Les Carrés Rouges - L'essentiel des Grands arrêts de droit pénal et de procédure pénale 2017-2018 - 2e - 26

L'ESSENTIEL

DES

GRANDS

ARRÊTS DU

DROIT

PÉNAL ET DE LA

PROCÉDURE

PÉNALE

7 Cass. crim., 30 oct. 2013, (application de la loi dans l'espace,
complicité d'un acte commis à l'étranger)
Attendu que, pour déclarer M. X... coupable de complicité d'importation sans déclaration de marchandises fortement
taxées, l'arrêt prononce par les motifs repris aux moyens ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Qu'en effet, l'acte de complicité d'une infraction principale commise en France relève de la loi française ; D'où il suit que
les moyens ne peuvent être accueillis ;

■ Fait
Un commerçant espagnol avait vendu du tabac, en grande quantité avec une marge autorisée par décret royal, à différents individus qui se chargeaient de le revendre en France selon un plan de fraude bien rodé. Le réseau démantelé, le
commerçant fut poursuivi et condamné du chef de complicité, par aide ou assistance, du délit d'importation non
déclarée de marchandise fortement taxée. Pour entrer en condamnation, les magistrats de la Cour d'appel d'Orléans
relevaient pour caractériser l'élément intentionnel du délit de complicité la preuve que ce commerçant avait eu conscience de collaborer à l'action principale, et qu'il avait agi volontairement afin de favoriser la commission de l'infraction, peu important que le concert frauduleux réponde à des mobiles différents, à savoir, la volonté d'accroître son
chiffre d'affaires.
Sur un moyen de cassation relevait d'office, la Chambre criminelle censure l'arrêt d'appel sur le prononcé d'une peine
d'amende non prévue par le texte incriminateur, mais les juges du droit valident, de manière assez singulière, la poursuite et la condamnation de ce commerçant espagnol.

■ Portée
L'application de la loi pénale dans l'espace soulève bien des interrogations. Face à des différents principes envisageables, le Code pénal fait le partage entre les infractions commises sur le territoire et celles commises hors du territoire.
Guidé par le principe de territorialité, il est aisé d'affirmer que la loi pénale française a vocation à s'appliquer à toutes
les infractions réalisées sur le territoire national, ces faits fussent-ils commis par des étrangers. Il arrive que l'infraction
soit « éclatée » dans l'espace. Il est aisé d'imaginer qu'une partie de l'infraction ait été commise en France et une
autre à l'étranger. Face à une telle situation, dans un mouvement légitime teinté d'impérialisme, le législateur étend le
principe de territorialité et ouvre la compétence du Code pénal. Il en est ainsi, selon les dispositions de l'article 113-5
du Code pénal, l'infraction étant réputée commise sur le territoire, pour l'acte de complicité commis en France d'un
crime ou d'un délit commis à l'étranger. La compétence pénale est alors soumise à une double condition. La première,
dite de réciprocité d'incrimination, impose que le crime ou le délit soit puni tant par la loi française que par la loi étrangère. La seconde exige que le crime ou le délit ait été préalablement constaté par une décision définitive de la juridiction étrangère. L'article 113-5 ne prévoit l'hypothèse inverse à savoir la compétence de la loi française pour l'acte de
complicité commis à l'étranger d'une infraction commise en France.
La compétence de la loi française pour l'acte de complicité commis à l'étranger entraînerait moins de difficultés si l'acte
reproché à ce complice tombait sous le coup de la loi étrangère. Or, travaillant dans le silence du Code pénal, la
Chambre criminelle se débarrasse de l'exigence de réciprocité. Dans cette affaire, la logique poursuivie fait abstraction
du fait que la législation espagnole permettait à ce commerçant de vendre plus de tabac et de cigarettes que les

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