Guide pratique - L'honoraire de l'avocat - 1re - 48

L'HONORAIRE DE L'AVOCAT

Rome cette profession, et qui n'avaient en vue que leur propre gloire, et de qui le
mérite n'était que l'ouvrage de l'ambition ».
28 › Flash-back sur Rome. - Presque tout est dit. Au XXIe siècle encore, il pourrait suffire de transposer Domat. Presque disons-nous, car il convient tout de
même de tenir compte des études détaillées des romanistes actuels sur la
question de l'honoraire de l'avocat pendant l'Antiquité59. Antonio Fernández
de Buján, notamment, dans sa belle étude synthétique sur l'avocat à Rome, permet de considérer une vue d'ensemble quant à ces questions60. Sa démonstration est limpide. Si aux débuts de la République romaine le principe de gratuité
était établi dans la conscience sociale, dans la pratique, apparut rapidement
l'usage de l'honorarium, rémunération de l'avocat. Puis, en 204 avant JésusChrist, intervint la Lex Cincia de donis et muneribus61, interdisant aux avocats
de recevoir plus qu'une certaine somme, ce qui démontre la possibilité préalable d'être rémunéré. D'ailleurs si nous nous échappons un instant vers un instrument de culture générale, l'Encyclopédie, nous apprenons que cette loi, plébiscite, sujet d'un livre perdu du jurisconsulte Paulus et commentée par
Fréderic Prummerus, « ordonnait aux avocats de prêter gratuitement leur
ministère au menu peuple, » et avait deux autres chefs, « l'un cassait les donations faites aux avocats lorsqu'elles excédaient une certaine somme ; l'autre
concernait la forme de ces donations ». En effet, après le temps de la pure gratuité, était apparu celui des présents, d'abord volontaires de la part du client,
puis exigés par l'avocat62. Face à cette évolution, notre collègue espagnol
explique qu'au premier siècle de notre ère, s'éleva une polémique devant le
Sénat à l'occasion d'un conflit entre un avocat et son client. Les conservateurs
voulaient revenir au principe initial de gratuité, tandis que d'autres soutenaient
que la rémunération de l'avocat conditionnait intrinsèquement la garantie même
de l'effectivité des droits de la défense, et empêchait que cette fonction ne soit
réservée qu'à un petit nombre de rentiers (constat à rapprocher de la situation
du barreau français jusqu'au début du XXe siècle). Finalement l'empereur Claude
(régnant de 41 à 54), à travers le Senatus-consultum Claudianum, en 47, admit la
rémunération et la limita à dix mille sesterces par cause, et prévit pour les
indisciplinés des peines fixées dans la lex Iulia repetundarum. De même se mit
en place une action procédurale pour juger des réclamations liées aux honoraires selon la cognitio extra ordinem. L'auteur estime que, dès lors, le barreau
s'était considéré comme une profession honorable, dans l'exercice de laquelle
le paiement pour le service rendu cessait d'être déshonorant. Dès la mort
de Claude, les « anciens » revinrent à la charge, mais Néron (régnant de 54 à
59. I. S. MUÑOZ MACHADO (dir.), Historia de la abogacía española, deux vol., Aranzadi Thomson Reuters, Pampelune,
2015. Au-delà de la période antique, cette somme nous permettrait d'ailleurs d'étudier comparativement l'évolution de la question de l'honoraire de l'avocat selon le droit français ou le droit espagnol. Mais ce n'est pas ici le
lieu et nous nous proposons de procéder à cela dans d'autres colonnes. II. J.-L. GAINETON, « Notice bibliographique,
Historia de la abogacia española », Rev. SIHPA, nº 11, 2015.
60. A. FERNÁNDEZ DE BUJÁN, « El abogado en Roma », in S. MUÑOZ MACHADO, op. cit., vol. I.
61. I. JUSTINIEN, Corpus juris civilis (VIe siècle), cinq vol., Lyon, 1575. II. D. GAURIER, Les 50 Livres du Digeste de l'empereur
Justinien (Édition traduite et annotée par), trois vol., La Mémoire du Droit, 2017.
62. D. DIDEROT et J. D'ALAMBERT (mis en ordre par une société de gens de lettres), Encyclopédie ou dictionnaire raisonné
des sciences, des arts et des métiers, t. XX, Pellet, Genève, 1778.

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