Guide pratique - La procédure pénale en droit de la presse - 1re - 60

LA PROCÉDURE PÉNALE EN DROIT DE LA PRESSE

son égard et qui doit surveiller la procédure, de faire signifier elle-même, avant l'expiration du délai de prescription, la décision qui n'a pas été prononcée contradictoirement contre le prévenu »14.
108 › Cette obligation est contraignante pour la partie civile, spécialement au
stade de l'appel. À ce stade en effet, même « en cas d'inaction du ministère
public, il appartient à la partie civile d'assigner le prévenu à l'une des audiences
de la cour d'appel pour interrompre le cours de la prescription »15. Et c'est vainement qu'il est soutenu que l'appel du prévenu n'ayant pas été dénoncé à la
partie civile, cette dernière n'avait aucune possibilité de faire venir l'affaire
devant la Cour et ne pouvait qu'attendre une citation à la requête du procureur
général16. Et, lorsque la partie civile elle-même a interjeté appel, elle ne peut se
contenter de signifier au prévenu les conclusions et demandes qu'elle entend
formuler au soutien de son recours. Il lui appartient alors « de faire citer ellemême le prévenu, avant l'expiration du délai de prescription, à l'une des audiences de la juridiction du second degré »17.
109 › C'est cette solution qui conduit à des situations qu'un auteur qualifie
d'« ubuesques »18, puisqu'elle oblige la partie civile à faire citer le prévenu
alors même que le dossier n'a pas été transmis à la cour d'appel par le ministère public, dans le délai de trois mois de la prescription ; la citation du prévenu
devant la cour s'impose aux seules fins de lui indiquer que la partie civile ne
renonce pas à le voir condamné... Pour cela, elle a été contestée par l'intermédiaire des contrôles de conventionalité et de constitutionnalité :
* Le premier contrôle fut opéré par le juge français en tant que premier juge de
la conventionalité des lois. À ce titre, après avoir rappelé qu'il appartenait aux
parties civiles « en cas d'inaction du ministère public, de faire citer [elles]mêmes, avant l'expiration du délai de prescription, les prévenus à l'une des
audiences de la juridiction du second degré, sauf le droit, pour cette dernière,
de renvoyer la cause à une autre audience utile, par une décision interruptive
de prescription », la chambre criminelle de la Cour de cassation affirmait
« Que l'obligation de surveiller la procédure, qui incombe à la partie poursuivante en matière de délits de presse, n'est pas incompatible avec les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales »19 ; plus récemment, elle retenait
également sa compatibilité avec l'article 13 de la même convention20. Dans
une décision d'irrecevabilité en 2008, la CEDH ne contredit pas les juges
français21 ;

14.
15.
16.
17.
18.
19.
20.
21.

Cass. crim., 4 sept. 2018, no 17-85963 (B).
Cass. crim., 25 févr. 2003, no 02-81638 (B).
Cass. crim., 26 oct. 1949 : Bull. crim., no 297.
V. par ex. : Cass. crim., 17 juin 2008, no 07-86330 (B).
E. DREYER, « Prescription », fasc. préc., no 66.
Cass. crim., 21 mars 1995, no 93-81642 (B).
Cass. crim., 20 oct. 2015, no 14-87122 (B).
CEDH, 5e sect. (déc.), 29 avr. 2008, no 24562/03, Clinique Sainte Marie c/France.

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