Les Carrés Rouge - L'essentiel des Grands arrêts du droit du travail 2017-2018 - 2e - 139

CHAPITRE 14 - Représentation syndicale
statuts, poursuit dans son action un objectif illicite, ce qui n'a jamais été reconnu (ce qui en fait un critère symbolique).
L'indépendance, consubstantielle à l'existence du syndicat, est présumée. Il appartient donc de prouver le défaut
d'indépendance d'un syndicat face aux puissants qui sont, hors de l'entreprise, l'État et les partis et, dans l'entreprise,
les dirigeants. Le critère de la transparence financière, lié au scandale de l'affaire UIMM, impose aux syndicats de
démontrer la provenance et l'utilisation de leur finance par le biais de documents comptables obligatoires (même si
leur défaut peut être suppléé par d'autres documents devant le juge).
Les critères appréciés globalement et périodiquement sont l'ancienneté, les effectifs et cotisations, l'audience électorale
(critères quantitatifs) et l'influence (critère qualitatif). L'audience, épine dorsale de la réforme de la représentativité, est
un critère mixte (C. trav., art. L. 2122-1, L. 2122-5, L. 2122-6 et L. 2122-9). Au niveau de l'entreprise ou du groupe,
elle suppose l'obtention d'au moins 10 % des suffrages valablement exprimés au premier tour des élections des
membres du comité d'entreprise (ou des comités d'établissement) ou de la délégation unique du personnel ou, à
défaut, des délégués du personnel (le chiffre étant porté à 8 % aux niveaux supérieurs). Un suffrage élevé permettra
de compenser la faiblesse d'autres critères (mais non le défaut de transparence, d'indépendance ou de respect des
valeurs républicaines). C'est pour ce critère que la Cour de cassation a décidé, en 2013 et 2014, de privilégier la stabilité des mandats des délégués syndicaux et la sécurité des négociations collectives en optant pour une mesure de la
représentativité pour la durée du cycle électoral (en principe de quatre ans conformément à la durée des mandats des
élus), peu important les élections intermédiaires ou transferts d'établissement. S'agissant de l'ancienneté, il est étrange
de l'apprécier périodiquement alors qu'une fois acquise sa durée minimale de deux ans à compter de la date de dépôt
des statuts (nonobstant les modifications statutaires décidées par le syndicat), celle-ci augmente de manière continue
(une longue ancienneté pouvant compenser la faiblesse d'un autre critère).
Le critère de l'effectif et des cotisations est purement relatif (car non chiffré) : il suffit que les adhérents d'une organisation soient suffisants dans le champ géographique et professionnel en cause pour que le critère soit réalisé. L'apport
de l'arrêt est d'affirmer qu'il s'apprécie au moment des dernières élections. En l'espèce, selon les requérants, la représentativité du syndicat devait s'apprécier à la date d'exercice de la prérogative (principe de concordance temporelle),
soit la désignation du nouveau délégué syndical. Or, le syndicat ne pouvait plus se réclamer des effectifs qui étaient
les siens lors de l'élection. La Cour de cassation rejette cette argumentation et approuve le tribunal d'instance d'avoir
constaté qu'au moment des élections professionnelles, le syndicat, qui avait obtenu plus de 10 % des suffrages
exprimés, comptait plus de cent vingt adhérents sur cent soixante-quinze salariés. Le syndicat était donc demeuré
représentatif au sein de l'entreprise lors de la désignation contestée, nonobstant la désaffection subie. Enfin,
« l'influence est prioritairement caractérisée par l'activité et l'expérience ». Celle-ci, appréciée en considération de la
date de création du syndicat et non de l'expérience personnelle de ses membres ou de l'union à laquelle il a adhéré,
s'entend de résultats objectifs d'une activité authentiquement tournée vers la défense et les intérêts des salariés
(tracts, affichages, réunions, grèves, actions en justice...).

Pour aller plus loin
* Cass. soc., 18 mai 2011, nº 10-60406 : la représentativité est d'ordre public absolu, ce qui interdit à un accord collectif
comme à un employeur de reconnaître cette qualité à une organisation qui n'a pas satisfait à ces conditions.
* Cass. soc., 22 févr. 2017, nº 16-60123 : tout syndicat doit, pour pouvoir exercer des prérogatives dans l'entreprise,
satisfaire au critère de transparence financière.

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