Guide pratique - Droit du cautionnement - 1re - 95

LA CONCLUSION DU CONTRAT DE CAUTIONNEMENT

dirigeant a signé, en cette qualité, l'acte constatant l'opération garantie329. La
Cour de cassation a jugé que cette qualité était présumée constituer un élément
extrinsèque satisfaisant qui ne pouvait être écarté par le juge qu'à la condition,
pour celui-ci de « préciser en quoi la fonction exercée dans la société [...] n'était
pas de nature à compléter le commencement de preuve par écrit »330. Tel est, par
exemple, le cas s'il est établi que la caution n'occupait qu'une fonction purement
théorique au sein de la société331. La présomption est donc simple, supportant la
preuve contraire, mais reste très défavorable à la caution dirigeante qui supporte
le risque de la preuve. Le plus souvent, il suffit donc pour une caution dirigeante
d'avoir apposé sa signature au bas d'un contrat de cautionnement pour que la
preuve de son engagement soit rapportée. Il faut cependant garder à l'esprit que
cette jurisprudence n'aura en pratique que peu d'occasions de s'appliquer, pour
les cautionnements conclus postérieurement à l'entrée en vigueur - le 5 février
2004 - de la loi du 5 août 2003 puisque cette loi vise tous les cautionnements
consentis par une personne physique au profit d'un créancier professionnel.
Un élément de preuve extrinsèque peut aussi être un élément figurant dans
l'acte signé par la caution - l'instrumentum - dès lors qu'il est extérieur à son
engagement - negocium. Il a ainsi été jugé que lorsque le cautionnement figure
au sein d'un acte unique de cession de fonds de commerce et de constitution de
prêt au profit du cessionnaire, le fait que la caution ait apposé son paraphe sur
toutes les pages de l'acte de cession peut constituer un élément extrinsèque établissant la conscience qu'elle avait de la portée de son engagement de caution du
cessionnaire332. Ainsi, antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 1er août
2003, il suffisait au créancier de faire intervenir la caution au contrat de crédit
pour que l'exigence de la mention manuscrite se trouve systématiquement satisfaite : « la mention incomplète portée par la caution au pied de l'acte définissant
précisément l'engagement du débiteur constituait l'élément extrinsèque propre à
compléter le commencement de preuve par écrit »333. Demeure en toute hypothèse
la condition que l'élément extrinsèque soit bien extérieur au negocium334. Il reste
que cette jurisprudence était si favorable au créancier que la portée de l'exigence
de la mention manuscrite était largement réduite, ce qui a sans doute incité le
législateur à développer le formalisme ad validitatem.

329. Cass. com., 19 juin 1990, pourvoi nº 88-14950, Bull. civ. IV, nº 180, JCP G 1990, II, 21578, note D. LEGEAIS ;
Cass. com., 5 mars 2002, pourvoi nº 98-20313.
330. Cass. com., 8 janvier 2002, pourvoi nº 97-22198.
331. V., dans le cas d'une caution vice-président de conseil d'administration âgé et malade, père du président en
exercice : Cass. com., 6 déc. 1994, pourvoi nº 90-17281, Bull. civ. IV, nº 364.
332. Cass. 1re civ., 15 janvier 2002, pourvoi nº 98-22113 et 99-12524, Bull. civ. I, nº 13 (deux arrêts) : « le commencement de preuve par écrit que constitue l'acte de cautionnement irrégulier peut être complété par tout élément
extérieur à l'engagement de caution, fût-il porté dans le même acte » ; Cass. 1re civ., 26 nov. 2002.
333. Cass. 1re civ., 12 mars 2002, pourvoi nº 99-15059, Bull. civ. I, nº 87, RD bancaire et fin., mai 2002, 84, obs.
D. LEGEAIS ; Cass. com., 1er oct. 2002, pourvoi nº 98-23342, Bull. civ. IV, nº 132, cassant un arrêt d'appel ayant
jugé que la preuve du cautionnement n'était pas rapportée, « sans rechercher si cette mention incomplète n'avait
pas été portée par la caution au pied d'un acte définissant l'engagement de la société débitrice et contenant
toutes les précisions sur la portée, la nature et les modalités de remboursement de l'obligation cautionnée ».
334. Cass. 1re civ., 5 mai 2004, pourvoi nº 02-17155, Bull. civ. I, nº 125.

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