Revue - Gazette du Palais n° hors-série - 12 juin 2017 - 90

Actes de colloque

qu'elles aboutissaient à « mettre une couche de droit »
- entendons : d'insécurité juridique - sur une pratique
des négociations de M&A qui a mis 30 ans à s'organiser. Trop d'information tue l'informations : afin de ne
pas prendre le risque de violer les exigences nouvelles
de l'article 1112-1, il est envisagé de supprimer la phase
des Q/A, pourtant utile dans le processus de négociations. Et Stéphanie Fougou a expliqué que ces exigences
conduisent à dilater les préambules des contrats, à accumuler une paperasse et des archives énormes, voire à
créer des emails artificiels afin de pouvoir répondre un
jour aux griefs d'insuffisante information ou de négociation de mauvaise foi. Personne ne peut être hostile à la
bonne foi, la loyauté, la transparence... Mais les tribunaux
avaient réussi à les faire régner sans mettre en péril l'efficacité des négociations. En sera-t-il encore ainsi demain ?
Et puis les critiques se sont concentrées sur la révision
pour imprévision, désormais ouverte à l'article 1195. C'est
le pouvoir du juge que redoute la pratique... et parfois les
juges eux-mêmes. Julia Heinich s'est efforcée de montrer
que les dispositions de ce texte étaient compatibles avec
les exigences de la pratique des affaires. Il n'empêche :
comme l'a montré Jean-Pierre Grandjean et confirmé
Bruno Dondero ainsi que Stéphanie Fougou, la pratique

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entend écarter systématiquement et en bloc l'application
de ce texte, ce qui paraît possible. Mais alors le risque,
surtout dans les contrats de longue durée exposés aux
changements de circonstances, est de n'offrir aux parties aucune alternative à la rupture, alors que certaines
clauses permettraient d'introduire une souplesse sans
recourir au juge. D'ailleurs, plutôt qu'une méfiance, au
demeurant injustifiée, envers le juge, cette stratégie
d'évitement traduit le souci d'éviter le procès et ses incertitudes, peu compatibles avec la vie des affaires.
Au total, la réforme française du droit des contrats
présente des progrès importants que Hugo Barbier a
soulignés en essayant de lutter contre le défaitisme à
la française, rejoint en cela par Bruno Dondero. Une
interprétation « business friendly » souhaitée par
Bertrand Fages et Franck Julien lui permettra d'atteindre
ses objectifs d'efficacité et de justice. Il est possible aussi
que la loi de ratification contribue à supprimer ce qui n'a
pas sa place dans le Code civil - parce qu'il l'a ailleurs, en
particulier dans le Code de la consommation et le Code de
commerce : les conséquences d'une inégalité structurelle
entre les acteurs, et en particulier le contrat d'adhésion et
ses séquelles. D'ici là, c'est à l'ingéniosité des parties et
des juristes qu'il faut confier ce nouveau corps de règles.

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296e4

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