Guide pratique - Droit du cautionnement - 1re - 178

DROIT DU CAUTIONNEMENT

l'obligation principale. Comme on l'a souligné précédemment, le créancier peut
par exemple être satisfait par compensation ou dation en paiement400. On relèvera toutefois - car l'hypothèse est fréquente en pratique - que lorsque la
créance de la caution est née de la responsabilité du créancier qui a manqué à
ses obligations d'information ou encore de mise en garde, la jurisprudence
écarte le caractère satisfactoire de la compensation. La Cour de cassation juge
en effet que « la compensation opérée entre une créance de dommages-intérêts,
résultant du comportement fautif du créancier à l'égard de la caution lors de la
souscription de son engagement, et celle due par cette dernière, au titre de sa
garantie envers ce même créancier, n'éteint pas la dette principale garantie mais,
à due concurrence, l'obligation de la caution »401. Si le fondement de la solution
demeure incertain, elle n'en mérite pas moins d'être approuvée car la responsabilité du créancier s'apparente davantage, en droit du cautionnement, à une
décharge de la caution.
243 › Date de naissance de la créance de recours − La créance de recours de
la caution naît-elle au jour de la souscription de l'engagement de caution ou au
jour de paiement ? La question n'est pas seulement théorique car sa réponse est
susceptible d'affecter les droits de la caution notamment en cas d'ouverture
d'une procédure collective contre le débiteur principal. Jadis la question était
importante car la qualification de créancier antérieur ou postérieur était déterminante pour prétendre bénéficier d'un traitement préférentiel. La question a
perdu une part de son intérêt car désormais, une créance née postérieurement
à l'ouverture de la procédure ne bénéficie d'un traitement préférentiel que si
elle est utile à la procédure (article L. 622-17 du Code de commerce), et tel
n'est de toute évidence pas le cas de la créance de recours de la caution.
Reste que si la créance de recours naît au jour de l'engagement de la caution, elle
risque fort d'être jugée inopposable à la procédure, pour n'avoir pas été déclarée à
temps, de sorte que la question conserve un intérêt. Or, précisément, la Cour de
cassation juge que la créance de recours de la caution prend naissance à la date
de son engagement402. Cette solution a été très critiquée par la doctrine. Si l'on voulait bien admettre que la créance de recours était subordonnée au paiement, celle
solution pouvait s'expliquer techniquement. Le paiement de la caution s'analysait
comme la réalisation d'une condition qui produisait alors un effet rétroactif au jour
de l'engagement, en application de l'ancien article 1179 du Code civil. La solution
devrait donc être abandonnée car, désormais, la condition n'a plus d'effet rétroactif
(nouvel article 1304-6 du Code civil).
400. V. supra nº 179.
401. Cass. com., 13 mars 2012, pourvoi nº 10-28635, Bull. civ. IV, nº 51, D. 2012, 1579, note P. CROCQ.
402. Cass. com., 1er mars 2005, pourvoi nº 02-13176, D. 2005, 1365, note P.-M. LE CORRE. Un arrêt précédent avait
été rendu en matière de recours contre les cofidéjusseurs : Cass. com., 16 juin 2004, Bull. civ. IV, nº 123, JCP E
2005, chr. 31, obs. M. CABRILLAC ; RTD civ. 2004, 758, obs. P. CROCQ. La solution a été réaffirmée pour le garant
autonome : Cass. com., 19 déc. 2006, Bull. civ. IV, nº 249 ; LPA, 28 déc. 2007, nº 260, 14, obs. S. DELRIEU ; Rev.
proc. coll., 2007, nº 3, p. 9 et p. 145, obs. C. SAINT-ALARY-HOUIN ; RTD com. 2007, 450, obs. A. MARTIN-SERF ; RD
bancaire et fin., 2007, nº 2, 18, obs. D. LEGEAIS ; Banque et droit., 2007, nº 111, 49, obs. F. JACOB ; v. également
dans l'hypothèse du recours exercé par le codébiteur d'une obligation in solidum : Cass. com., 13 oct. 2015,
pourvoi nº 14-10664, Bull. civ. IV, nº 323, D. 2016, 2125, obs. A. LIENHARD.

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