Guide pratique - Droit du cautionnement - 1re - 151

LE CONTENTIEUX DU CAUTIONNEMENT

première puisque son objet est identique et que son champ d'application est
plus large.
Le caractère proportionné de l'engagement n'exclut pas le devoir de mise en
garde qui pèse sur le créancier
Ainsi qu'on l'a souligné, lorsque le cautionnement est souscrit par une personne physique au profit d'un créancier professionnel, l'exigence jurisprudentielle de proportionnalité de l'engagement se trouve dépourvue d'intérêt
puisque le législateur a précisément réglementé cette question. Cela ne
signifie pas pour autant que le créancier soit dispensé de tout devoir de
mise en garde lorsque l'engagement de la caution est proportionné. En
effet, le devoir de mise en garde a un objet plus large que la simple proportionnalité de l'engagement. Le créancier demeure ainsi tenu de mettre en
garde la caution contre le risque d'endettement excessif du débiteur
principal263. Bien que la solution soit incertaine264, certains arrêts ont
même admis qu'il appartenait au créancier de mettre en garde la caution
contre les risques inhérents à son propre engagement. La Cour de cassation
a ainsi jugé, dans une espèce où le caractère excessif du crédit n'était pas
invoqué, que « la banque est tenue, à l'égard des cautions considérées comme
non averties, d'un devoir de mise en garde à raison de leurs capacités financières et des risques de l'endettement né de l'octroi du prêt et [...] cette obligation
n'est donc pas limitée au caractère disproportionné de leur engagement au
regard de leurs biens et ressources »265. Même si l'engagement de la caution
est proportionné, la banque demeure tenue d'un devoir de mise en garde. Et
le créancier ne s'en trouve pas exonéré par cela seul que la caution avait
rédigé la mention manuscrite, qu'elle ne pouvait ignorer la substance de
son engagement qu'elle avait plafonné et pour lequel elle avait souscrit une
assurance266.
200 › Présentation du mécanisme légal − Selon les articles L. 332-1 et L. 343-4
du Code de la consommation (ancien article L. 341-4), « un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne
physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au
moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ».
Le législateur a opté pour un mécanisme dont le juriste français est peu familier, la décharge ou la déchéance de l'engagement. Ainsi, contrairement au
mécanisme de la responsabilité civile qui - en théorie - devait conduire le juge
à apprécier le préjudice subi par la caution dont la mesure peut être inférieure
au montant de son engagement, la loi a pris le parti d'une décharge totale de

263. V. supra nº 49.
264. V. récemment, Cass. com., 18 janv. 2017, pourvoi nº 14-20375 ; Cass. com., 15 nov. 2017, pourvoi nº 16-16790.
265. Cass. 1re civ., 14 oct. 2015, pourvoi nº 14-14531 ; v. également : Cass. com., 26 janv. 2010, pourvoi nº 08-70423 ;
Cass. com., 27 nov. 2012, pourvoi nº 11-22706.
266. Cass. 1re civ., 3 juin 2015, pourvoi nº 14-13126, Bull. civ. I, nº 128 ; AJ Contrat 2015, 372, obs. G. MÉGRET ;
D. 2015, Actu. 1268, obs. V. AVENA-ROBARDET ; D. 2015, 2044, note Ch. JUILLET.

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