 1901 pour les associations49,
n'évince la disposition générale.
Les parlementaires pourraient être séduits par l'idée d'utiliser le véhicule
de la loi de ratification pour gommer une disposition qui engendre une
grande inquiétude.

46.
47.

48.

49.

2014, nº 13-17347, D. 2015, p. 996, obs. T. Gauthier ; Cass. 3e civ., 12 sept. 2012, nº 11-17948, BJS
déc. 2012, p. 474, note D. Poracchia ; comp. Cass. com., 12 mai 2015, nº 13-28504, RDC sept.
2016, p. 479, note L. Sautonie-Laguionie et G. Wicker ; BJS déc. 2015, p. 650, note R. Mortier ;
p. 609, note P. Dupichot ; Dr. sociétés 2015, nº 147, obs. M. Roussille (arrêt rendu à propos
d'une société à responsabilité limitée) ; adde S. Schiller, N. Ducrocq-Picarrougne et L. Cayet,
Le cautionnement par des sociétés civiles ou commerciales dans les groupes familiaux, JCP
N 2015, 1100). Sur le rapprochement de la condition posée à l'article 1145 alinéa 2 et l'intérêt
social, v. M. Mekki, Les incidences de la réforme du droit des obligations sur le droit des sociétés : rupture ou continuité, Rev. sociétés 2016, 483, nº 23 ; J.-F. Barbieri, Capacité des sociétés à
s'engager et utilitarisme, BJS, juill.-août 2016, p. 369.
V. K Rodriguez, Art. préc. ; V. Thomas, Art. préc.
B. Dondero, Capacité et représentation des sociétés, BJS, sept. 2016, p. 510. Sur l'articulation
du général et du spécial, v. J. Mestre, Petit abécédaire de la réforme des contrats et des obligations, préc. ; H. Barbier, Les grands mouvements du droit commun des contrats après l'ordonnance du 10 février 2016, RTD civ. 2016, p. 247.
V. P. Mousseron, Le nouveau régime de la capacité contractuelle des sociétés, D. 2016, p. 906 ;
B. Dondero, op. cit., nº 22 ; S. Porcheron, Quelques questions quant à la portée de la réforme
du droit des obligations sur les SCI, AJDI 2016, p. 343.
Sur ce point, K. Rodriguez, préc., nº 8.

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