Les Carrés Rouge - L'essentiel des Grands arrêts du droit du travail 2017-2018 - 2e - 123

CHAPITRE 12 - Après-contrat de travail
l'activité de l'entreprise et des fonctions exercées par le salarié. En tout état de cause, la clause qui ne permet pas au
salarié de retrouver un emploi conforme à son expérience professionnelle est illicite, même limitée dans le temps et
l'espace. Enfin, la clause doit prévoir une contrepartie financière. Celle-ci doit être réelle ; son paiement ne peut pas
intervenir avant la rupture du contrat et doit être prévu quel que soit le mode de rupture. Celle-ci ne doit pas être dérisoire (C. civ., art. 1169), ce critère étant apprécié en fonction de l'étendue de l'obligation et des fonctions du salarié. A
été considérée comme dérisoire une contrepartie correspondant à 10 % du salaire pour un cadre dirigeant soumis à
une obligation couvrant l'ensemble de la France, alors qu'un même pourcentage a été jugé suffisant pour un commercial soumis à une obligation limitée à certaines régions.
L'absence de l'une de ces conditions plonge la clause dans l'illicéité, celle-ci étant en principe atteinte de nullité relative
(le salarié pouvant néanmoins préférer la voie de la réfaction en cas de disproportion spatiale, temporelle ou professionnelle). La Cour de cassation avait jugé que la stipulation d'une clause de non-concurrence illicite causait nécessairement un préjudice qui pouvait s'ajouter au préjudice nécessairement subi en cas d'exécution de la clause illicite après la
rupture du contrat. Elle est revenue sur sa jurisprudence, le 25 mai 2016, en considérant, conformément au droit
commun, qu'il appartient au salarié de démontrer l'existence et l'importance de son préjudice. Si les conditions sont
respectées, le manquement du salarié libère l'employeur et lui permet de solliciter des dommages-intérêts (les parties
prévoyant souvent une clause pénale). Mais il est possible que l'employeur se rende compte que l'exécution de la
clause n'est plus nécessaire. C'est la raison pour laquelle la Cour de cassation valide la stipulation d'un droit de rétractation permettant à l'employeur, le jour de la rupture (ou dans un délai raisonnable), de renoncer à la clause de nonconcurrence et de se libérer du versement de la contrepartie.

Pour aller plus loin
* Cass. soc., 2 déc. 2015, nº 14-19029 : ayant relevé que la clause de non-concurrence réservait à l'employeur la faculté
de renoncer à tout moment, avant ou pendant la période d'interdiction, aux obligations qu'elle faisait peser sur le
salarié et retenu que ce dernier avait été laissé dans l'incertitude quant à l'étendue de sa liberté de travailler, la cour
d'appel en a exactement déduit que la clause devait être annulée en son ensemble.
* Cass. soc., 14 janv. 2014, nº 12-27284 : des restrictions peuvent être apportées à la liberté d'expression pour assurer la
protection de la réputation et des droits d'autrui dès lors que ces restrictions sont proportionnées au but recherché.
Après avoir retenu que, par la transaction, les parties avaient entendu mettre fin à une intense polémique médiatique
entretenue par le salarié après son licenciement, de nature à nuire à la réputation de son employeur, que cette transaction comportait l'engagement réciproque de cesser tout propos critique et dénigrant, qu'elle était précise dans son
objet et quant aux personnes physiques et morales ainsi qu'aux programmes que le salarié s'engageait à ne pas critiquer ni dénigrer, qu'elle était limitée à dix-huit mois, la cour d'appel a pu en déduire qu'elle était justifiée et proportionnée au but recherché.

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