Doctorat & Notariat - Tome 60 - La fiducie : aspects juridiques et fiscaux - 173

LA DISSOCIATION DE LA PROPRIÉTÉ FIDUCIAIRE PAR L'ANALySE ÉCONOMIQUE

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SECTION II
DE LA NEUTRALITÉ FISCALE
À LA NEUTRALITÉ COMPTABLE
436. La doctrine fiscale84 est longtemps restée muette sur le traitement fiscal
applicable à la fiducie85. Pourtant comme l'a souligné, par ces mots, Dominique
Schmidt, « l'avenir de l'institution (fiduciaire) dépend d'abord de son traitement
fiscal... »86. Ainsi pour éviter que la fiscalité ne vienne tuer la fiducie dans l'œuf,
Claude Witz a préconisé dès 1981, de prendre en compte la spécificité de l'opération fiduciaire. Celle-ci se caractérise par des transferts successifs de la propriété.
Or assimiler le transfert fiduciaire à une mutation à titre onéreux de droit commun87 enlèverait toute attractivité à ce nouvel instrument. Il apparaissait alors
indispensable de soumettre le transfert fiduciaire à un régime de neutralité fiscale88. Nous envisagerons ainsi successivement la neutralité fiscale (§1) et la neutralité comptable (§2).

§ 1. LA NEUTRALITÉ FISCALE,
PRINCIPE DIRECTEUR DU RÉGIME FISCAL DE LA FIDUCIE

437. Nous envisagerons ainsi successivement la signification du principe de
neutralité fiscale (A) et ses effets sur le transfert fiduciaire (B).
A. LA SIGNIFICATION DU PRINCIPE
DE LA NEUTRALITÉ APPLICABLE À LA FIDUCIE
438. S'il est bien un principe qui revient comme un leitmotiv dans les différents commentaires relatifs aux aspects fiscaux de la fiducie, c'est bien celui de
« neutralité fiscale ». Mais de quelle neutralité s'agit-il ? Le principe de neutralité
fiscale est souvent utilisé, mais il ne figure pas dans les ouvrages consacrés aux
grands principes du droit fiscal. Il est simplement évoqué dans l'introduction de
l'ouvrage de Jean Schmidt89. Il n'y est fait aucune référence dans les Grands principes de la fiscalité de l'entreprise90. Pourquoi une telle indifférence de la doctrine
84. La doctrine, en matière fiscale, s'entend de l'ensemble des travaux menés sur la matière, soit
des « opinions émises par leurs auteurs dans leurs ouvrages » (J.  Carbonnier, Droit civil, t.  1, PUF,
p. 162) auxquels il faut ajouter les conclusions des Commissaires du gouvernement qu'ils produisent
devant les juridictions administratives, mais également de l'ensemble des informations fournies par
l'Administration fiscale elle-même dont le rôle normatif est, à cet égard, exceptionnel
(cf. P. Marchessou, L'interprétation des textes fiscaux, Economica, 1980).
85. J.  Meurant, « Les opérations fiduciaires en droit fiscal français », dans Les opérations
fiduciaires, colloque de Luxembourg des 20 et 21 septembre 1984, LGDJ, FEDUCI, 1985, p. 171-186.
86. D. Schmidt, in préface C. Witz, La fiducie en droit privé, Economica, 1981, p. VI.
87. C. Witz, La Fiducie en droit privé français, Economica, 1981, n° 318, p. 300 : « Mais dans la
mesure où cette institution n'a pas été consacrée, dans l'ensemble de ses applications, par le législateur ou
la jurisprudence, il est possible que l'administration fiscale ne reconnaisse pas la spécificité de la fiducie
et, par là même, qu'elle assimile l'aliénation fiduciaire à une mutation onéreuse ordinaire ».
88. C. Witz, La Fiducie en droit privé français, Economica, 1981, n° 333, p. 314 : « seul le droit
fiscal est susceptible d'entraver le développement de la fiducie : si la spécificité de l'opération fiduciaire
n'était pas reconnue dans cette branche du droit, plusieurs applications importantes de l'institution
seraient condamnées. Il importe donc que la neutralité fiscale de la fiducie soit admise ».
89. J. Schmidt, Les principes fondamentaux du droit fiscal, Dalloz, 1992, p. 7.
90. M. Cozian, Les grands principes de la fiscalité des entreprises, 4e éd., Litec, 1999. p. 871.
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