Doctorat & Notariat - Tome 61 - Les libéralités à caractère collectif - 80

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LES LIBÉRALITÉS À CARACTÈRE COLLECTIF

motivation ne saurait constituer sa contrepartie119, ni davantage faire échec à la
reconnaissance d'une intention libérale120. La personne publique, bien que
consciente de son sacrifice, n'en poursuit pas moins la réalisation de son propre
intérêt comme le ferait une société commerciale qui participe à des opérations
de mécénat. L'opération peut alors être qualifiée de libéralité. La forme de la
donation varie alors. En matière de cessions à vil prix, il s'agit de donations
indirectes121. Pour les subventions, la qualification n'est pas unitaire selon
qu'elles sont attribuées par un acte unilatéral - donation indirecte122 - ou par
une convention - donation ostensible sous seing privé123. Autre particularité : il
n'est pas rare que les libéralités, concédées par voie de subventions, soient à
exécution successive124.
Ainsi, rien n'interdit la reconnaissance des libéralités en droit public. Une
telle solution a déjà été soutenue par plusieurs auteurs tant publicistes125 que privatistes126. Finalement, selon l'un d'entre eux, il n'est « plus possible en l'état du
119. Comp. A. Foubert, « Les contraintes pesant sur le juge, l'exemple du droit du don », Droits
2011, n° 54, p. 95 et s. Selon l'auteur, « en réalité l'étude de la jurisprudence révèle que les contreparties
dont le juge fait, le cas échéant, le constat ne sont pas des contreparties qui viennent balancer
l'appauvrissement de la personne publique mais plutôt des garanties ».
120. Comp. R. Hertzog, art. précité, spéc. p. 18, pour lequel la poursuite de l'intérêt général est
compatible avec l'intention libérale.
121. En droit civil, les cessions à vil prix peuvent être considérées comme des donations indirectes
et requalifiées par le juge. V. F. Terré, Y. Lequette et S. Gaudemet, Droit civil : Les successions, les
libéralités, 4e éd., Paris, Dalloz, 2014, coll. « Précis. Droit privé », n° 573, p. 513. À défaut, elles sont
nulles comme le rappelle le nouvel article 1169 du Code civil.
122. Sur celles-ci, V.  infra, n°  324. Comp.  R.  Hertzog, art.  précité, spéc.  p.  41, selon lequel
lorsque la subvention est octroyée par l'intermédiaire d'un acte juridique unilatéral, il est possible de
s'interroger sur le point de savoir si la subvention ne revêt pas une forme contractuelle.
123. Ce qui sera généralement l'hypothèse. Sous l'empire du droit antérieur, rien n'obligeait la
personne publique à passer un contrat avec le récipiendaire de la subvention. Le contrat est considéré
comme « singulièrement plus contraignant que l'acte unilatéral » (V. M. Karpenschif, « Contrats
publics et subventions », CPACCP  2008, n°  73, p.  52 et s ; Ph.  Ligneau, « Les conventions des
collectivités locales avec le secteur social privé », AJDA  1985, p.  4 et s.). Désormais, il existe une
« exigence quasi-généralisée d'une convention » (V. L. Idoux, art. précité). La loi impose, en effet,
la rédaction d'un instrument revêtu de certaines mentions lorsque les « autorités administratives »
versent « des subventions pour un montant annuel supérieur ou égal à  23 000 euros » sans
considération de la nature de l'organisme de droit privé bénéficiaire (L.  n°  2000-321 du 12  avril
2000, art. 10, al. 4. Adde D. n° 2001-495 du 6 juin 2001, art. 1er). En matière de subventions aux
associations, différentes circulaires du Premier ministre sont intervenues pour encadrer strictement
ces relations et les conventions auxquelles elles donnent lieu entre les collectivités publiques et les
associations (V. Circ. du Premier ministre du 24 décembre 2002 (JO. 27/12/2002) ; Circ. du Premier
ministre du 16 janvier 2007 (Circ. n° 5193/SG) ; Circ. du 18 janvier 2010 (JO. 20/01/2010 p. 1138 ;
Circ. du Premier ministre du 29  septembre  2015 (n°  5811/SG). Pour une étude, V.  J.  Moreau,
« Quelle procédure suivre pour accorder des subventions aux associations ? », JCP A 2003, 1184.
124. Elles ne sont pas méconnues du droit civil. Le caractère actuel de la donation est compatible
avec un paiement non immédiat (V.  1re  civ., 22  février 2005, n°  03-14.111, Bull.  civ.  I, n°  91 ;
RTD civ. 2005, p. 443, obs. M. Grimaldi ; RLDC 2005, n° 16, p. 50, obs. F. Leandri). S'agissant des
subventions, en pratique les conventions conclues sont généralement pluriannuelles, car elles sont
« plus aptes à renforcer l'efficacité globale du financement » (V. J.-M. Pontier, « Relations financières
pouvoirs publics-associations », JCP A 2010, act. 88).
125. V. R.  Hertzog, art.  précité, spéc.  p.  19 ; M.  Bazex, art.  précité ; G.-J.  Guglielmi,
« Reconnaissance et usages de la gratuité en droit public », in N. Martial-Braz et C. Zolynski (dir.),
La gratuité, un concept aux frontières de l'économie et du droit, Issy-les-Moulineaux, LGDJ, 2013,
p. 105 et s., spéc. p. 115. Comp. A. Foubert, Le don en droit, op. cit., nos 251 et s., p. 235 et s.
126. V. M.  Planiol, D.  1895, 1, p.  217. Adde  M.  Grimaldi, Droit civil : Libéralités, partages
d'ascendants, Paris, Litec, 2000, n° 1677, p. 500, note n° 32, qui considère les subventions publiques
comme des « sortes de libéralités ».
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