Doctorat & Notariat - Tome 60 - La fiducie : aspects juridiques et fiscaux - 105

DES APPLICATIONS LIMITÉES DE LA PROPRIÉTÉ FIDUCIAIRE

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209. La fiducie-sûreté aurait sans doute pu être adoptée dans le cadre de la
réforme du droit des sûretés puisqu'elle faisait initialement partie du champ
d'étude de la commission Grimaldi, à laquelle était confiée la mission de préparer
l'avant-projet. Ce texte prévoyait notamment de consacrer les propriétés-sûretés,
tant la propriété retenue que la propriété cédée à titre de garantie, soit respectivement la clause de réserve de propriété123 et la déjà fameuse fiducie-sûreté124. Mais,
la chancellerie retira la fiducie-sûreté des attributions de la commission Grimaldi
au motif que la rédaction d'un autre avant-projet de texte relatif au régime général de la fiducie allait être confiée à une autre commission placée sous l'égide
conjointe de la Chancellerie et du Ministère de l'Économie et des Finances, à
partir de la proposition de loi déposée en 2005 par le sénateur Marini125.
210. Un an après, alors que la fiducie semblait oubliée, elle se trouva par les
hasards du calendrier parlementaire inscrite à l'ordre du jour du Sénat. Il était important de ne pas passer à côté de cette opportunité. Aussi le gouvernement passa-t-il des
consignes claires aux parlementaires afin que le texte fût adopté avant la fin de la
session parlementaire, quitte à en sacrifier l'équilibre et la cohérence. L'impératif était
donné : doter la France d'une fiducie, quitte à ce que celle-ci fût l'objet de modifications ultérieures. En effet, les échecs répétés de l'adoption des différents textes relatifs
à la fiducie faisaient craindre au gouvernement que des discussions trop longues
eussent une fois encore raison de sa consécration en droit français. C'est dans ce
contexte particulier que la fiducie fut adoptée par la loi de 2007.
211. Ce texte est passé au crible de la doctrine126 qui l'a rapidement jugé
imparfait et lacunaire. De nombreux auteurs ont notamment focalisé leurs critiques sur le choix du législateur de consacrer un régime général du contrat de
fiducie applicable indifféremment à la fiducie-gestion comme à la fiducie-sûreté,
contrairement à la proposition de loi faite par le sénateur Marini127. S'il a pu
apparaître judicieux au législateur de consacrer un acte unique de fiducie avec un
123. La loi  du 26  juillet  2005 a habilité le gouvernement à légiférer par ordonnance pour
réformer le droit des sûretés. L'ordonnance du 23 mars 2006 a ainsi intégré pour la première fois des
dispositions relatives à la propriété-sûreté dans le Code civil, relatives à la clause de réserve de propriété
dans un chapitre IV intitulé « Dispositions relatives à la propriété retenue à titre de garantie » au sein
d'un sous-titre II, du titre II du Livre IV, consacré aux sûretés.
124. P. Crocq, « Lacunes et limites de la loi au regard du droit des sûretés », D. 2007. 1354 : « Sa
place au sein du Code civil avait été facilement trouvée puisque, là où il est fait aujourd'hui seulement état
de la propriété retenue à titre de garantie, l'avant-projet du droit des sûretés se proposait de traiter de la
propriété cédée ou retenue à titre de garantie et la commission avait commencé à élaborer une
réglementation de la fiducie-sûreté ». V. égal. y.  Picod, Droit des sûretés, 3e  éd, PUF, 2016, n°  401,
p. 508 ; v. égal. P. Crocq, « La réforme du droit des sûretés mobilières », dans Le droit des sûretés à
l'épreuve des réformes, EJT 2006, p. 17 ; D. Legeais, « La réforme du droit des garanties ou l'art de mal
légiférer », Mélanges Simler, Litec-Dalloz, 2006, p. 367.
125. P. Crocq, « Lacunes et limites de la loi au regard du droit des sûretés », D. 2007. 1354 ;
D. Legeais, « Ordonnance portant diverses mesures relatives à la fiducie », RTD com. 2009. 426 : « La
méthode utilisée a été en elle-même calamiteuse. Le comité Grimaldi a été privé du droit d'intervenir de
même qu'il était privé du droit de s'intéresser au droit des procédures collectives ».
126. y. Picod, Droit des sûretés, op. cit., n° 402, p. 508 ; M. Cabrillac, C. Mouly, S. Cabrillac
et P. Petel, Droit des sûretés, 10e éd, LexisNexis, 2015, n° 594, p. 441 ; Ph. Malaurie et L. Aynès et
P. Crocq, Les sûretés, La publicité foncière, 11e éd., 2017, n° 775, p. 457. V. égal. : Ch. Larroumet, « La
loi du 19 février 2007, propos critiques », D. 2007. 1350 ; F. Barrière, « La loi instituant la fiducie :
entre équilibre et incohérence », JCP  E, n°  36, 6  sept.  2007, p.  13 ; J.  Bertran de Balanda et
A. Sorensen, « La fiducie : un enfer pavé de bonnes intentions », RLDA, juin 2007, n° 17, p. 35-40.
127. P. Crocq, « Lacunes et limites de la loi au regard du droit des sûretés », D. 2007. 1354 ; du
même auteur, « Le cœur du dispositif fiduciaire », RLDC juill.-août 2007, n° 40, p. 64 : « Le législateur
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