Guide pratique - L'honoraire de l'avocat - 1re - 14

L'HONORAIRE DE L'AVOCAT

à l'avocat par un autre détenteur de la science juridique. Ainsi l'usage est de ne
point solliciter d'honoraires à l'intérieur de la famille judiciaire23. La reconnaissance du confrère-client est très habituellement spontanée. Un cadeau dont la
valeur est en rapport avec le service rendu en constitue le signe matériel. S'il
doit être dérogé à cet usage, il convient d'en prévenir le confrère. Il n'est pas
réservé aux relations internes au barreau. En dehors du remboursement des
débours, il n'est évidemment pas envisageable pour un avocat de solliciter
des honoraires à l'égard d'un magistrat. Ne serait-ce que dans un souci de
maintien de l'indépendance nécessaire entre les deux fonctions. Mais, sauf
exceptions, le même précepte doit être appliqué à l'égard d'un huissier de justice, d'un greffier, voire d'un notaire ou d'un professeur d'université des facultés
de droit. Leurs affaires sont à classer dans l'activité pro bono que tout avocat a le
soin d'assumer comme une charge naturelle et honorifique de son cabinet, ce
qui ne pourra que favoriser la concorde mâtinée de retenue et de distance qui
doit être conservée dans les relations entre ces différents professionnels du
droit. Mais la gratuité ne dédouane en rien l'avocat de ses obligations générales
à l'égard du confrère qu'il défend, et ce même par exemple dans le cadre d'une
instance liée à l'honoraire24.
Parfois de tristes circonstances font que les relations se tendent et conduisent un
avocat à demander à un de ses confrères le règlement d'honoraires. Tel est le
cas dans cette affaire très particulière venue en vain devant la Cour de cassation
et qui met en scène un avocat au barreau de Marseille faisant appel à un avocat
aux Conseils pour former un pourvoi à l'encontre d'une ordonnance de taxe prononcée par le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence. L'avocat
au Conseil d'État et à la Cour de cassation met fin à la collaboration en raison de
divergences avec son client sur l'interprétation de la jurisprudence de la haute
cour. Et les choses se compliquent du fait que l'avocat marseillais se heurte à
des portes closes lorsqu'il sollicite d'autres avocats aux conseils. Le délai pour
le dépôt du mémoire ampliatif avançant, il décide d'assigner le président de
l'ordre des avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation pour obtenir la
désignation en référé d'un confrère pour le représenter. Le président de l'ordre
procède alors à une désignation « sous réserve de lui régler ses honoraires dès
réception de la facture et qu'il soit maître des moyens et de l'argumentation proposée à la Cour de cassation », et en informe l'avocat-client avant même que
l'affaire ne soit plaidée en référé. L'avocat-client conteste ces restrictions au
visa notamment de la Convention européenne des droits de l'homme et du
Pacte international relatif aux droits civils et politiques, mais la Cour de cassation
rejette le pourvoi, validant les restrictions formulées a priori dans la commission
d'office tant pour ce qui concerne les honoraires que l'indépendance intellectuelle. Le président de l'ordre aurait pu insister dans la désignation du confrère
commis sur l'indépendance intellectuelle et laisser de côté la question des
honoraires, en conformité avec nos usages. Mais les relations humaines
sont compliquées et certains, manifestement, par leurs excès de tempérament,
23. J. VILLACÈQUE, « La famille judiciaire », chapitre VI in Droit et déontologie de la profession d'avocat, B. BEIGNIER et
J. VILLACÈQUE (dir.), Gazette du Palais, 2016.
24. G. DEHARO, « Responsabilité de l'avocat qui défend un confrère », Lexbase, 9 juin 2016, page consultée le 22 févr. 2017.

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