Guide pratique - La procédure pénale en droit de la presse - 1re - 187

LA SAISINE DE LA JURIDICTION D'INSTRUCTION

que de préciser le mode de publicité qui confère à la diffamation son caractère
délictuel »68. La jurisprudence se conformerait ainsi à l'esprit du formalisme
édicté par les articles 50 et 53. En revanche, ces solutions peuvent surprendre
si elles sont comparées au principe d'indifférence des griefs qu'entraîne le
caractère d'ordre public de la nullité69 - du moins celle de l'article 50.
427 › Une solution identique fut retenue pour une citation qui qualifiait les faits
de diffamation non publique, et visait « les articles 29, alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881, et R. 621-1 du Code pénal, le visa erroné, mais surabondant, de l'article
23 n'a pas eu pour conséquence de créer une incertitude dans l'esprit du prévenu quant à la nature de l'infraction dont il avait à répondre et à la peine
encourue »70. Cette solution est peut-être exagérément souple. D'abord parce
que la publicité caractérise un délit, l'absence de publicité une contravention
de sorte qu'il existe bien un doute sur la nature de l'infraction... Ensuite parce
que l'article 23, alinéa 1er est lui-même un texte d'incrimination (provocation
directe et suivie d'effet à la commission d'un crime ou délit), de sorte qu'il pourrait en résulter une double qualification suscitant un doute dans l'esprit du
prévenu71.
428 › Indications insuffisantes. En revanche, laisse incertaine la base de la
poursuite la plainte comprenant, d'une part, l'indication cumulative des qualifications de diffamation et de provocation à la discrimination, à la haine ou à la
violence à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance à une religion
déterminée, d'autre part, visant l'article 32 de la loi sur la liberté de la presse
sans préciser l'alinéa applicable cependant que la partie civile visait l'article 48,
6º et la nécessité d'une plainte de la personne diffamée dans le cas de diffamation envers un particulier tout en faisant état de son origine maghrébine et de sa
pratique de la religion musulmane72.
De même, il fut logiquement jugé qu'« une plainte avec constitution de partie civile
qui (...) vise de manière approximative un ensemble de textes applicables à des
infractions de nature et de gravité différentes, laisse incertaine la base de la poursuite et ne satisfait pas aux exigences de l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881 »73. La
jurisprudence semble assez rigoureuse. Comme l'écrit un spécialiste de la matière,
« À l'instar de la qualification, le visa de chaque texte doit donc se rapporter à un fait
précis : lorsque la publication de plusieurs propos est en cause, un effort de rédaction supplémentaire est donc attendu de l'auteur de l'acte à l'origine des poursuites :
il doit non seulement qualifier chacun mais indiquer aussi le texte édictant la peine
applicable à celui qui a pris l'initiative de la publication »74.
429 › Cas particuliers. Comptage des alinéas. Lorsqu'un même texte contient
plusieurs incriminations - pensons au complexe article 24 de la loi sur la presse
68.
69.
70.
71.
72.
73.
74.

Cass. crim., 28 sept. 1993, no 93-83150 ; Cass. crim., 14 avr. 1992, no 87-80411 (B).
V. infra no 446.
Cass. crim., 11 avr. 2012, no 11-87688 (B) ; Cass. crim., 24 nov. 2009, no 09-80841 (B).
Comp. supra no 418.
Cass. crim., 9 janv. 2018, no 17-80234.
Cass. crim., 25 juin 2013, no 12-84696 (B) ; adde Cass. crim., 23 avr. 2003, no 02-84435, concernant l'art. 53.
E. DREYER, « Saisine des juridictions. Formalisme de l'acte à l'origine des poursuites », fasc. préc., no 23.

187
http://www.73.La
Guide pratique - La procédure pénale en droit de la presse - 1re

Table des matières de la publication Guide pratique - La procédure pénale en droit de la presse - 1re
