Guide pratique - La procédure pénale en droit de la presse - 1re - 58

LA PROCÉDURE PÉNALE EN DROIT DE LA PRESSE

103 › Effet sur les auteurs ou complices. Devant le juge pénal, le dernier alinéa
de l'article 9-2 du Code de procédure pénale prévoit encore que « Le présent
article est applicable (...) aux auteurs ou complices non visés par l'un de ces
mêmes acte, jugement ou arrêt ». L'interruption a donc un effet in rem qui se
traduit par une portée erga omnes, à l'égard de tous les auteurs et complices
de l'infraction, connus ou inconnus, bien que les poursuites n'aient été engagées
que contre un seul d'entre eux ou même seulement contre personne non
dénommée. La loi de février 2017 ne faisait que consacrer une solution retenue
depuis le XIXe siècle.
En droit pénal des médias, la solution ne semblait pas être la même : ainsi peut-on
relever un arrêt reprochant précisément à une cour d'appel d'avoir estimé « qu'en
matière d'infractions à la loi du 29 juillet 1881, l'acte interruptif de prescription produit ses effets à l'égard de toutes les personnes ayant pris part, comme auteur ou
comme complice, aux faits poursuivis »3. Peut-être la réforme de 2017 va-t-elle
influer en la matière ; le sort de l'action publique rejoindrait alors celui de l'action
civile au sujet de laquelle il est jugé qu'« en matière d'infractions à la loi du 29 juillet 1881, l'acte interruptif de prescription produit ses effets à l'égard de toutes les
personnes ayant pris part, comme auteur ou complice, aux faits poursuivis et tenues
in solidum d'en réparer les conséquences dommageables »4. De la sorte, même la
citation délivrée à la seule entreprise éditrice, en sa qualité de civilement responsable, interrompt la prescription à son égard et à l'égard des prévenus non cités
car ayant changé d'adresse5.
104 › Absence d'effet sur les autres infractions. Si une interruption de prescription a un effet absolu en matière pénale, ce caractère ne s'étend qu'aux participants à la même infraction et le cas échéant aux infractions connexes, mais
ne saurait viser d'autres auteurs d'autres infractions non connexes, au seul prétexte qu'une information unique a été ouverte par commodité procédurale. Tel
est le cas lorsqu'une instruction est ouverte à la suite d'une plainte visant plusieurs médias pour des articles de presse consacrés au même sujet et argués
de diffamation par la même partie civile. Alors « la prescription prévue par la loi
sur la liberté de la presse ne peut être interrompue, pour chacune des infractions, que par un acte de poursuite visant l'infraction même qui est envisagée et
lorsqu'à l'occasion de délits de presse distincts et non connexes, commis par
des personnes différentes, une information unique a été ouverte, un acte interruptif de prescription se rapportant exclusivement à la poursuite d'un de ces
délits, ne saurait avoir d'effet à l'égard des autres infractions »6. La jurisprudence de la Cour de cassation va dans le même sens7. En conséquence, il
importe de renouveler régulièrement les actes interruptifs à l'encontre de l'ensemble des infractions poursuivies.
Cass. crim., 16 sept. 2014, no 13-85142.
Cass. 2e civ., 23 oct. 2003, no 00-19853 (B).
CA Versailles, 1er déc. 1995 : Gaz. Pal., 1996, jurisprudence p. 423.
TGI Paris, 17e ch., 30 mai 2014, cité par C. BIGOT, « Un an de droit processuel de la presse », CCE, 2015, étude 3,
no 7.
7. V. not. Cass. crim., 21 mai 1985, no 84-93921 (B).

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