Doctorat & Notariat - Tome 63 - Étude comparative du rôle du juge dans l'interprétation des contrats - 351

LA DÉTERMINATION DE L'ÉQUILIBRE MINIMUM PAR L'INTERPRÉTATION

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juridique163, ne permettent pas un éclairage suffisant quant au rôle efficace de la
bonne foi en la matière. Le juge doit la prendre en compte dans l'exécution du
contrat, mais il n'apparaît pas que celle-ci soit un critère efficace de résolution du
problème de l'imprévision. Aussi le juge doit-il se tourner vers d'autres notions,
notamment la cause.
3. Cause et durée du contrat
476. Envisager la cause ici peut sembler inapproprié. En effet, la question
peut se poser au regard du droit comparé puisque la notion n'a pas, semble-t-il,
quant à sa fonction et à sa complexité, d'équivalent hors de nos frontières. De
plus, les Principes de droit européens du contrat ne lui accordent aucune place,
lorsqu'ils déterminent la matière du contrat164. C'est pourquoi, dans une optique
d'harmonisation des droits européens, nous pouvons dire que celle-ci est plutôt en
voie de disparition165. Mais à y regarder de plus près, celle-ci semble trouver une
« seconde jeunesse » : d'une part, en droit interne, du fait de l'utilisation par le
juge de la notion en tant qu'instrument de justice contractuelle166, voire d'une
certaine extension de son champ d'application, celle-ci semblant avoir dépassé la
frontière de la formation du contrat167 ; d'autre part en droit comparé puisque,
ainsi que nous l'avons déjà montré, il existe des rapprochements entre la cause et
la consideration168 du Common law mais également, entre la cause et la théorie du
fondement contractuel (Geschäftsgrundlage) en droit allemand. N'y aurait-il pas
alors, risque de prolifération ?
477. La durée du contrat participe de cette évolution de la notion de cause
en ce que plus la relation contractuelle est longue, plus le danger de déséquilibre
du contrat est grand ; il peut alors être intéressant d'envisager la cause, comme un
remède possible à l'imprévision, notamment en tant qu'intérêt au contrat et à
l'aide de la nouvelle émanation de la cause : l'économie du contrat. Le juge ne
pourrait-il, à l'aide de ces instruments, apporter une solution à l'imprévision ? Il
s'agirait de dire, que la prestation de la partie lésée est tellement insupportable
163. Pour reprendre l'expression de M. Pédamon : « principe général d'éthique juridique », in Le
contrat en droit allemand, LGDJ, 2e éd. 2004, p. 131.
164. V. le constat dressé par D. Mazeaud : « La matière du contrat », in L es concepts contractuels
français à l'heure des Principes de droit européen des contrats, Dalloz, 2003, p. 87, n° 13.
165. Nous constatons que tant dans les règles de droit international que dans les codifications
doctrinales européennes, la cause est absente des dispositions, il en est ainsi pour : les Principes
Unidroit du commerce international qui ne traitent pas de la moralité du contrat (Chap. 3, PU) , de
l'avant-projet de Code européen des contrats de M. Gandolfi qui exclut « les renvois à des notions
traditionnelles ou bien élaborées par la doctrine » et des Principes droit européen du contrat de la
commission Lando dont l'article 4 :101 du chapitre sur la validité « ne traite pas des contrats illicites
ou immoraux », ce qui suscite des questions : V. J.  Ghestin, « Faut-il conserver la cause en droit
européen des contrats ? », ERCL, 2005, p. 396.
166. V. la jurisprudence précitée et les articles de J.-P. Chazal, « Théorie de la cause et justice
contractuelle », JCP éd. G. 1998, I, 152 ; J.-M. Guéguen, « Le renouveau de la cause en tant qu'instrument
de justice contractuelle », D. 1999, chron. p. 352 ; J. Ghestin, « En relisant "de la cause des obligations"de
Henri Capitant », Mél. J.-L. Aubert, Dalloz, 2005, p. 115, et les thèses de J. Rochfeld, Cause et type de
contrat, préf. J. Ghestin, LGDJ, 1999 et de E. Mouial-Bassilana, Le renouveau de la cause en droit des
contrats. Essai de mise en lumière d'une conception objective du contrat, Nice, 2003.
167. V. à ce sujet la thèse d'A. Cermolacce, Cause et exécution du contrat, préf. J. Mestre, PUAM,
2001.
168. A ce sujet : R. David, « Cause et consideration », Mél. J. Maury, t. II, 1960, Dalloz-Sirey,
p. 111 et s. ; B.-S. Markesinis, « La notion de consideration dans la Common Law. Vieux problèmes et
nouvelles théories », RIDComp. 1983, p. 735.
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