Expertise Notariale - Les baux commerciaux - 5e - 24

24 LES BAUX COMMERCIAUX

plus réticents et exigent une manifestation de volonté expresse, motivation
qui leur vaut parfois que leurs décisions soient cassées en cas de pourvoi55.
La tendance récente semble aller vers plus de rigidité, une manifestation de
volonté apparemment claire envers le statut des baux commerciaux étant
finalement tenue pour insuffisante56. Les parties peuvent par exemple préférer l'application du statut des baux commerciaux à l'application de la loi
du 1er septembre 1948, dont le statut locatif est pourtant impératif57, ou
étendre conventionnellement le régime du bail commercial à un bail
professionnel58 autrement régi par les articles 57 A de la loi du 23 décembre 198659, et les articles L. 631-7 s. du Code de la construction et de
55. V. par exemple Cass. 3e civ., 5 juill. 1995, Bull. civ. III, no 165, RDI 1995, p. 805, obs. J. DERRUPPÉ ;
v. aussi J. LAFOND, « L'application volontaire du statut des baux commerciaux aux "professionnels" après la loi LME », JCP N 2008, 1311, spéc. no 27.
56. V. Cass. 3e civ., 20 oct. 2016, nº 15-20285, D. 2016, p. 2214, Defrénois 2017, nº 27, p. 30 et la
note ; jugé que la mention dans la convention selon laquelle « le preneur bénéficiera du statut de la propriété commerciale » ainsi que la référence aux règles du Code de commerce ne
suffisent pas à caractériser une renonciation en toute connaissance de cause et dépourvue
d'ambiguïté aux dispositions d'ordre public de l'article 57 A de la loi du 23 décembre 1986
permettant de rompre le bail à tout moment par congé donné par LRAR.
57. V. par exemple Cass. 3e civ., 20 déc. 1989, RTD com. 1991, p. 182, obs. M. PÉDAMON ; Paris,
22 oct. 1991, D. 1992, somm. p. 368, obs. L. ROZÈS ; en faveur de la possibilité pour les parties
d'écarter les dispositions de la loi du 1er sept. 1948 au profit de celles du statut, v. F. AUQUE, Les
baux commerciaux, LGDJ, 1996, no 52.
58. Ne constitue pas un bail la convention des parties qui ne permet pas la jouissance exclusive
des lieux mis à disposition de l'utilisateur ; v. Cass. 3e civ., 11 janv. 2006, Defrénois 2006, p. 721,
note E. SAVAUX. La consécration de l'extension conventionnelle a été réalisée par la loi dite
LME du 4 août 2008, entrée en vigueur le 6 août 2008, nouvel article L. 145-2 du Code de
commerce. La loi du 4 août 2008 a également modifié l'article 57 A en ces termes : « Les parties peuvent déroger au présent article dans les conditions fixées au 7o du I de l'article L. 1452 du Code de commerce » ; le bail doit être à usage exclusivement professionnel ; en cas de
choix du statut des baux commerciaux, celui-ci s'applique en totalité et évince le mini-statut
de l'article 57 A ; sur le nouveau texte, v. J. LAFOND, « L'application volontaire du statut des
baux commerciaux aux "professionnels" après la loi LME », JCP N 2008, 1311, commentaire
qui pointe de nombreuses interrogations. Inversement, si le locataire prétend que le bail professionnel est en réalité un bail commercial, il doit introduire son action dans les deux ans
suivant la date du bail sous peine de prescription, par application de l'article L. 145-60 du
Code de commerce ; v. Cass. 3e civ., 23 nov. 2011, D. 2011, p. 2991.
59. Avant la loi LME du 4 juin 2008, la question était controversée. Certains auteurs (v. par exemple J. GUIREC RAFFRAY, « Feu l'extension conventionnelle du statut des baux commerciaux aux
locations professionnelles », JCP N 2005, 1352) considèrent que l'extension conventionnelle
est impossible, en invoquant un arrêt de Cass. 3e civ., 2 juin 1999, RDI 1999, p. 466, obs.
F. COLLART-DUTILLEUL, qui, certes, a interdit l'extension conventionnelle, mais à propos d'un
bail d'habitation, et non d'un bail professionnel. Mais dès lors qu'aucun arrêt de la Cour de
cassation ne peut être cité à l'appui de l'interdiction expresse de l'extension conventionnelle
du bail commercial à un bail professionnel, et que l'extension a été expressément admise à
propos des baux de la loi du 1er septembre 1948 (v. supra, même paragraphe, et Cass. 3e civ.,
20 déc. 1989, RTD com. 1991, p. 182, obs. M. PÉDAMON ; Paris, 22 oct. 1991, D. 1992, somm.
p. 368, obs. L. ROZÈS), nous considérons que l'extension reste ici possible. Et ce d'autant que
la Cour de cassation l'a expressément admise, dès lors que le bail respecte les dispositions
Expertise Notariale - Les baux commerciaux - 5e

Table des matières de la publication Expertise Notariale - Les baux commerciaux - 5e
