Guide pratique - La procédure pénale en droit de la presse - 1re - 117

LES PARTIES AU PROCÈS DE PRESSE

247 › Le mécanisme est donc contraignant pour la victime d'une infraction de
presse ; d'autant plus que celle qui « n'a cité devant la juridiction pénale que
l'un des participants à l'infraction, a épuisé son droit d'agir devant la juridiction
civile, en raison de la même publication, contre les autres participants à cette
infraction désignés par les textes susvisés »219. Il est donc essentiel en pratique
de citer l'intégralité des acteurs devant la juridiction et d'identifier leur fonction
et la qualification juridique qui s'impose.
248 › Nature de la responsabilité : de plein droit. Le directeur de la publication
et, par assimilation, tous les auteurs de premier rang, sont « responsable[s] de
plein droit »220 ; en contrepartie, les personnes concernées peuvent légitimement refuser de publier tout écrit221. Une jurisprudence constante rappelle que
le directeur de publication ne saurait s'exonérer de sa responsabilité en démontrant son absence d'intention, sa propre bonne foi ou encore son impossibilité de
contrôler les informations publiées222. De même il ne peut se défendre en expliquant qu'il n'a fait que reproduire un texte déjà publié dans d'autres journaux ou
fourni par une agence de presse223. Dans ces conditions, les hypothèses d'irresponsabilité du directeur de la publication se réduisent à des cas extrêmement
marginaux - par exemple « le directeur de la publication d'un journal ne saurait
encourir aucune responsabilité du fait de l'insertion d'une annonce dont il ne
peut légalement se dispenser »224.
249 › Cette responsabilité de plein droit est-elle compatible avec la présomption
d'innocence ? La Cour de cassation l'a déjà affirmé225. La solution est plus trouble
du côté de la CEDH, qui n'a statué que sur la conventionalité de l'article 93-3 de la
loi du 29 juillet 1982, pour considérer que le système similaire qui y est institué
demeure, au regard de l'article 6§2 de la Conv. EDH, dans les limites du raisonnable, notamment parce que « le directeur de la publication peut s'exonérer de sa
responsabilité en démontrant la bonne foi de l'auteur des propos incriminés ou
l'absence de ''fixation préalable'' du message litigieux »226. Cependant le directeur ne semble pas pouvoir invoquer lui-même la bonne foi de l'auteur des
propos227, de sorte que la conventionalité de l'article 42 reste douteuse228. Le
Conseil constitutionnel ne s'est pas davantage prononcé sur l'article 42 ; mais il
a pu rappeler, à nouveau au sujet de l'article 93-3 de la loi de 1982, qu'une présomption irréfragable ne saurait être admise au regard de l'article 9 DDHC229.
219.
220.
221.
222.
223.
224.
225.
226.
227.
228.
229.

Cass. ch. mixte, 3 juin 1998, no 94-12886 (B).
Cass. crim., 6 oct. 1992, no 90-80684 (B).
Cass. crim., 3 oct. 1983, no 83-90512 (B).
V. par ex. : Cass. crim., 8 juill. 1986, no 85-94458 (B).
V. Cass. crim., 23 mai 1995, no 93-82815 (B), pour une dépêche de l'AFP reprenant un communiqué du ministère de la Culture.
Cass. crim., 17 oct. 1995, no 93-85440 (B) ; v. antérieurement, au sujet du directeur du Journal Officiel :
Cass. crim., 17 févr. 1981, no 79-95028 (B).
Cass. crim., 17 déc. 1991, no 90-83534 (B) ; Cass. crim., 23 févr. 2000, no 99-83928 (B).
CEDH, 2e sect., 30 mars 2004, no 53984/00, Radio France et a. c/France, § 24. V. en effet : Cass. crim.,
11 sept. 2007, no 05-87628 (B) ; et sur internet : Cass. crim., 7 mai 2018, no 17-82663 (B).
Cass. crim., 20 mai 2003, no 01-87219.
En ce sens : J. BOSSAN, « Responsabilité pénale en cascade dans la presse écrite et l'édition », fasc. préc., no 54.
Cons. const., 16 sept. 2011, no 2011-164 QPC, cons. 7. V. infra no 289.

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