Les Mélanges - Mélanges en l’honneur de Jean-Paul Decorps - 173

DIDIER NOURISSAT
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notamment qu'elles ne sont pas applicables dans les pays de droit coutumier où
se sont développés les droits collectifs ainsi que les « superpositions » de droits.
C'est en ce sens que ces chercheurs « proposent d'abandonner la conception
selon laquelle le développement économique et social nécessite le remplacement
des droits fonciers locaux par la propriété privée, et de privilégier des politiques
favorisant et accompagnant l'adaptation de ces droits ».
Ils opposent en réalité les promoteurs de la privatisation et ceux de la sécurisation
des droits existants.
Et ils ajoutent qu'alors que « l'on pouvait penser que le paradigme d'adaptation
faisait consensus, les années 2000 ont vu une nouvelle offensive des
politiques systématiques de formalisation et de privatisation des droits, relégitimées
par les évolutions technologiques et les thèses, très discutables, de l'économiste
péruvien Hernando de Soto, qui affirme dans son ouvrage Le mystère
du capital9
que la formalisation des droits est un outil de lutte contre la pauvreté,
en ce qu'il permet aux pauvres d'accéder au crédit, et ainsi de transformer
le « capital mort » que constituent leurs biens, leurs maisons, en « capital
vivant ». Le discours standard devient quasi hégémonique, les critiques et
nuances semblent oubliées. »10
Dans l'ouvrage collectif précité du Comité Technique « Foncier et Développement
», sept éléments clés sont considérés comme nécessaires pour réussir une
politique de formalisation :
1. Décider d'une politique de formalisation nécessite pour les experts de réfléchir
en amont sur l'opportunité de la formalisation en vérifiant qu'elle est
en cohérence avec les autres politiques.
2. Du fait des enjeux de société qu'elles portent, la réflexion sur les politiques
de formalisation suppose des débats élargis et informés sur l'opportunité ou
non de formaliser.
3. Réconcilier légalité et légitimité en reconnaissant les droits existants coutumiers
ou étatiques.
4. Un soutien clair du gouvernement, de la population, de l'administration
foncière, des professionnels du secteur.
5. La construction d'une gouvernance foncière et d'une administration efficace
et transparente des droits enregistrés et un consensus social local sur les
droits enregistrés.
6. Créer les compétences et les fonctions nouvelles pour mettre en œuvre,
accompagner et animer les dispositifs d'enregistrement des droits tant au
niveau national que local.
7. Multiplier les expériences pilotes et les apprentissages.
Si les cinq derniers éléments sont emprunts de réalisme, les deux premiers sont
surprenants et dénotent de la difficulté pour les auteurs de cette étude de reconnaître
que la formalisation des droits est le seul chemin de la sécurisation.
9. H de Soto, The mystery of capital : Why capitalism succeeds in the West and fails everywhere
else, op. cit.
10. Voir l'ouvrage précité du Comité technique « Foncier et développement ».

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