Expertise notariale - Un an d'application de la réforme des contrats. Quel impact sur la pratique notariale ? - 2017-2018 - 1er - 90

90 UN AN D'APPLICATION DE LA RÉFORME DES CONTRATS

Par exemple, lorsque celui qui devait solliciter un prêt bancaire ne l'a pas
fait14 ou l'a sollicité à des conditions qu'il savait ne pas pouvoir être acceptées par la banque15.

Précision pratique
Sur un plan pratique, on rencontre bien plus souvent des conditions suspensives plutôt que résolutoires : la raison en est fiscale. Un acte sous
condition suspensive est enregistré au droit fixe, puisque l'exécution de
l'obligation est suspendue à un événement incertain, tandis qu'un acte
sous condition résolutoire prend immédiatement effet, entraînant l'exigibilité des droits dans le délai légal : délai, qui, pour une vente immobilière, ressort à un mois à compter de la signature.
Sur le plan des conditions, la réforme n'a pas fait œuvre nouvelle et
demeure d'une parfaite orthodoxie : ainsi, il n'est toujours pas possible
d'ériger en condition un élément de formation du contrat.
C'est la raison pour laquelle il n'est donc pas possible de signer une promesse de vente avec un vendeur incapable, sous condition suspensive de
l'autorisation du juge des tutelles. En effet, s'agissant du consentement
même à l'aliénation, cet élément ne peut être conditionnel.
Aucune promesse de vente ne peut en principe être régularisée tant que
le juge des tutelles n'a pas donné son accord à l'aliénation du bien. Mais
cet accord peut parfois, suivant la charge de travail des tribunaux, n'être
obtenu qu'au bout de six mois. Par conséquent, il est impossible de lier
efficacement un quelconque acquéreur pendant cette durée, lequel se
voit pourtant généralement réclamer par sa banque une promesse de
vente pour constituer le dossier de prêt.
Ajoutons maintenant que nombre de juges des tutelles, plus férus d'efficacité que de l'orthodoxie du droit des obligations, exigent également
une promesse de vente pour prendre leur décision, et l'on comprend
alors que la situation ne se signale pas par sa cohérence.... Il eût été
opportun que le législateur donne un petit coup de canif à ce principe
d'impossibilité des conditions liées au consentement pour admettre,
lorsque les circonstances le commandent, une condition liée à l'accord
du juge des tutelles.
Quant à la réalisation de la condition, l'article 1304-3 énonce, sans surprise, que la condition est réputée défaillie si son accomplissement a été
provoquée par la partie qui y avait intérêt.
14. Cass. 3e civ., 24 sept. 2008, nº 07-13989, RTD civ. 2008. 675, obs. B. Fages.
15. Pour d'autres exemples, v. Fr. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Les obligations, Dalloz, 11e éd.,
2013, nº 1227.

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