Expertise Notariale - Les baux commerciaux - 5e - 381

LE REFUS DE RENOUVELLEMENT DU BAIL COMMERCIAL 381

logique et favorable au locataire de la rétribution du droit au maintien dans
les lieux, qui souligne son autonomie par rapport à l'indemnité d'éviction :
le droit au maintien dans les lieux est un droit propre et distinct dont la
perte ouvre droit à une indemnisation spécifique, distincte de l'indemnité
d'éviction60.
399. Pas un loyer61. Puisqu'en théorie, le bail a pris fin du fait du refus de renouvellement, l'indemnité d'occupation ne saurait correspondre au montant
du loyer du bail expiré, ni à un quelconque loyer, puisqu'il n'existe plus
aucun contrat de bail entre le propriétaire de l'immeuble et l'ancien locataire. La mise à l'écart du loyer, au profit de la seule valeur locative, a
expressément été consacrée par un arrêt P + B + R + I rendu par la 3e chambre civile le 3 octobre 2007, qui permet cependant aux parties d'en disposer
autrement62. Selon un ancien arrêt rendu par la chambre commerciale le
26 mai 1961 (Bull. civ. III, no 233), l'indemnité d'occupation destinée à compenser le maintien dans les lieux du preneur après expiration du bail doit
correspondre « à la valeur équitable des lieux ». L'indemnité d'occupation
est librement fixée par le juge. Il est d'usage d'appliquer un abattement (en
général de 10 %) en raison de la précarité de la situation du locataire63.
Pourtant, de nombreux arrêts décident que le montant de l'indemnité
d'occupation doit être fixé en fonction de la valeur locative de l'immeuble,
lorsque le bailleur est à l'origine du refus de renouvellement du bail64. Mais

60.

61.
62.

63.

64.

qui se maintient sans droit dans les lieux. À l'évidence, le locataire qui se maintient dans les
lieux dans l'attente du règlement de l'indemnité d'éviction le fait en vertu d'un droit à lui
conféré par la loi, et sans faute.
V. Cass. 3e civ., 30 nov. 2017, nº 16-17686, D. 2017, p. 2476, Defrénois 2018, nº 39, p. 28 et la
note : « le préjudice né de la perte du droit au maintien dans les lieux jusqu'au paiement
de l'indemnité d'éviction est distinct de celui réparé par cette indemnité ».
V. THOMAS-DEGOUY, « Le calcul de l'indemnité d'occupation », AJPI 1989, p. 597 ;
A. GUILLEMAIN, « Le rôle de la Cour de cassation et la valeur locative », AJDI 2003, p. 913.
Cass. 3e civ., 3 oct. 2007, arrêt no 870 FS-P+B+R+I, D. 2007, p. 2602, Defrénois 2008, p. 304 et la
note ; comp. avec Cass., ch. mixte, 9 nov. 2007, arrêt no 258 P+B+R+I, Defrénois 2009, p. 752 et la
note, cité supra, no 16 : « Mais attendu que c'est sans méconnaître les effets de l'annulation du
contrat de bail et dans l'exercice de leur pouvoir souverain d'appréciation que les juges du
fond ont évalué le montant de l'indemnité d'occupation due par l'EURL en contrepartie de
sa jouissance des lieux » ; dans le même sens, v. Cass. 3e civ., 5 sept. 2012, D. 2012, p. 2093. La
motivation semble ne faire de la valeur locative, qui n'est même pas visée, qu'un simple élément
d'appréciation de l'indemnité d'occupation en contrepartie de la jouissance des lieux. En
clair, dans cet arrêt, et contrairement à celui du 3 oct. 2007, la Cour de cassation refuse de
contrôler les méthodes d'estimation auxquelles ont recours les juges du fond pour fixer le
montant de la valeur locative.
V. par exemple, Cass. 3e civ., 21 juin 1978, Bull. civ. III, no 259 ; Cass. 3e civ., 13 avr. 1983, JCP
1983, IV, 189 ; Paris, 27 juin 1997, Loyers et copr. 1998, no 273, arrêt qui retient un abattement
de 30 %.
V. Cass. 3e civ., 11 juin 1997, D. 1997, IR, p. 155, D. aff. 1997, p. 849 ; Cass. 3e civ., 25 juin 1997,
D. aff. 1997, p. 886, Gaz. Pal. 11 sept. 1997, p. 19 ; Paris, 6 févr. 1998, Loyers et copr. 1998, no 68,
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