Les Carrés Rouge - L'essentiel des Grands arrêts du droit du travail 2017-2018 - 2e - 163

CHAPITRE 17 - Représentants du personnel
l'employeur » ? Selon la cour d'appel, une « décision » suppose que le projet contienne des mesures concrètes et définitives ; la notion d'« employeur » doit s'entendre des dirigeants de droit de la société. La Cour de cassation balaie ces
deux arguments. D'abord, elle indique qu'« une décision s'entend d'une manifestation de volonté d'un organe dirigeant qui oblige l'entreprise ». Tout dépend alors de la nature de la décision en cause. Ainsi, l'organe dirigeant
renvoie, en cas de décision de nature économique touchant l'existence même de l'entreprise (comme une fusion), au
conseil d'administration si l'entreprise est constituée sous forme de société anonyme de type moniste. En l'espèce, la
Cour note que « le conseil d'administration de la CAF est un organe dirigeant, en vertu de l'article L. 212-2 du Code
de la sécurité sociale, ayant le pouvoir de prendre une décision au sens de l'article L. 431-5 » du Code du travail.
Ensuite, elle précise qu'une décision qui oblige une entreprise n'implique pas nécessairement des mesures précises et
concrètes. Constitue donc une décision un projet, même formulé en termes généraux, lorsque son objet est assez
déterminé pour que son adoption ait une incidence sur l'organisation de l'entreprise, sans être accompagné dans
l'immédiat de mesures précises et concrètes d'application dès lors que la discussion ultérieure de ces mesures n'est
pas de nature à remettre en cause, dans son principe, le projet adopté. La Cour de cassation adopte une définition
pragmatique de la notion de « décision ». Il s'agit de toute prise de position qui peut avoir une incidence « irréversible », quant à ses effets, sur l'un des éléments du projet définitif de l'employeur. Il s'ensuit qu'un tel projet inscrit
dans une procédure complexe comportant des décisions échelonnées impose la consultation du comité d'entreprise à
l'occasion de chacune d'elles. Encore faut-il s'assurer que le projet initial est définitif même dans son principe. Par
exemple, la chambre criminelle a indiqué qu'un projet de licenciement collectif non encore définitif, même s'il est
annoncé dans la presse, ne justifie pas la consultation du comité.

Pour aller plus loin
* Cons. const., 4 août 2017, nº 2017-652 : d'une part, afin de prévenir le risque que le comité d'entreprise soit empêché
d'exercer ses prérogatives si l'employeur ne lui délivre qu'une information imprécise ou incomplète, le 2e alinéa de
l'article L. 2323-4 du Code du travail l'autorise à saisir le juge pour qu'il ordonne la communication des informations
manquantes. Le juge se prononce alors en la forme des référés, avec la pleine compétence du TGI. Il doit rendre sa
décision dans un délai de huit jours. D'autre part, si le dernier alinéa de cet article exclut que cette saisine ait, à elle
seule, pour effet de prolonger le délai d'examen de l'avis, le législateur a prévu que cette prolongation peut en
revanche être décidée par le juge lui-même, « en cas de difficultés particulières d'accès aux informations nécessaires à
la formulation de l'avis motivé ». À cet égard, le juge tient compte, dans son appréciation, du délai qui restera, après
sa décision, au comité d'entreprise pour rendre son avis, afin de repousser ce délai pour que le comité puisse se
prononcer de manière utile une fois l'information obtenue. L'éventualité, à l'occasion de certaines procédures, du nonrespect des délais prévus par la loi pour des motifs tenant aux conditions de fonctionnement des juridictions, qui
risquent de statuer au-delà du délai de huit jours, ne saurait suffire à entacher celle-ci d'inconstitutionnalité.
* Cass. soc., 18 janv. 2011, nº 10-30126 : aux termes de l'article L. 2323-78 du Code du travail, lorsque le comité
d'entreprise a connaissance de faits de nature à affecter de façon préoccupante la situation économique de l'entreprise,
il peut - sauf abus - demander à l'employeur de lui fournir des explications et si les réponses de celui-ci sont insuffisantes ou incohérentes, établir un rapport qu'il lui transmet.
* Cass. soc., 26 oct. 2010, nº 09-67760 : aux termes de l'article L. 2323-19 du Code du travail, le comité d'entreprise est
informé et consulté sur les modifications de l'organisation économique ou juridique de l'entreprise, peu important que
celles-ci soient la conséquence de dispositions légales.
* Cass. soc., 5 juill. 2006, nº 04-18814 : si la mise en œuvre par un directeur d'établissement des dispositions spécifiques
à l'établissement nécessitées par l'application d'une décision de la direction générale doivent faire l'objet d'une information-consultation du comité d'établissement, celui-ci n'a pas à être informé ni consulté sur la décision de principe qui
relève de la décision de la direction générale et de la compétence du comité central d'entreprise.

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