Revue - Gazette du Palais - Hors Série du 15 septembre 2021 - 54

Actes de colloque
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LE DROIT DE LA CONCURRENCE AU CHEVET DU QUOTIDIEN
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Concurrence et commande publique
L'essentiel
Vous avez souhaité par ce thème de la concurrence et de la commande publique introduire du droit
administratif dans un univers - le droit de la concurrence - exclusivement tourné vers les comportements
privés des opérateurs économiques, très éloignés d'une quelconque ambiance publique. Mais comme je
vais m'efforcer de le démontrer, il n'y a aucun oxymore entre ces deux termes, concurrence et commande
publique.
D'abord, la commande publique confronte deux interlocuteurs. Une personne publique, bien sûr, mais aussi,
en général, une personne privée, celle-là même à laquelle il est demandé d'effectuer les travaux, de rendre
le service ou de livrer le bien commandés par la première. Il n'est donc pas surprenant que cette personne
privée doive respecter les principes habituels - de droit privé - qui la gouvernent.
Ensuite, la personne publique a dû très vite s'apercevoir que ce droit de la concurrence lui apportait
suffisamment d'avantages en termes de qualité de la prestation et de coût, notamment, pour qu'elle lui
ménage une place de choix dans le processus de ses achats.
Et si, dans une approche optimiste et large du droit positif, on estime qu'une personne publique n'obéit qu'aux
règles qu'elle s'est fixée, on peut admettre que ces avantages qu'apporte le droit de la concurrence valent
bien les contraintes qu'il fait peser aussi sur l'acheteur public.
C
e ne fut quand même
pas le premier mouvePar
Lucienne
ERSTEIN
Conseillère d'État
honoraire
ment de l'administration
de réglementer ses marchés.
Si l'État découvrit au
Moyen Âge que le procédé
contractuel était une belle
manière d'obtenir des personnes
privées qu'elles
réalisent ce dont il avait
besoin, il fallut attendre
1836 pour qu'apparaisse
la première ordonnance
réglementant les achats de
l'État et
l'année suivante
un texte similaire pour les
achats des communes. Ces ordonnances instauraient
deux obligations, la publicité et la mise en concurrence.
L'Europe et ses principes étaient pourtant encore très
loin. La première codification des textes réglementaires
apparut en juillet 1964 et le premier code des marchés
publics en novembre 1966. Les pratiques de publicité et
de mise en concurrence ne devaient pas être alors suffisamment
vertueuses pour que le législateur éprouve la
nécessité d'intervenir lourdement sur la transparence et
la régularité des procédures de dévolution des marchés,
d'abord avec les lois n° 91-3 du 3 janvier 1991 et n° 921282
du 11 décembre 1992 qui annonçaient la loi Sapin
n° 93-122 du 29 janvier 1993 qui n'hésitait pas à s'intituler
loi relative à la prévention de la corruption et à la transparence
de la vie économique et des procédures publiques.
Dix années plus tard arrivent les premières directives
européennes qui finiront en position dominante voire
exclusive dans l'univers juridique des marchés publics.
Elles conduisent en 2001 au premier Code des marchés
NDA : Le style oral de l'intervention a été conservé.
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publics qui concerne aussi bien l'État que les collectivités
territoriales. Un nouveau code en 2004, puis en 2006,
le législateur peine à suivre les avancées du droit européen
qui connaît son apothéose en 2009 avec la directive
Recours n° 2007/66/CE du 11 décembre 2007 qui révolutionne
le contentieux des contrats administratifs. Puis le
code est remplacé en 2015 par une ordonnance complétée
en 2016 par deux décrets.
Et règne aujourd'hui, depuis le 1er
avril 2019, un nouveau
code dénommé Code de la commande publique. Les
principes énoncés comme leurs objectifs sont très vite
annoncés à l'article L. 3. Ils ne sont pas nouveaux mais
sonnent comme un rappel. L'acheteur public doit respecter
le principe d'égalité de traitement des candidats
à l'attribution d'un contrat de la commande publique. Il
doit mettre en œuvre les principes de liberté d'accès et de
transparence des procédures. Et ce, afin d'assurer l'efficacité
de la commande publique et la bonne utilisation des
deniers publics. Et si, par hasard, le contrat a pour objet
l'exécution d'un service public, il doit en respecter l'une
des qualités principales, la continuité.
On comprend tout de suite que le droit de la concurrence
ne peut que s'épanouir dans un tel contexte, celui des
principes de la commande publique (I), mais aussi celui
des sanctions de la méconnaissance du droit de la concurrence
(II).
I. PRINCIPES DE LA COMMANDE
PUBLIQUE
Les trois principes de la commande publique - libre accès,
égalité de traitement, transparence des procédures -
conduisent naturellement à l'application du droit de la
concurrence (A) et constituent même un instrument de
respect de ce droit par les marchés publics (B).
GAZETTE DU PALAIS - mercredi 15 septembre 2021 - N O
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